Bye bye vieilles ferailles » Faille urbaine en ville dense

January 10, 2018 | Author: Anonymous | Category: Arts et Lettres, Architecture
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Concours ASPIM «La France de 2035 et son immobilier»

« Bye bye vieilles ferailles » Faille urbaine en ville dense

Benoît Catella Martin Lagahe Camille de Muizon Diane Seive Tuteur Patrick Bosque - Directeur Général Adjoint Hines France

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Introduction C’était un 15 septembre de l’année 2015, une date banale pour beaucoup - pour l’immense majorité même - que le destin d’un jeune architecte que nous nommerons A. bascula. Et avec le sien beaucoup d’autres : celui des Parisiens, des Français, de voyageurs venus du Monde entier...et le nôtre. A. ferma les yeux, inspira profondément et se laissa transporter. Lorsqu’il les rouvrit, il vit la France, une toute autre France, celle de 2035. Durant deux décennies, Paris avait vibré sous l’organisation des Jeux Olympiques, Paris avait été transportée, subjuguée par l’Exposition Universelle. Elle avait pourtant dû faire face à des enjeux de taille pour en arriver là et échapper à la saturation qui la guettait, au foncier qui s’amenuisait. Lassée de restructurations coûteuses et à court d’idées pour retraiter ses friches ferroviaires et ses sites abandonnés, elle avait embrassé sa place de clé de voûte de la croissance nationale. Et c’est en prenant son envol que notre architecte comprit cette France, à travers Paris. Il la vit de plus haut, là-haut même où les immeubles n’étaient plus. Tel un chirurgien, A. s’imagina recoudre Paris, panser ses plaies, les recoudre une à une, appliquer son aiguille pour unifier la ville, puisqu’alors rien n’était plus simple. Les fractures qu’il imaginait avaient disparu. Si longue et coûteuse qu’avait été l’opération, elle avait fonctionné. Lorsque A. nous raconta ce qu’il vit, il sembla tout particulièrement troublé par un point d’ampleur à l’échelle d’une ville, d’un pays : la gare du Nord était recouverte. Toute l’emprise de ses voies ferrées n’était plus. Elle avait littéralement disparu de la carte. Seule la majestueuse gare trônait encore au coeur de Paris. Tout cela était - aux dires de A. - le résultat d’un ingénieux mélange entre dalle et bâtiments ponts qui se jouaient de contraintes ô combien difficiles à concilier. Cette offrande de foncier qui surgissait des dédales de la ville offrait l’occasion de bouleverser la vision contemporaine que l’homme et la société ont des typologies d’actif immobilier. Elle était le centre des technologies les plus ambitieuses et l’expression accomplie des architectes les plus talentueux de notre ère. Et alors même que nous ne pûmes nous résoudre à y croire, il nous fut impossible de ne pas investiguer, pour imaginer ce recouvrement des voies ferrées… et si A. disait vrai ? 1

Introduction........................................................................................................................1 I. La gare du Nord, une fracture au coeur de Paris a- Ne voyez vous pas ? Paris étouffe..........................................................................................5 b- Le foncier ne sera pas éternel................................................................................................7 c- 2035 : recoudre la ville............................................................................................................9

II. Reconstituons une unité au coeur de la Capitale a- 40 hectares de voies à verdir................................................................................................13 b- Recouvrement et suspension...............................................................................................17 c- Esquisse financière.................................................................................................................22

III. - Et si nous débridions notre conception du mot bâtir ? a- Innovation autour des matériaux.........................................................................................28 b- Quartier intergénérationnel et multifonctionnel...............................................................31 c- Hybridité urbaine...................................................................................................................35

Conclusion.........................................................................................................................39

I. LA GARE DU NORD, UNE FRACTURE AU COEUR DE PARIS

a.

Ne voyez vous pas ? Paris étouffe C’est d’une somme de hasards que naquit notre rencontre avec A. Son discours était posé, d’une grande sérénité et c’est par une invitation dans les méandres de ses songes que nous nous transportâmes quelques années plus loin : si vous le voulez bien, analysons le présent et commençons notre voyage dans le temps. Indéniablement, ce voyage débute par la constitution du paysage immobilier, par la définition d’hypothèses plausibles pour caractériser la France de 2035. La population, aussi bien à Paris que dans les petite et grande couronnes, ne cesse de croître. Effet conjugué d’une natalité dynamique et de l’attractivité parisienne, cet accroissement de la population est un fait que l’immobilier ne peut ignorer. Avec près de 2 millions d’habitants pour une superficie de 105 km2, Paris, au-delà d’être la ville la plus peuplée de France, est également la ville la plus dense. Le marché immobilier résidentiel est caractérisé par un déséquilibre structurel en raison d’une offre insuffisante face à l’augmentation du nombre de ménages. D’un point de vue démographique, la croissance de la population, qui dépend à la fois du solde naturel et migratoire, augmente le nombre det ménages au rythme de 250 000 par an en France et de 70 000 par an à Paris1. Cette progression a pour conséquence d’accroître la demande de logements à moyen et long terme. D’un point de vue sociologique, l’allongement de la durée de vie, mais aussi l’arrivée à l’âge de la retraite de personnes ayant cotisé toute leur vie avec un bon pouvoir d’achat fait émerger une nouvelle catégorie de population avec ses propres intérêts, du temps libre et de l’argent : les seniors. Ces mutations sociologiques ont pour principale conséquence l’attractivité des centres urbains, tandis que les activités industrielles sont renvoyées en périphérie des villes, en raison du danger et des nuisances qu’elles génèrent. Par ailleurs, la décohabitation entre générations, la divortialité et l’évolution des exigences, qui élèvent l’espace demandé ou créent même le besoin de disposer de plusieurs résidences, impliquent une diminution du nombre de personnes par ménage et ainsi l’augmentation de la demande de logements. 1

Source INSEE

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La demande potentielle de logements, qui correspond au flux annuel de construction de logements neufs, serait de l’ordre de 320 000 à 370 000 par an jusqu’en 20201. Ceci, conjugué à une démographie dynamique et à un apport de population extérieure, explique le manque de logements en France. L’enjeu essentiel est de renforcer l’attractivité de Paris dans le grand réseau international des Villes Mondes en compétition et de favoriser la mixité et la proximité en décongestionnant Paris …

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Trésor-Eco Research

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b.

Le foncier ne sera pas éternel Si la région parisienne dans son ensemble ne manque pas de foncier, notamment autour des 72 nouvelles gares du Grand Paris, le potentiel de logements constructibles dans Paris intra-muros est relativement limité. Dans une volonté actuelle de limitation de l’étalement urbain et d’intensification, la construction en zone dense doit être repensée. A Paris, une partie considérable du foncier disponible relève du patrimoine public. Parmi les plus importants propriétaires fonciers figurent le RFF, la SNCF, la RATP ou encore différents Ministères de l’Etat français. Depuis quelques années, l’Etat s’est engagé dans une politique de cession immobilière traduisant sa volonté, et celle des établissements publics, de mobiliser les terrains disponibles dans le but d’accroître l’offre de logements. La première session de « Réinventer Paris », lancée en novembre 2014, invite différents acteurs internationaux à réfléchir et à travailler ensemble pour proposer des projets urbains innovants sur 23 sites parisiens. Ainsi, avec le lancement de cet appel à projet, la ville de Paris permettra notamment le retraitement d’anciennes usines industrielles ou de friches ferroviaires, la construction sur des parcs de stationnement ou encore la vente de droits à construire sur le boulevard périphérique. Par ces différentes initiatives, on perçoit la motivation de la ville de Paris à densifier et à renouveler son immobilier dans un esprit d’innovation. Cependant, le foncier n’est pas éternel et la multiplication de telles initiatives sera très vite limitée par un foncier parisien de moins en moins disponible, puisque ce sont ces projets qui auront vu le jour à horizon 2035. Notre étude permettra de mettre en avant les solutions pour décongestionner Paris tout en libérant des espaces pour vivre. Dans ce cadre, l’insertion territoriale du réseau du Grand Paris joue un rôle central dans la recomposition de l’aménagement urbain, permise par la desserte de ses futures gares. Il est néanmoins nécessaire de libérer dans Paris intra-muros davantage de foncier autre que les espaces agricoles en périphérie, afin de limiter l’étalement urbain et l’intensification. Afin de remédier à cet constat, nous nous intéresserons aux moyens novateurs de créer et de développer des espaces. Tout d’abord, il est possible de gagner de la constructibilité en construisant en hauteur des immeubles de grande hauteur (IGH). Ce type de projet est néanmoins très controversé, car il s’oppose à l’architecture et à l’alignement des immeubles de Paris. La difficulté à valider des initiatives 7

visant à prendre de la hauteur encourage à chercher d’autres solutions plus “terre à terre”. Il est ainsi également possible, pour gagner du foncier, de densifier les espaces contraints et de réinventer constamment la ville en respectant l’évolution des mentalités et des besoins. Cependant, la ville ne pouvant s’étendre indéfiniment, il faudrait autoriser une densité supplémentaire maîtrisée dans des sites choisis. Pour construire dans un environnement déjà dense et complexe, l’inventivité et l’imagination ont toute leur place : pourquoi ne pas construire sur des ponts, au dessus des rivières ? Dans ce nouveau paradigme, les architectes jouent un rôle essentiel. Plusieurs agences d’architecture ont élaboré des projets de passerelles futuristes dans des grandes villes. L’architecte anglais Laurie Chetwood espère faire du London Bridge un complexe urbain futuriste en créant un pont habitable à usage mixte, comprenant la création de logements, marchés, restaurants et boutiques. Le pont habitable pourrait exister en Europe et en Asie et permettrait de gagner de l’espace dans les villes très densément peuplées. Ce concept s’est inspiré du pont habitable de Ponte Vecchio qui enjambe l’Arno, à Florence, en Italie. Ces structures semblent être des solutions idéales pour les grandes mégalopoles. Le pont habitable représenterait un gain de place considérable et permettrait de créer de la surface dans les villes arrivant à saturation. Par ailleurs, ces types de projets sont non seulement conçus pour être habitables mais également autonomes sur le plan énergétique. Pensés pour résoudre les problématiques de la ville moderne, ces ponts regorgeront de technologies vertes de façon à être autosuffisants en énergie. Enfin, le troisième moyen de création de foncier consiste à construire sur le périphérique ou sur les friches ferroviaires. Ces dernières constituent à notre sens la solution la plus convaincante et feront l’objet de développements ultérieurs.

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c.

2035: Recoudre la ville À présent, prenons un peu de distance, regardons Paris de plus haut. Dès lors que notre champ visuel s’élargit et que l’immensité de la capitale s’amenuise à mesure que notre envol se poursuit, l’évidence surgit. Nous apercevons des failles imposées au fil des siècles. Et l’essence originelle de ce mot, du latin fallere, prend tout son sens : tromper, induire en erreur, décevoir, faire défaut. Elle marque un manque. La faille peut être naturelle avec ce long fleuve de 13 km qui serpente en son cœur. Elle prend aussi une forme fonctionnelle pour assurer le déplacement des hommes qui la peuplent. Ce sont de véritables tranchées qui divisent cette ville, matérialisées par le boulevard périphérique ou encore, plus au centre, par ses gares. On en dénombre aisément six d’ici haut, pénétrant dans la ville comme autant d’incisions dans le tissu urbain. Nous ne proposons évidemment pas de les faire disparaître, conscients de leur importance pour maintenir Paris comme ville connectée à sa province mais également au reste de l’Europe. Nous vous proposons de les gommer, de les saisir comme opportunité : l’opportunité de libérer du foncier, de définir de nouveaux espaces, de faire à nouveau respirer la ville. Si notre projet ne peut prétendre à l’exhaustivité, nous avons pris le parti de nous focaliser sur une des entailles à Paris : la gare du Nord et son réseau ferroviaire. Le recentrage sur une zone particulière va nous permettre d’apporter une dimension financière à notre projet, qui se propose ainsi d’évaluer une partie de la charge foncière. Si nous observons de plus près la gare du Nord et son réseau ferroviaire, que voyons nous ? Les voies ferrées viennent fractionner le 18ème arrondissement, le scindent en deux au cœur du quartier de la Goutte d’or, un des derniers quartiers populaires parisiens. Cette fracture s’étend de la gare du Nord jusqu’à la porte de la Chapelle. L’idée serait de refermer cette plaie et de recréer une unité au sein de cet arrondissement. L’objectif serait double : libérer du foncier mais également revitaliser ce quartier existant dont la réputation et la sécurité peuvent être remis en cause. En créant de nouveaux flux, de nouvelles dynamiques, une telle entreprise pourrait modifier durablement le fonctionnement du quartier et bouleverser la vie des habitants. Ce projet est d’autant plus intéressant qu’il serait réalisé en parallèle de la rénovation de la gare du Nord, entreprise par la SNCF et la mairie de Paris. Le projet, conçu sous l’égide de Jean-Michel Wilmotte, va profondé-

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ment modifier le visage de la gare du Nord trop souvent critiquée pour la faiblesse de son accueil et de ses services. Le réaménagement décrit par Jean-François Patte, Architecte Directeur de Projets au sein de Wilmotte & Associés1 sera mené en deux temps. Il comprend une restructuration fonctionnelle de la gare avec une nouvelle organisation du pôle multimodal et un juste dimensionnement des espaces de circulation (piéton, vélo, taxi, dépose minute).

© Wilmotte & Associés

Il constitue un projet urbain qui réinstalle la gare dans la ville et qui devient un véritable « hub urbain » pour créer une transition entre les différentes parcelles de la ville. Ce programme arrive à point nommé puisqu’il esquisse les traits d’une revalorisation de la zone qui, à terme, sera un nouveau lieu de vie et de loisir pour les Parisiens et les curieux venus admirer l’ampleur de la mise au goût du jour. Actuellement, seulement cinq rues traversent les voies. Et comme une lourde opération ne se fait pas sans points de suture, nous créerons 1

Entretien en annexe

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d’avantage de liaisons de part et d’autre de ces voies : des liaisons routières, des liaisons piétonnes ou des pistes cyclables. Ces liaisons permettront une meilleure connexion entre anciens et nouveaux quartiers. Notre projet vise également à donner au quartier de la gare du Nord une vraie identité architecturale tout en affirmant la présence d’une gare parisienne. Il met aussi en valeur un programme immobilier qui répond aux besoins de Paris notamment en termes d’architecture, d’urbanisme, et d’innovation. Il répondra aux grandes orientations d’aménagement d’un quartier de gare à travers le développement de nouveaux programmes de bureaux, de logements, d’écoles ou encore de commerces avec le nouveau quartier de la gare du Nord. Les futurs moteurs de l’Union Européenne sont les pays du Nord. La gare du Nord est la première gare européenne et la troisième mondiale. Elle permet de relier Paris à la Grande-Bretagne, à la Belgique, aux PaysBas et à l’Allemagne grâce aux trains à grande vitesse. En terme de position pour les entreprises qui veulent être au coeur de l’Europe, la gare du Nord est et sera d’autant plus “the place to be”. Une rénovation de cette gare permettra un développement du quartier à l’image de son homologue anglais, la gare de Saint-Pancras, permettant de faire du quartier une force pour le Grand Paris ! Renversons la tendance, et si le recouvrement des voies ferrées permettrait de réconcilier les Parisiens avec les réseaux ferroviaires ? Les biens immobiliers à proximité immédiate ne souffriraient plus d’une décote due aux nuisances et au paysage disgracieux que peut engendrer une vue sur les voies. Et si vivre sur les voies ferrées devenait la tendance de demain ? Faisons du quartier de la gare du Nord le quartier de 2035 ! Ouvrons les champs du possible et permettons que ce projet puisse servir d’exemple pour être répliqué aux autres fractures de Paris ou de toute autre ville cherchant des solutions pour densifier plus encore.

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II. RECONSTITUONS UNE UNITÉ AU COEUR DE LA CAPITALE

a.

40 hectares de voies à verdir Alors qu’il scrutait autour de lui, comme pour chercher à mieux nous décrire les contours de sa vision, A. s’arrêta brusquement. Nous restâmes suspendus à ses lèvres avant qu’il reprenne : “Tout était retourné. Les murs étaient verts, verts de plantation.” Et si la zone en question et ses fondements lui revinrent sans difficulté, A. restât troublé par cette agriculture florissante à portée de main, tout au long de son récit. Délimitation d’une zone de plus de 40ha. Nous vous invitons à découvrir avec nous une étendue de plus de 40 hectares, de 2.1 km de long pour une largeur variable de 70 m à 350 m. Une zone que vous n’avez connue que depuis la fenêtre de votre train en transit pour Paris depuis l’Ile-de-France ou depuis les quatre coins de l’Europe. Cette zone en question prend forme depuis la gare du Nord jusqu’au boulevard périphérique : elle sera transfigurée par un recouvrement ambitieux. Bien que le métro aérien au dessus des voies du boulevard de la Chapelle rende cette approche plus complexe, il est crucial de privilégier la continuité avec la gare du Nord. Côté Nord, le périphérique surplombant les voies délimite naturellement la frontière de recouvrement. La moitié de cette zone sera effectivement recouverte d’une dalle béton pouvant accueillir des immeubles, le reste de la zone étant dédié à des espaces verts. 13

Approche végétale Afin d’envisager les solutions plutôt que de nous contenter du simple constat de l’existant, nous nous sommes intéressés à l’un des points essentiels pour redorer l’image d’une ville : ses espaces verts. Le PLU fait état d’un déficit de végétation au sud-ouest des deux gares, et d’un manque de parcs de grande ampleur (cf. parcs de plus de 5 000 m² en annexe) dans le secteur Nord de Paris en général. Dans sa globalité, Paris est en déficit d’espaces verts comparé à sa densité. Paris intra-muros a un ratio de 5,8 m² par habitant (14,5 m² en comptant les bois de Vincennes et Boulogne). A titre de comparaison, Amsterdam a un ratio de 36 m² par habitant, comparé à 45 m² pour Londres, et 321 m² pour Rome. Le manque d’espace est la raison majeure de ce constat. La libération d’une parcelle si importante au coeur de la ville permettrait de remédier en premier lieu à cette problématique. La plus-value paysagère serait indéniable et faciliterait l’acceptation d’un projet de cette ampleur par les riverains. L’implantation d’espaces verts permet également de désépaissir la dalle sur les zones les plus problématiques, puisque le poids supporté est bien moindre que pour celui d’un immeuble. Intégration de la différence de niveau par agriculture verticale L’altimétrie du site est une véritable aubaine, un cadeau du passé pour réécrire le futur. Car la vision, le chamboulement, le rêve n’auraient plus lieu d’être sans une once de 6 m de hauteur libre sous les voies, un prérequis validé grâce à la configuration des berges. L’une des particularités du site est l’écart de niveau entre le côté ouest en amont et le côté est. Au-delà des différences d’altimétrie au sein même de la zone, pour lesquelles nous vous réservons encore quelques surprises, cette configuration de la zone est une chance pour profiter des voies, et l’écart de niveau en est une autre. Pour résoudre cette problématique, nous proposons l’installation d’une palissade où l’agriculture verticale serait mise en valeur. Au-delà de la production alimentaire, l’aspect visuel serait sans équivoque à la vision de voies de chemins de fer. La plupart des façades avec vue sur les voies étant aveugles, une surélévation du sol par rapport à l’une des berges serait extrêmement positive pour introduire une continuité architecturale. 14

La demande mondiale en 2050, avec 3 milliards d’habitants supplémentaires, sera telle que l’agriculture traditionnelle ne pourra la satisfaire, 80% des surfaces arables de la Terre étant déjà exploitées. Afin d’anticiper ces échéances, nous proposons d’intégrer l’agriculture verticale de manière raisonnée.

© Agence Spark

Pour intégrer au mieux le végétal dans notre projet ambitieux, nous nous sommes rapprochés du cabinet Topager, qui nous a confortés dans notre entreprise et conseillés dans nos choix. Avec une longueur de 2 km et une hauteur moyenne de 2 m (pouvant aller jusqu’à 4 m), ce sont près de 4000 m² de végétaux qui étendront leurs ramifications en toute liberté. Au vu de la hauteur et de l’exposition côté Est, nous privilégierons des plantations légères, des plantes maraîchères friandes de zones partiellement ombragées : une variété de kiwis et des aromates tels que le basilic et le persil. Nous utiliserons un mur WOW (Wild on Wall), projet développé par Topager qui associe des panneaux en terre cuite ajourés, associés à des substrats en face arrière. Ce système est particulièrement économe en volume avec 12 cm d’épaisseur. 15

© Topager

L’avantage est double puisqu’avec des substrats minéraux comme le pouzzolane - qui est une roche volcanique - il est possible d’utiliser le compost des activités de restauration de la zone : les restaurants étant désormais obligés de traiter eux-mêmes leurs déchets organiques, ce point est un vrai plus dans leur approche environnementale. Nos toitures accueilleront également en intégralité des jardinières afin de conserver l’aspect végétal de la zone : nous souhaitons faire de notre projet un exemple d’agriculture tant verticale que sur les toits. La continuité avec l’existant est une des clés d’un projet réussi. Pour accéder à la dalle et à tout ce qui s’y rapporte, des escaliers auditoriums seront installés entre les murs agricoles. Mais pardonnez notre goût du suspense, nous y reviendrons plus après. Nous vous invitons simplement à vous figurer ce décor peu commun avant d’approfondir ses fondements. 16

b.

Recouvrement et suspension Quelque peu perplexe mais tout du moins curieux, nous interrogeâmes A. pour comprendre un peu mieux sa vision. Un recouvrement sur une telle surface n’est pas une mince affaire. Les contraintes, aussi nombreuses puissentelles être, doivent être connues, délimitées, analysées pour être parfaitement maîtrisées. La libération d’un tel espace doit être pensée avec soin et le discours que A. tint nous apporta quelques réponses. Phasage et intégration du recouvrement L’un des enjeux majeurs de ce projet de recouvrement concerne les contraintes techniques, qui présentent un double défi structurel. Le franchissement du réseau ferroviaire de la gare du Nord ne doit pas perturber son trafic, dont la fréquentation tant régionale qu’internationale est très intense. Par ailleurs, la construction de bâtiments et d’espaces publics ne touchant pas le sol nécessite un transfert des charges vers des appuis ponctuels. Afin de répondre au défi structurel de franchissement des voies, un nouveau schéma directeur ferroviaire doit être établi en amont par la SNCF. De quoi s’agit-il ? Il est question de réaménager les voies ferroviaires afin de libérer de l’espace sous la dalle pour ses éléments porteurs. Le projet urbain envisagé doit donc être en cohérence avec ce schéma ferroviaire. La création des appuis sera effectuée suivant un phasage bien déterminé afin de minimiser l’impact sur le trafic ferroviaire. Jean-François Gueullette1, Directeur Général de la SEMAPA, s’est entretenu avec nous tant sur les points de vigilance du phasage, que sur l’aspect technique du recouvrement des voies ferrées de la gare d’Austerlitz. La plage horaire d’interruption du trafic est seulement de 2h30 par nuit, et cela 4 nuits par semaine. Les contraintes imposées par la SNCF ont par conséquent un impact majeur sur la durée du projet. L’objectif serait de maintenir en flux continu le trafic, les travaux ne devront pas perturber le trafic normal des trains franciliens ni celui des lignes de l’Eurostar ou du Thalys. Solution technique : dalle et bâtiment pont Comme nous l’évoquions plus haut, notre projet ambitieux présente des contraintes structurelles parmi lesquelles l’altimétrie entre les chemins de fer et les berges, afin de respecter 6 m de hauteur libre pour les voies. 1

Entretien en annexe

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Le franchissement de distances allant de 70 m à 350 m rend le recouvrement de certaines zones complexe. Afin de répondre à ces contraintes, nous avons envisagé deux types de structures selon la différence de nivellement, la hauteur libre disponible et la portée : un recouvrement sur dalle avec appui et la réalisation d’immeubles ponts, incluant leurs propres structures porteuses. Cette démarche présente l’avantage de pouvoir être dupliquée sur une longueur infinie et sur des sites similaires. Concernant le phasage des travaux pour la réalisation des appuis, Francesca Angileri1, Cellule Projets Clés en Main Eiffage Construction, nous a confirmé la faisabilité technique des grandes hypothèses du projet. Le principe consiste à réaliser de façon concomitante un appui de rive et un appui intermédiaire pour permettre d’optimiser le planning des travaux tout en limitant les impacts sur la circulation. Le nombre de voies de circulation serait de cette façon maintenu en permanence. Pouvons-nous cependant imaginer une solution technique d’ici 2035 qui nous permettrait d’effectuer les travaux sans aucune perturbation des voies ? Cet objectif paraît complexe, certes, mais le concept d’immeubles ponts ou même, dans nos rêves les plus fous, de bâtiments suspendus, répond à cette exigence car ceux-ci enjamberaient le faisceau ferroviaire de la gare du Nord sans point d’appui intermédiaire. Nous avons réfléchi à cette structure innovante dans la conception du bâtiment pont. Et s’il était possible de créer des bâtiments suspendus ? La création d’un tel ouvrage nécessiterait l’intégration à la structure de “bâtiments porteurs” situés de part et d’autre de l’élément en suspension. Nous pourrions ainsi suspendre des bâtiments légers sur un étage. Un projet de piscine suspendue par le promoteur Ballymore est à l’étude à Londres. Nous imaginons demain relier les toits avec des concepts ponctuels de bâtiments suspendus et de jardins suspendus. 1

Entretien en annexe

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Les charges se retrouveraient ainsi concentrées sur les supports verticaux. La concentration de ces charges serait ainsi le lieu d’enjeux techniques importants. Afin de permettre à ce type d’ouvrage de voir le jour, nous pourrions privilégier une structure légère en bois, dont les qualités seront développées par la suite. La solution d’alterner des bâtiments supportés par une dalle épaisse et des bâtiments ponts nous semble pertinente et répond aussi particulièrement bien à la problématique de variation de l’altimétrie. Le choix entre ces structures est donné par les contraintes techniques. Afin de statuer sur les solutions techniques, nous avons effectué deux hypothèses. Première hypothèse : lorsque l’aménagement des voies le permettra, nous orienterons notre choix vers une dalle épaisse, car le système sera moins coûteux et moins complexe techniquement à réaliser. Surtout, une telle structure nous donnera plus de souplesse, car nous pourrons implanter comme nous le souhaiterons le bâtiment en superstructure.

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Deuxième hypothèse : en cas de faible portée nous choisirons le système de bâtiment pont. Une fois construit, le pont assurera une mise en sécurité totale des voies parallèlement au déroulement du chantier et offrira une zone de travail sécurisée pour la construction du bâtiment.

Afin de montrer l’efficacité de notre méthodologie, nous avons étudié une proposition concrète basée sur des hypothèses que nous avons considérées cohérentes. Nous avons mesuré les différences d’altimétrie, de nivellement et la portée afin de localiser les zones en dalle épaisse et les zones en bâtiment pont. En tenant compte de nos hypothèses, nous avons choisi d’intégrer deux bâtiments ponts, en raison de la largeur iinférieure à 80 m, ne laissant que peu d’espace pour la construction d’appuis intermédiaires. Le schéma ci-contre montre la localisation des zones en dalle épaisse et des zones en bâtiment pont.

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La conception architecturale est intimement liée à la structure. Il faut donc concevoir le programme immobilier et son architecture, en amont, afin d’appréhender au mieux l’épaisseur de la dalle béton et du bâtiment pont. La portée va également être un élément structurant de l’épaisseur de notre dalle. La création d’espaces verts aux endroits où l’on dispose de peu de hauteur libre est une alternative car ces espaces sont relativement légers. 21

c.

Esquisse financière Après avoir mis de l’ordre dans ce qui nous apparut de prime abord comme une affabulation, nous commençâmes à questionner A. sur la faisabilité financière d’une telle opération, à la recherche de la clé du mystère. Que construire sur cette étendue de foncier ? Comment approcher le prix de construction de la dalle ? A quel prix valoriser la charge foncière ? Afin de conserver une continuité, les bâtiments édifiés auront une hauteur inférieure à 37 m conformément au PLU sur la majorité de la zone. Ainsi, nos bâtiments s’élèveront au maximum sur 7 niveaux. Le 18ème arrondissement est peu tertiaire avec une surface de bureau de 350 000 m², soit une densité de 580 m²/ha contre une moyenne de 1 870 m²/ha pour l’ensemble de Paris1. Afin de conserver une mixité des usages, nous intégrerons un centre d’affaires à proximité immédiate de la gare du Nord, les logements se trouvant en amont. Pour valider la faisabilité de notre projet, nous avons réalisé deux approches, qui seront amenées à collaborer : un bilan aménageur et un bilan promoteur. L’aménageur vendra au promoteur la dalle construite ainsi que les volumes la surplombant. L’aide précieuse de Jean-François Gueullette nous a permis d’estimer un ordre de grandeur de construction de la dalle. Avec un coût de construction estimé à 5 000 €/m² au sol, l’aménageur revendra l’ensemble dalle/volumes à 2 000 €/m² de surface de plancher au promoteur, avec comme objectif d’obtenir un bilan équilibré. Le bilan étant ici positif, cette première étape est validée comme l’attestent les résultats ci-dessous :

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Source ORIE - 2012

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L’objectif de notre programme lors de la définition du bilan promoteur est qu’il réponde à une demande de logement toujours plus grande et qu’il soit accessible aux Parisiens. En partant de ce constat de prix de la charge foncière, nous avons fixé comme impondérables des loyers accessibles aujourd’hui, avec une indexation faible de 0,5 %/an. Les logements libres seront vendus à 8 300 €/m² après indexation et les logements sociaux à 3 900 €/m². Le projet doit être une invitation aux riverains à prendre part aux évolutions qui affecteront leur quartier. Ils ont une bonne connaissance de l’environnement et savent exactement les commerces de proximité et les équipements publics dont ils ont besoin. Cette initiative de concertation participative aura l’avantage de limiter toute procédure lourde venant entraver le planning du projet. Notre programme fait la part belle au résidentiel avec 25% de surface de plancher de logement libre, et 25% de logement social. 40% concernent le bureau, 5% les universités et 5% les espaces publics, tandis que tous les RDC sont occupés par des commerces. Le tout en visant une marge supérieure à 15% pour que les promoteurs puissent s’engager sur une opération d’une telle ampleur : objectif atteint avec une marge de 18,9%. En effet, la zone étudiée est titanesque avec 1 500 000 m² de SDP. Le bilan simplifié présenté ci-dessous1 fait état d’un prix de vente de 9,95 milliards d’euros qui devrait attiser la convoitise des promoteurs pour nous accompagner dans ce projet pharaonique.

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Bilan promoteur détaillé en annexe

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III. ET SI NOUS DÉBRIDIONS NOTRE CONCEPTION DU MOT BÂTIR ?

Quand vint l’heure d’entrer au coeur des bâtiments, le débit de A. s’accéléra et avec lui nous nous projetâmes dans cette vision qui se précisait. L’essence même du projet réside dans la diversité des usages que le quartier proposera. Cette diversité a été au cœur du processus de conception et a constitué le préambule de la réflexion menée par l’équipe. A cette diversité d’usage répondent une série de diversités, sociales, générationnelles, temporelles, fonctionnelles, modales, paysagères qui animent et font vivre ce nouveau quartier, jour et nuit. La répartition des fonctions est effectuée de manière attentive, en prenant en compte les perceptions que pourraient avoir les gens des différents espaces. Les bâtiments sont conçus pour être flexibles, transformables, et facilement réhabilitables. La structure de franchissement des voies est également adaptée à la superstructure des bâtiments, permettant un redéploiement des masses du projet, sans remettre en cause la dalle de couverture des voies.

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a.

Innovation autour des matériaux Le bois c’est du béton Alors que l’utilisation du bois est bien connue pour son esthétique en façades, une structure bois est beaucoup plus rare. Et alors que les premiers projets voient le jour, nous parions sur l’avènement de ce matériau. L’optimisation de la dalle s’est accompagnée d’un choix constructif privilégiant la structure bois. L’essentiel des structures des bâtiments du quartier est ainsi prévue en matériau bois, qui présente des qualités particulières, tant d’un point de vue constructif que pour l’impact qu’il représente sur l’environnement.

Le volume de bois fini qui sera mis en œuvre dans la structure d’un futur immeuble représente environ 20 minutes de la croissance de la forêt française, soit l’équivalent de 3 500 m3, ce qui permettra de stocker environ 3 500 tonnes de CO2. La croissance de la forêt française, d’environ 10 000 m3/h, assure un renouvellement suffisant pour répondre à ce type de demande. Le bois est un matériau sain, renouvelable et écologique. Il a un coût énergétique associé à l’ensemble de son cycle de vie, inférieur à celui de tous les autres matériaux de construction : - à 2 fois celui du béton, - à 5 fois celui ciment, - à 70 fois celui du PVC, et - à 130 fois celui de l’acier. Ceci est vérifié en prenant en compte l’exploitation, la transformation, la fabrication, le transport, la mise en œuvre, les performances à l’usage, la destruction et le recyclage. La recherche de bâtiments encore moins consommateurs en énergie sera cruciale dans les années à venir. La consommation de CO2 lors de la construction / démolition est également un facteur à prendre en compte. Construire en bois, c’est respecter son environnement tout au long du cycle de vie de l’immeuble, point essentiel en 2035 !

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Pour des structures de grande envergure tels que les futurs bâtiments construits sur dalle, le bois représente une solution très performante d’un point de vue mécanique, grâce à la mise en œuvre d’éléments en bois lamellé-collé à haute résistance. Pour des caractéristiques porteuses égales, une poutre de 3 m de portée capable de supporter 20 tonnes pèse :

La particularité qu’offre le bois de pouvoir être préfabriqué en atelier s’adapte parfaitement à la mise en œuvre de bâtiments de grande hauteur. L’optimisation de cette préfabrication permettra un gain de temps sensible sur chantier, réduisant de ce fait les nuisances pour l’environnement local (nombre de camions, grues, quantité d’eau, pollution sonore), ce qui n’est pas négligeable dans Paris intra-muros et donc pour notre opération. A ce jour, les bâtiments en structures bois ne sont pas légion. Cependant, au vu de leurs nombreux avantages et notamment celui de la diminution des déchets et du temps de montage, nous pouvons leur garantir un avenir radieux. Le gain de poids peut nous permettre de dimensionner une dalle moins épaisse, réduisant ainsi son coût. Ce type de structure est donc particulièrement adapté à notre projet. Les bâtiments en bois seront donc ceux de 2035.

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Dalle avec couche absorbante de CO2 Les “dalles béton” ont souvent été décrites comme “anti-écologiques” et non respectueuses de l’environnement, nous nous devons d’en prendre le contre-pied ! Le but étant de rendre la dalle la plus écologique possible, celle-ci sera recouverte d’une couche absorbante de CO2. Des molécules de calcaire ont été incorporées dans le béton absorbant. Lorsque celles-ci entrent en contact avec les polluants (car les gaz d’échappement qui sortent des voitures ont tendance à retomber sur le sol), elles oxydent ces derniers. Il se produit une réaction chimique qui transforme les polluants en sel. Ce béton est capable de s’attaquer aux particules fines et au dioxyde d’azote, qui sont aujourd’hui les polluants les plus dangereux pour la santé. La pollution de l’air située à moins d’1,50 m du sol est réduite de 80%.

Ce système est légèrement plus cher que le bitume classique. Il ne va pas résoudre la question de la pollution partout en France - il faudrait pour cela recouvrir des milliers de kilomètres de trottoirs - mais dans certaines zones, où passent souvent les piétons, les personnes sensibles devant les écoles, il est possible d’améliorer indéniablement la qualité de l’air. Autre avantage de ces dalles de béton : elles sont autonettoyantes. Elles dégradent en effet tout élément organique : une tache d’huile de vidange ou de gazole disparaît toute seule en trois mois.

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Quartier intergérationnel et multifonctionel A. prit un stylo, une feuille et s’installa à une table. Ses idées devinrent plus claires et ses mains esquissèrent les premiers traits d’un schéma. En visualisant la gare du Nord, nous comprîmes que c’était la parcelle derrière celle-ci qu’il dessinait. En complétant son schéma il nous expliqua ses pensées. La création d’un nouveau quartier, tel que celui imaginé derrière la gare du Nord, ne peut être un succès que si l’identité des lieux, le sens induit par les enchaînements des espaces et des fonctions sont facilement appropriables par le public, les usagers, les passants. L’Epine Dorsale : une galerie fonctionnelle

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Nous proposons de créer des liaisons visuelles, fonctionnelles, et typologiques entre les différents éléments qui la composent de manière à faciliter cette appropriation.

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© R. Fischler

Pour cela, les bâtiments conçus derrière la gare du Nord jusqu’à la ligne 2 du métro ont besoin d’une épine dorsale, qui structure le site et lui donne une cohérence. Cette épine dorsale abritera « la galerie ».

L’Epine Dorsale La principale approche du site se fait par le coin sud-ouest en liaison directe avec l’intérieur de la gare du Nord. Les résidents, salariés, entrepreneurs, visiteurs et touristes se réunissant ou se rendant dans les bâtiments limitrophes transiteront donc du sud-ouest vers le nord-est (par la station de métro La Chapelle), soit le long d’un axe structurant pour le projet. Cet axe est repris dans le projet sous la forme d’une Galerie spectaculaire des temps modernes, célébrant l’innovation et le partage, deux thèmes majeurs de Paris.

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Le Logement Le “partage” est aujourd’hui omniprésent. En effet, nous partageons les transports (avec le covoiturage), les espaces de travail (avec le freelance), les logements (avec la location de son propre appartement). Qui pouvait imaginer il y a 20 ans partager son trajet, son poste de travail ou son appartement avec une personne inconnue ? L’aire du partage est en marche entre les différentes générations et l’immobilier en sera l’une des clés. A l’aube du 21ème siècle et des milliers de centenaires encore à venir, le vieillissement de la population doit être vécu comme une opportunité et non comme une difficulté. Pour pallier la solitude et la difficulté de vieillir en marge d’une société en perpétuelle évolution technologique, faire cohabiter des seniors avec une population étudiante connectée à son époque, hétéroclite et dynamique mais souvent déracinée, peut faire de Paris un modèle de ville solidaire. Les bâtiments de logement, incorporant des fonctions naturellement complémentaires ou des espaces «tampon» de partage et de rencontre, seront des acteurs essentiels de ce principe. Le bureau Enfin, les bureaux, articulés autour des espaces créatifs de la Galerie, permettent également d’organiser de la mixité professionnelle entre, par exemple, des entreprises d’un même secteur, mais de taille très différente. Les bureaux sont conçus pour être partie intégrante du Plan d’Ensemble, et contribuer à l’animation de celui-ci. Leur conception intégrée autour de la Galerie et des espaces de coworking permet d’envisager des associations novatrices entre entreprises d’échelles très différentes. Le monde des nouvelles technologies est très friand de ces associations entre grandes entreprises de technologie et start-up. L’environnement créé par ce futur quartier est le support idéal de telles associations.

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Hybridité urbaine Alors que prenait forme cet immobilier de 2035, nous comprimes que A. voyait déjà plus loin. Qui saurait dire quel sera le devenir de notre immobilier dans 50 ans ? Et dans 100 ans ? Lorsque l’on envisage l’immobilier à horizon 20 ans, l’ambition est qu’il réponde aux besoins des générations suivantes et plus encore. Une liberté particulière surgit de la définition d’une nouvelle zone, d’un nouveau quartier. Pour y répondre, un concours d’architecte sera organisé afin de faire de la créativité le maître mot de ce projet. Voici quelques pistes pour fixer les règles de l’abstrait. Commerces en boîte Nous imaginons, demain et au-delà, que le commerce devra s’adapter toujours plus vite à son client. Que la signature de baux 3/6/9 ne sera qu’un songe du passé dans les zones les plus attractives. En ce sens, les commerces devront du jour au lendemain intervertir leur localisation pour mieux répondre aux attentes. Suivant ce constat, nous assimilerons nos commerces en RDC à des “boîtes modulables”, comme des Lego à imbriquer selon son bon vouloir. Avec des tailles variées et référencées, ces structures pourront évoluer avec réactivité pour changer de zone sans période de vacance, si le taux d’effort supporté dépasse les limites d’une marque. Bureaux transformables Et si donner des jours de congés à tous les salariés rapportait plus à une entreprise ? Que diriez vous si votre directeur vous chassait du bureau à 18h pour ouvrir l’after-work ? La frontière entre travail et loisir a tendance à s’évanouir. Si l’on connaît, sans nul doute, l’impératif mail de dernière minute qui vient empiéter sur son temps libre, le franchissement peut s’effectuer à l’inverse, au sein même du lieu dédié. Les bureaux ont des formes et des organisations, qui ressemblent parfois à s’y méprendre à des espaces de détente. Alors pour ériger comme modèle le bon vivre, pourquoi ne pas imaginer une entreprise qui se transforme en bar, en médiathèque, ou toute autre activité rendue possible par des outils de travail transportables à souhait. L’utilisation d’un lieu en continu et sa modularité au sein d’une même journée est un des points clés des bâtiments de demain. 35

Airbnb San Francisco Malgré ce double emploi, un immeuble se doit d’avoir un usage principal. La trame des structures porteuses doit impérativement permettre une transformation à terme, de bureau en logement, ou quelque autre changement de destination. La recherche d’une trame hybride universelle compatible avec les espaces de bureaux et les espaces de logements a guidé notre réflexion. Les bureaux sont généralement organisés sur une trame de façade de 90 cm permettant facilement d’intégrer des ouvrants de même dimension, avec des bureaux de 2,7 m correspondant à trois trames. Les appartements développés seront tramés sur des largeurs de 3,6 m, soit quatre trames de 90 cm en façade. Une trame porteuse de 3,6 m correspond ainsi à la trame des appartements dans les étages supérieurs. Dans le sens de la hauteur, nous avons opté pour un pas d’étage de 3,4 m permettant de dégager une hauteur libre de 3 m pour une profondeur de 7 m en façade. 36

Escaliers auditoriums Les escaliers sont associés au mouvement, à la communication entre des étages, à l’intérieur d’un bâtiment, il lie des entreprises distinctes des voisins inconnus. Mais cette fonction peut être détournée pour être associée, une fois n’est pas coutume, à l’immobilité et à la rencontre. Qu’il soit à ciel ouvert ou abrité, l’escalier peut s’étendre sur plusieurs étages et se transformer en auditorium. Il devient pièce maîtresse et gain d’espace en plus d’assurer sa fonction première. Et l’escalier devient salle de cinéma en plein air au bon vouloir de son utilisateur. A ciel ouvert, il permettra de se transformer en lieu de partage puisqu’il sera assorti de terrasses. Situé à l’intérieur d’un immeuble, il permet de reconnecter les habitants, qui profiteront de ces espaces communs dédiés.

Escalier de l’entreprise Wieden + Kennedy Nous souhaitons faire la part belle à ces escaliers, qui seront utilisés à la fois pour accéder à notre dalle depuis la “rive est” mais également à l’intérieur de nos bâtiments. 37

Téléphériques citadins Medellin en Colombie, Caracas au Venezuela... Paris ? Et si, comme nos confrères Sud-Américains, nous faisions le choix du téléphérique pour le transport de masse ? La France fut l’une des instigatrices avec sa télécabine à Grenoble pour relier le centre-ville à un fort militaire sur les contreforts de la Chartreuse, à 476 m d’altitude. 100 ans après, c’est pour un tout autre usage que nous prévoyons de gravir des montagnes : le milieu urbain. Le téléphérique circule à une vitesse à de 21,5 km/h (soit proche des vitesses moyennes de la ligne 4 à 21 km/h jusqu’à la ligne 14 à 39 km/h). Propre - puisqu’il n’émet pas de CO2 - et silencieux, peu coûteux : le téléphérique est le moyen de transport urbain de demain. Et les projets qui fleurissent en France - notamment à Brest - lui promettent un avenir radieux. Au sein même de notre zone, il permettra de relier des zones aux altimétries variées (du fait des bâtiments suspendus). Mais, c’est là une utilisation minime par rapport à notre ambition globale de relier toutes les gares par téléphériques, dans une rocade des téléphériques, unique dans le monde. Nous vous mettons au défi de rencontrer un francilien qui préférera le métro aux hauteurs. Car de là-haut, nos sources nous indiquent que la vue est exceptionnelle.

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Conclusion Les mutations profondes sur une plage de temps si longue, et à l’échelle d’un pays, offrent un panel de problématiques quasi infinies. Notre voyage dans cette étude nous a mené vers des questionnements démographiques, structurels, techniques, urbanistiques, stratégiques et philosophiques. La réponse donnée, en se focalisant sur un programme, permet d’esquisser les grandes orientations d’une opération de promotion et d’y définir l’immobilier de demain. La vision abstraite esquissée en premier lieu s’est alors transformée en un immeuble bien ancré sur sa dalle, ou suspendu par les fils de notre imagination, matérialisés par une structure porteuse des plus concrètes. La France de 2035 est celle de l’innovation, du partage tant sur les lieux de vie que de travail. La France de 2035 est intergénérationnelle, connectée et ambitieuse. La France de 2035 s’ouvre au Monde tout en se recentrant sur son histoire et ses citoyens. Elle sait se réinventer pour regagner du foncier qu’elle croyait perdu à jamais. Et si la première réponse donnée s’intéresse aux voies ferrées, d’autres pistes sont à explorer. L’exemple est plus frappant en son centre névralgique, Paris, mais bientôt d’autres villes pourront emprunter ce chemin tracé comme un faisceau d’évidences. Car si le bilan financier fait état d’une dalle trop coûteuse pour des villes intermédiaires, l’engagement du pays pour revaloriser son foncier peut permettre une prolifération de la méthode. L’immobilier à horizon vingt ans - et plus - est plus écologique que jamais avec sa structure bois. Il est dépolluant et absorbe le CO2 résiduel de sa zone d’action. La révolution a lieu autour des matériaux tout autant que dans son organisation interne. La trame du bâtiment accueille du bureau un jour pour se transformer en logement le lendemain. La modularité est son point fort, car malgré la force des arguments visant à un usage, le futur reste une inconnue avec laquelle il faut composer. “Le passé ne peut renaître” - Alain Fournier Nous sommes à l’aube d’une renaissance multiple, la France est prête à relever un défi d’ampleur autour de sa pierre. 39

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Remerciements Nous souhaitons en premier lieu signifier toute notre reconnaissance à Patrick Bosque, Directeur Général Adjoint de Hines France, qui, en sa qualité de professeur à l’Université de Dauphine et tuteur de ce concours, nous a pleinement soutenus dans notre oeuvre. Son expertise de la promotion immobilière et sa propension à nous guider dans les moments de doute ont été essentiels à l’avancée de notre projet. Nous remercions Denis Burckel, Directeur du Master 246, pour nous avoir accompagnés pendant notre formation et pour nous avoir accordé sa confiance pour représenter le Master lors de ce test grandeur nature. Nous adressons nos sincères remerciements à Benoît du Passage, Président Directeur Général France et Europe du Sud de JLL France, Virginie Houzé, Directeur Etudes et Recherche de JLL France et Marie Gilmas, Responsable des projets en développement, Departement Investissement de JLL, qui nous ont inspirés sur le thème du sujet, et qui nous ont inculqués l’approche client. Merci à Jean-François Gueullette, Directeur Général de la SEMAPA, pour nous avoir accordé une longue plage de leur temps précieux, afin de décrire les aspects structurels du recouvrement de voies ferrées, ainsi que les enjeux majeurs d’une telle opération. Un grand merci à Jean-Michel Wilmotte, fondateur de Wilmotte & Associés et Jean-François Patte, Architecte Directeur de Projets, pour nous avoir décrit leur programme de restructuration de la gare du Nord, afin d’esquisser les traits d’une cohabitation. Merci également à Francesca Angileri, Cellule Projets Clés en Main Eiffage Construction et Gilles Malavallon, Directeur de Projets PPP Eiffage Concessions pour leur vision technique et futuriste d’une telle opération. Nous tenons à remercier Nicolas Bel, co-fondateur de Topager qui nous a accompagnés dans notre approche végétale, en nous prodiguant ses conseils sur l’agriculture verticale. Nos remerciements vont ensuite à Sebastien Bidault et Alice Lebrat, architectes freelance, ainsi qu’à Corentin Vercoustre, graphiste freelance, qui nous ont offert leurs talents afin de mettre en scène nos idées. Enfin, merci à Laetitia George, Responsable de l’Asset Management Tertiaire chez Groupama Immobilier et Sven Jacobs, Directeur Technique et des Grands Projets chez Groupama Immobilier, qui par leur expérience du montage d’une opération nous ont permis de réaliser un Bilan Promoteur fiable. 41

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Bibliographie

Gare du Nord 2015-2023, Transformations, Dossier de presse 24 juin 2015. La ville de demain. Pour quels usages ? Fondation Palladio, 2014. Management de l’Immobilier, D. Burckel, 2014. L’évolution de la population d’ici 2060, Centre d’observation de la société, 2013. Quartier des gares du Nord et de l’Est diagnostic prospectif, APUR, 2012. Atelier international du Grand Paris, Portzamparc, 2009.

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Entretien avec Jean-François Patte Wilmotte & Associés Nous avons rencontré Jean-François Patte, Architecte Directeur de Projets au sein de Wilmotte & Associés. Il pilote notamment les équipes en charge du projet d’aménagement de la halle Freyssinet et de la restructuration de la gare du Nord. Leur but : repenser la gare pour améliorer sa fonctionnalité, et l’adapter aux enjeux du premier hub ferroviaire d’Europe, qui compte plus de 250 millions de voyageurs par an. Quand le conflit entre les barons Haussmann et Rothschild marque l’histoire de la gare Très peu d’investissements ont été consentis sur cette gare et d’importants problèmes fonctionnels résultent de l’espace réduit. Cette configuration est liée historiquement à un conflit personnel entre le baron Haussman et le baron Rothschild, propriétaire des chemins de fer de la gare du Nord. En représailles, Haussmann a resserré la gare au maximum sans créer de parvis. Un statut de leader européen Aujourd’hui avec le développement de l’Europe et celui de la région parisienne, le flux est colossal avec notamment 80% du trafic francilien. La contrainte est également européenne avec un accroissement de l’offre de l’Eurostar et des chemins de fer allemands. Les quais La sécurité représente également un enjeu majeur dans le nouveau mode de fonctionnement des gares. La SNCF envisage d’organiser un contrôle des bagages et des tickets à l’entrée des trains pour améliorer notamment la sécurité. Les gares vont tendre à se rapprocher du modèle aéroport. Pour cette raison, la gare sera divisée en pôles en dissociant un pôle départ, un pôle arrivée, un pôle Eurostar et un pôle francilien afin de hiérarchiser davantage les flux et de gérer des sujets relativement différents entre les usages quotidiens franciliens et les usages internationaux. Concernant le terminal de départ, l’arrivée sur Paris doit se faire par le parvis, avec comme idée de vider le parvis. Le départ se ferait sur un nouveau bâtiment pont d’une trentaine de mètres de large, qui serait un usage ouvert permettant aux riverains de connecter les 2 rives. 43

Les grandes échéances La première phase de travaux devrait être lancée d’ici un an afin d’anticiper les événements majeurs à venir : les JO et l’exposition universelle. L’un des points importants est la connectivité gare de l’Est/gare du Nord. Ces impondérables permettent d’accélérer les procédures et d’avoir un appui de l’Etat sur un tel projet. En 2023, le train CDG express reliera en un seul arrêt soit 20 minutes, Charles de Gaulle à la gare du Nord. Les abords de la gare et son développement Le balcon vert, futur hôtel sur les voies, est un projet actuellement en permis de construire. Un projet appelé Rocade des gares est à l’étude, il consiste à mettre en place un bus à haute fréquentation, reliant toutes les gares sauf Saint Lazare pour connecter les quatre gares parisiennes. L’hôpital Lariboisière va également entamer des gros travaux de rénovation, extension et restructuration, ce qui représente un élément moteur dans le quartier. L’hôpital Fernand du Lac -qui va être vendu par la PHP- est un sujet intéressant car il est situé dans une zone qui va se connecter au boulevard de la Chapelle. Une nouvelle organisation des zones Un bâtiment pont verra le jour. Il aura à la fois une vue côté Nord de Paris et une vue inédite sur l’intérieur de la gare du Nord avec un effet de plongeoir Le bâtiment pont étant superposé au tunnel de Maubeuge, ce dernier a été retravaillé, requalifié afin de créer un accès par les quais, accès existant aujourd’hui mais très peu fréquenté. Ce tunnel connecte directement le RER aux quais de la gare et est accessible par la rue de Maubeuge. Il est donc intéressant de développer cet accès. Aujourd’hui l’Eurostar se retrouve en mezzanine et les escalators sont à l’opposé, créant ainsi une collision entre les voyageurs Eurostar et les voyageurs franciliens. L’idée est de récupérer cette surface et de la remplacer par des boutiques, afin de donner de l’air, que les voyageurs en transit puissent patienter dans une zone plus haut de gamme que la gare courante. A l’étage, un nouveau système sera réalisé en couvrant en partie quelques voies de l’Eurostar, et un nouveau système de contrôle avec des nouveaux portiques de contrôle. L’idée est de couvrir la cour actuelle des taxis pour optimiser cette surface. Ce Masterplan a été validé par la ville de Paris et par la SNCF. Tout ce travail a été validé, priorisé et chiffré dans les mois qui ont suivi. L’Etoile du Nord Le bâtiment, appelé l’Etoile du Nord, était un bâtiment d’origine administrative du baron Rotschild, qui appartenait à la SNCF et a été vendu il y a quelques années à la BNP. Aujourd’hui la SNCF est locataire de la BNP. L’idée est de le récupérer pour en faire un Printemps, un Harrods, ou un hôtel haut de gamme, lié au transmanche de manière à ce que les relations vz européennes puissent avoir un endroit pour recevoir leurs clients dans des salles de réunion et organiser des repas d’affaires. 44

Financement La seule manière pour la SNCF de financer ce projet est d’avoir des commerces car elle n’a pas le droit contractuellement de jouer sur le prix des billets. Les seules sources de profit sont donc les surfaces commerciales qui se vendent bien du fait de l’importance de la demande dans ce quartier parisien. Des études commerciales autour de la gare du Nord, estiment que 70 000 m² de commerces pourraient être construits pour répondre à la demande. Ce site permettrait d’ores et déjà construire 30 000 m² . Le trafic aux abords de la gare La plateforme bus n’est pas en bon état, il faudrait donc reconquérir cet espace près du Faubourg Saint Denis pour trouver deux niveaux de centres commerciaux, qui seraient directement connectés grâce à la rupture de niveau entre la dalle et la plate-forme basse, au niveau du métro et du RER. Grâce à cette connectivité, les gens passeraient directement devant les centres commerciaux en sortant du métro. Un autre sujet à l’étude est l’accessibilité avec un projet de sens unique sur le boulevard de la Chapelle uniquement pour les bus et taxis, ce qui permettrait d’avoir un départ taxi et une arrivée taxi près du hall Eurostar en évitant le boulevard Magenta, souvent très encombré. Entretien réalisé le 3 septembre 2015

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Entretien avec Francesca Angileri Eiffage Construction Nous avons rencontré Francesca Angileri, qui travaille dans la cellule Projets Clés en Main de Eiffage Construction. Madame Angileri a travaillé avec Gilles Malavallon sur la partie technique de la réalisation d’un immeuble pont entre la Porte Maillot et la Porte des Ternes dans la cadre d’une consultation des appels à projets urbains innovants, lancée par la ville de Paris. Nous avons discuté des problématiques associées au recouvrement du périphérique et des voies ferrées. Nous avons retranscrit ci-dessous l’entretien de Francesca Angileri. Dans ce type d’ouvrage, il y a deux possibilités: - Construire un bâtiment pont si on ne peut pas créer d’appuis intermédiaires - Construire une dalle en béton uniforme avec des appuis intermédiaires Phasage La problématique du phasage à mettre en oeuvre pour ne pas bloquer le trafic et les voies, est très importante sur un tel projet. Il s’agit du même raisonnement que l’on soit au-dessus du périphérique ou au dessus de voies ferrées. Sur le site du Pershing, Eiffage avait prévu de rétrécir les voies de circulation de chaque côté et de façon alternée, en construisant 2 appuis à la fois, un appui de rive et un appui intermédiaire afin d’optimiser le planning des travaux tout en limitant les impacts sur la circulation ferroviaire. En réduisant ainsi la largeur des voies de circulation tout en les maintenant en permanence, la circulation dans les deux sens n’est pas interrompue, mais seulement réduite permettant ainsi de réaliser les appuis intermédiaires. La dalle de béton Celle-ci doit être d’une épaisseur maximale de 3 m, elle peut varier suivant les charges associées à la hauteur du bâtiment en superstructure. Suite à des échanges avec l’architecte, le bureau d’étude, les bureaux de structure, les ingénieurs ont réfléchi à une structure innovante, qui fonctionne selon le principe d’une poutre. 46

Fonctionnement d’une poutre Dans une poutre, la fibre inférieure est en traction et la fibre supérieure est en compression. Il est possible de faire des poutres pleines en bois, béton, ou acier. Tous les matériaux sont envisageables car les contraintes à l’intérieur des poutres sont toujours les mêmes. Les poutres treillis réticulaires sont quant à elles développées avec l’idée d’enlever la matière, là où elle n’est pas nécessaire. Une dalle est une poutre qui s’étend sur une plus grande surface, cependant celle-ci travaille comme une poutre, elle fléchit. Pourquoi ne pas se baser sur le même principe pour construire une dalle: enlever la matière inutile (comme une poutre en treillis). La structure pensée (sur l’opération du site Pershing) comporte une dalle inférieure et une dalle supérieure, moins importante en hauteur, reliée par des montants pour garantir une liaison entre les dalles et pour faire travailler la structure de façon unitaire. Ce type de structure nécessite la pose de poteaux de 1.5 m pour une hauteur de 4 m avec une maille de 8 m dans les deux directions. La contrainte de faire une dalle épaisse de 3 m de niveau plain-pied, est réduite grâce à ce type de structure. L’avantage de ces structures est qu’elles sont très souples, et adaptables à différents cas avec la même portée de franchissement et les mêmes charges appliquées en superstructure. Faire des bâtiments ponts, qui travaillent dans leur intégralité. Un bâtiment pont travaille dans toute son intégralité. Pour pouvoir fonctionner, il faut donc que sa structure soit entièrement réalisée. La problématique principale est la phase de réalisation des travaux. Tant que la structure n’est pas complète elle n’est pas capable de porter, il faut donc prévoir des ouvrages en phase de réalisation, pendant les travaux de construction. Les coûts en phase de construction peuvent donc être plus importants que ceux d’une dalle épaisse. Architecture et contraintes techniques Plus la structure a une hauteur importante, plus elle est capable de fonctionner et de supporter des charges importantes. La partie architecturale est totalement liée aux bâtiments en superstructure; l’architecte doit donc travailler de façon intime avec l’ingénieur structure pour proposer une solution architecturale et technique, c’est à dire une structure qui fonctionne et qui est architecturalement adaptée au projet. 47

Bâtiments suspendus par des câbles Nous avons abordé lors de cet entretien, l’idée de développer une autre structure intéressante et qui serait innovante telle que la construction de bâtiments ponts suspendus par des câbles. Cependant, le problème de suspension avec des câbles est qu’il faut faire une structure, qui répande les charge. D’autre part dans ce type de structure, les charges sont très concentrées, il faut donc faire des appuis très profonds. Entretien réalisé le 2 septembre 2015

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Entretien avec Jean-François Gueullette SEMAPA Nous avons souhaité donner la parole à certains acteurs impliqués dans des opérations d’aménagement de gare. La SEMAPA, aménageur de la ville de Paris, a déjà réalisé un projet semblable de recouvrement de voies ferrées, celui de la gare d’Austerlitz. Pour cela, nous avons contacté la SEMAPA et avons eu l’opportunité de rencontrer Monsieur Jean-François Gueullette, Directeur Général de la SEMAPA, accompagné de l’un de ses collaborateurs. Il a accepté de nous recevoir afin de confronter nos idées sur leur projet d’aménagement de la gare d’Austerlitz et notre projet de recouvrement des voies ferrées de la gare du Nord. Cette interview nous a conforté sur la faisabilité de notre projet, qui fait écho à celui de Paris Rive Gauche sur de nombreux points, mais il en a également révélé la complexité à la fois technique et financière. Contraintes imposées par la SNCF Ils ont évoqué les problèmes d’appui à l’intérieur du faisceau ferroviaire et les contraintes dues au resserrement du faisceau ferroviaire dans certaines zones. Les contraintes d’interruption du trafic ferroviaire de la SNCF ont également été citées. En effet, les contraintes imposées par la SNCF ont un impact significatif sur la durée du projet avec une plage horaire d’interruption du trafic ferroviaire de seulement 2h30 par nuit, 4 nuits par semaine. La SNCF définit également un schéma directeur ferroviaire, qui décrit le réaménagement des voies ferrées en dessous de la dalle, afin d’assurer la circulation des trains en fin de service (afin que le train reparte à vide pour être nettoyé etc,…). Dans le cadre des travaux de Paris Rive Gauche ce schéma directeur a été effectué en amont et le réaménagement des voies ferrées en dessous de la dalle a donc été pris en charge par la SNCF. Faisabilité financière Nous avons également évoqué lors de cet interview, les différents coûts dus à la construction de la dalle et le fonctionnement de rachats des volumes au-dessus des voies ferrées, permettant d’obtenir un équilibre financier. 49

D’un point de vue financier la construction est extrêmement onéreuse : - Le coût de la dalle est évalué en moyenne à 5 000€/m². - Le rachat des volumes au-dessus des voies ferrées est évalué à 3 000€/m². Ce à quoi se rajoutent les coûts de construction. On déduit aisément que pour obtenir un bilan équilibré (objectif affiché) les charges foncières vendues aux promoteurs sont élevées. D’autant plus que le programme de logement fait apparaître 50% de logement social (soit 300 000 m²). Contraintes techniques Enfin les contraintes techniques, permettant de conserver une continuité du faisceau et les contraintes dues au normes de sécurité incendie ont également été soulignées. Les contraintes techniques sur une portée de 52 m maximum imposent la pose de poteaux en béton d’1,5 m de diamètre tous les 15 m dans les deux orientations. Certaines parties sont traitées avec des voiles d’1,2 m de large. Afin de conserver un tracé du faisceau, certaines zones utilisent des immeubles ponts (structures de poutres au lieu de la dalle) l’objectif étant de « gommer l’effet dalle ». Les normes de sécurité incendie sont également très contraignantes avec des désenfumages réguliers et des normes proches de tunnels pour la partie recouverte. Les normes de sécurité incendie sont également très contraignantes avec notamment des désenfumages réguliers et des normes similaires à celles des tunnels pour la partie couverte. Il faut prévoir l’accessibilité aux pompiers, la mise en place d’aérations dans le tunnel ferroviaire au cas où il y aurait un incendie et créer une traversée de voies pour évacuation assurant un désenfumage naturel. Les pompiers doivent également pouvoir se connecter à la colonne sèche avec leurs tuyaux. Le projet de la SEMAPA initié en 1990 devrait se terminer entièrement à horizon 2030. La volatilité du marché immobilier a ralenti considérablement le projet, ainsi le chantier a été de nombreuses fois mis en suspens (1993-2000 notamment). Le montant total de l’opération s’élève à 2,4 milliards d’€. Entretien réalisé le 30 juillet 2015 50

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Entretien avec Benoît du Passage, Virginie Houzé et Marie Gilmas JLL Nous nous sommes entretenus avec Benoît du Passage, Président Directeur Général France et Europe du Sud de JLL France, Virginie Houzé, Directeur Etudes et Recherche de JLL France et Marie Gilmas, Responsable des projets en développement, Departement Investissement de JLL. L’un des points majeurs évoqué lors de l’entretien est le déplacement de la gare du Nord aux portes de Paris. Différencier les visiteurs et les franciliens Il existe deux catégories de personnes, qui passent par la gare du Nord : - les clients : ils visitent ou sont en voyage d’affaires. - les employés : ils travaillent dans une entreprise localisée dans Paris ou en banlieue parisienne. On a tendance à ne regarder que le bien-être des habitants, en oubliant celui des étrangers. Il est nécessaire de rééquilibrer cette situation en créant un espace réservé aux clients au sein de la gare du Nord selon le même modèle que celui de la gare de Saint Pancras. Il faut proposer une solution alternative à la gare du Nord et accueillir les clients de la même façon qu’à Londres. Un nouvel hub Le déplacement de la gare du Nord, accompagné de celui de la gare de l’Est paraissent indispensables avec la création d’une liaison avec Roissy et d’un Hub de transport, le “CDG express” afin de gérer le flux de la gare du Nord. Un nouveau quartier tertiaire Une gare a tendance à créer une zone tertiaire comme les gares Montparnasse et Saint-Lazare, et une zone logistique. L’intérêt stratégique de Paris est qu’il s’agit de la vitrine du pays. Il n’y a pas de pôle à l’intérieur de Paris mais seulement aux abords de Paris. Les bureaux de grade A sont inexistants à l’intérieur de la capitale. Benoît Dupassage et ses collaborateurs ont exposé différentes solutions pour créer du foncier tels que le retraitement des friches ferroviaires. Entretien réalisé le 5 juin 2015 51

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Entretien avec Nicolas Bel Topager Afin d’appréhender au mieux l’agriculture verticale, Nicolas Bel fondateur de Topager, nous a donné son expertise reconnue de l’agriculture urbaine. Auteur du livre “Potager urbain” il anime régulièrement des conférences et des ateliers autour de son thème de prédilection. Quel type de culture nous conseillez vous pour notre zone de 4 000 m² ? La technique la plus économique est de prévoir des plantations grimpantes, on peut par exemple cultiver de la vigne, des kiwis rustiques d’un seul tenant ou en mettant des jardinières. On peut avec des jardinières de 20 cm de terre et 60 cm de hauteur, cultiver des plantes aromatiques type basilic ou persil. Qu’en est-il de l’orientation pour ces cultures ? Pour la vigne l’orientation Est n’est pas adaptée, pour le reste oui : ce ne sont pas des produits qui ont besoin de beaucoup de soleil. Au contraire, les plantes maraîchères ont plutôt besoin d’ombre. Doit-on privilégier une culture hydroponique ? On peut faire de la culture hydroponique mais l’inconvénient c’est que le substrat génère des déchets, la laine de roche par exemple est assez énergivore. Elle génère beaucoup de déchets et doit être changée régulièrement. Il faut rajouter du fertilisant et on ne sait pas faire du goutteur avec des fertilisants organiques, du coup c’est forcément d’origine synthétique (à base de pétrole). On peut le faire avec des substrats techniques, un mélange de roche volcanique et de pouzzolane, du “compost”. On peut également le faire avec des substrats spéciaux, si on a des activités liées à la restauration on peut composter et favoriser les ressources locales. Les restaurateurs sont obligés de traiter eux-mêmes leurs déchets organiques donc c’est très intéressant pour eux. Quelle est l’épaisseur de ce dispositif ? En termes d’épaisseur, 30-40 cm pour le kiwi, 20 cm pour les verdures. Vous développez de manière croissante l’agriculture sur les toits, quel est le futur de l’agriculture urbaine ? L’agriculture sur les toits est un bon challenge à développer. L’agriculture verticale est assez ponctuelle. Elle est régulièrement conseillée dans un projet. Il y aura de plus en plus d’agriculture sur toit ou verticale. On travaille sur de nouveaux types de murs végétaux. Nous travaillons sur un nouveau procédé Wild On Wall : c’est un système développé avec Terreal et XTU, en terre cuite, de 12 cm d’épaisseur et sur lequel on peut cultiver de la pelouse, du trèfle, des plantes aromatiques. Entretien réalisé le 7 septembre 2015 52

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Annexe - bilan promoteur détaillé

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