jardins de dijon - Bibliothèque municipale de Dijon
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JARDINS DE DIJON JALONS POUR UN INVENTAIRE
par Mme Marie-Claude PASCAL*
Dijon compte aujourd'hui 600 hectares de parcs et de jardins publics et le secteur sauvegardé (97 hectares) possède 150 jardins, conçus comme tels depuis l'origine ou simples îlots enchâssés entre des immeubles. L'histoire des jardins est liée à l'évolution de l'espace urbain. On a peu de moyens de connaissance sur la période médiévale. L'habitat s'organise à l'intérieur de l'enceinte construite après l'incendie de 1137. Tracée largement, elle englobe de vastes terrains encore vierges, en friche, certains même plantés de vignes, comme celle des Crais, cultivée jusqu'au XVe siècle. La ville est encore rurale et la vigne fonde une partie de son économie. Dans cet espace les communautés religieuses se taillent de larges pourpris : la place des jardins y est importante car ils assurent une véritable autarcie aux communautés. La complémentarité entre jardins et établissements religieux apparaît nettement sur le premier plan de Dijon publié en 1574 : le plan de Bredin, vue à vol d'oiseau, suivant une technique qui était alors la seule pratiquée. I. Le plan de Bredin : première esquisse des jardins au xvie siècle
1. Description L'église Saint-Etienne apparaît flanquée d'un jardin avec damier en pointillé, planté d'un arbre. Dans le vaste enclos de Saint-Bénigne on distingue une esquisse de parterres décoratifs, eux aussi en pointillés. * Remarque : Sauf autre mention, tous les documents cités sont conservés aux Archives départementales de la Côte-d'Or. Les abréviations suivantes sont utilisées : B.M. : Bibliothèque municipale de Dijon ; M.C.A.C.O. : Mémoires de la Commission des Antiquités du département de la Côte-d'Or. Par ailleurs la bibliographie n'a pris en compte que les textes mentionnant expressément l'existence de jardins et s'y rapportant, sans considération architecturale. Mémoires de la Commission ries Antiquités de la Côte-d'Or, T. XXXV, 1987-1989, p. 385-424.
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Les Carmes sont représentés rue Gauche (rue Crébillon), où, après divers transferts, ils sont installés depuis 1371. Il est difficile de déterminer si les jardins en lanières, plantés d'arbres, situés à proximité, leur appartiennent. Les Jacobins sont installés depuis 1237 à l'actuel emplacement des halles : leur enclos semble vaste, avec une esquisse de parterre décoratif en pointillé et un terrain en damier planté d'un arbre. Celui des Cordeliers, fort étendu, est planté d'arbres qu'accompagnent des parterres décoratifs esquissés, dont la propriété est difficile à préciser. Hors les murs se trouve un autre enclos de belles proportions : celui des Chartreux, non loin duquel figure le stand de la société de l'Arquebuse. En dehors de ces terrains identifiés par leur proximité avec un établissement religieux ou social, d'autres espaces libres jouxtent des maisons, le plus souvent à proximité des remparts où l'habitat est moins dense qu'au centre. En témoignent essentiellement des terrains plantés d'arbres longeant le Suzon, proches de la porte Guillaume, de la porte Saint-Nicolas, de la porte Saint-Pierre et de la rue Vannerie, avec, plus rarement, des ébauches de parterre en broderie (près de la porte SaintPierre et de la rue Vannerie). Il est difficile de les mettre en rapport avec une propriété privée définie ou une église paroissiale. En fait le seul jardin d'agrément médiéval connu n'est pas représenté sur le plan : celui de Marguerite de Flandre, épouse de Philippe le Hardi. 2. Typologie La fiabilité et l'exactitude du plan de Bredin restent sujettes à discussions. Cependant le souci du dessinateur de rendre compte de la réalité peut être déduit du soin pris à créer des catégories dans le rendu des jardins et des espaces libres en général. En effet un examen attentif fait apparaître six types de représentations pour quelque 50 terrains concernés : — esquisses de parterres décoratifs en pointillé : 10, — espace quadrillé planté d'un ou deux arbres : 17, — espace simplement quadrillé (pavage ? dallage ?) : 9, — cour plantée d'un arbre (sol en terre ?) : 7, — plantation d'arbres (vergers ?) essentiellement entre la porte Saint-Pierre et la porte d'Ouche : 7. — esquisse de plantations en ligne (potagers ?) : 2. On est réduit à des hypothèses pour traduire ces représentations, mais la recherche de conventions révèle un souci d'identification. On
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retrouve extra muros la même préoccupation avec des représentations conventionnelles pour les vignes, les plantations, les semis en lignes, les haies, les plantations d'arbres (quinconces, alignements), les parterres décoratifs. IL Le plan de Mikel : les jardins du XVIIIe siècle
II faut attendre près de deux siècles pour avoir la première représentation complète de la ville : il s'agit du plan, financé à moitié par la ville et les États de la Province, qui fut dressé de 1756 à 1759 par l'ingénieur Antoine Mikel. Les jardins y sont soigneusement dessinés. Quarante ans plus tard, la saisie des biens ecclésiastiques et laïcs et leur mise en vente comme biens nationaux pendant la Révolution permettra, indirectement, de disposer de descriptions précises. Aussi le dépouillement de la série Q des Archives départementales fournit-il des renseignements, voire des plans, concernant les jardins des enclos monastiques et des propriétés privées. Ces sources doivent être complétées par les documents conservés aux Archives municipales et le fonds d'estampes de la Bibliothèque municipale de Dijon. On recense à partir du plan Mikel, 23 enclos comprenant des jardins qui dépendent d'établissements religieux ou charitables (au lieu d'une dizaine environ en 1574). S'y ajoutent, hors des murs, ceux des Chartreux, des Capucins et des Lazaristes. Vingt-six jardins d'hôtels particuliers, témoins de l'émergence d'une catégorie nouvelle, consécutive au développement architectural et urbain dû à l'enrichissement des parlementaires implantés dans la ville. Ces propriétés se sont surtout développées sur des parcelles restées libres aux abords du rempart. Elles peuvent aussi être nées du regroupement, par achats successifs, de petites parcelles. Il faut y ajouter le jardin du palais des États, celui du château et celui du bastion Saint-Pierre. Trois jardins appartenant à des sociétés de tir : extra muros celui de l'Arquebuse, déjà mentionné au xvie siècle, et, intra-muros, ceux de l'Exercice de l'Arc et de l'Arbalète, créé en 1393, qui eut d'abord son stand au Champ de l'Isle. La comparaison systématique du plan de Mikel et de l'actuel plan de sauvegarde et de mise en valeur de la ville de Dijon (document rendu public en 1985) a permis de mesurer l'évolution foncière de chaque jardin.
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JARDINS DES ÉTABLISSEMENTS RELIGIEUX
Comme au xvie siècle, ils apparaissent vastes et aèrent le tissus urbain. L'abbaye Saint-Étienne Au sud de l'abbaye, devenue siège épiscopal en 1731, se trouvaient les bâtiments abbatiaux, autour d'une cour correspondant à peu près à l'actuelle cour Chabeuf. Le grand jardin s'étendait au-delà, entre ces bâtiments et le mur du castrum. Jusqu'au XVe siècle, un mur le séparait de l'actuelle rue Chabot-Charny. À cette époque, le monastère avait commencé à lotir son pourpris en cédant des terrains sur lesquels, comme le révèle le plan de Bredin, avaient été construites des maisons. Sur le plan de Mikel, l'abbaye apparaît avec son cloître. Le palais épiscopal est traîté comme un hôtel particulier et ouvre sur un superbe jardin à la française, agrémenté d'un parterre en broderie et, semble-til, d'une niche dans la perspective centrale. Il est accompagné d'une plantation d'arbres sur quatre rangs. Ce jardin jouxte alors au sud la salle de la Comédie, établie en 1714 dans l'actuelle rue Buffon. En 1784, l'évêque autorisera l'ouverture de deux portes pour offrir des dégagements aux spectateurs en cas d'incendie. À la suite de la mise en vente des domaines épiscopaux comme biens nationaux intervint, le 21 floréal an IV, la soumission du citoyen Pierre Germain Larché de Dijon pour « acquérir tous les bâtiments, jardins, cloîtres, cour, magasin, remise, écuries, places et toutes aisances et dépendances en tout emplacements faisant partie du ci-devant évêché de Dijon et les maisons adjacentes entre la rue Etienne et celle de la Comédie1 ». Le directeur de l'enregistrement et des domaines émit des réserves, observant que la soumission ne paraissait pas suffisamment libellée, qu'il existait un projet de nouvelle rue qui prendrait depuis la rue de la Comédie et aboutirait rue Etienne, que si cette rue ne se faisait pas, la nécessité d'issues en cas d'incendie obligerait à prendre une partie du jardin de l'ancien évêché pour y pratiquer une ruelle de passage ou l'adjudicataire devrait accorder un droit de passage, enfin qu'il existait un plan de construction d'une nouvelle salle de Comédie dans l'emplacement du jardin, ce qui nécessitait une définition des parties aliénables. La rue Legouz-Gerland fut percée en 1807 sur une partie du jardin épiscopal. Le jardin lui-même fut acquis par la ville en 1972. Il apparte1.Q426.
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nait alors à 17 familles dans l'indivision. Celles-ci émirent le vœu d'attacher à ce jardin le nom de leur ancêtre commun, lié à l'histoire de Dijon, Carrelet de Loisy. Remis en état dans un style paysager, ce petit parc comporte actuellement un ensemble de roches, complété par un bassin. Il est ombragé d'une soixantaine de feuillus et clos de murs. L'abbaye Saint-Bénigne Son pourpris est tout à fait organisé dès le xvne siècle. Un dessin de dom Prinstet de 1674 donne un plan, en vue axonométrique, de parties bien différenciées : jardin de cloître à division orthogonale, verger à gauche de l'infirmerie, deux parterres dont l'un dessiné en fleur de lys, jardin potager en « planches ». Un autre document, malheureusement sans date, précise quelques éléments : on y voit, représentés et légendes, une allée de pruniers, une vigne en espaliers, des noyers, un cabinet de verdure2. Le plan de Mikel reprend ces dispositions pour l'essentiel. Toutefois verger et potager semblent avoir gagné sur les parterres et occupent tout l'espace entre les bâtiments et le rempart au nord. Il y a un parterre décoratif devant le logis abbatial, devenu siège de l'Intendance depuis 1701. Deux styles se côtoient : l'un est en broderies, l'autre est fait de compartiments simples. Un plan ultérieur de 1766 introduit un projet intéressant, dessiné par l'architecte Saint-Père : l'entrée de l'abbaye est prévue par la rue du Chapeau-Rouge et le jardin est traité à la française, avec tapis de gazon ordonnés par des axes rectilignes créant des effets de perspectives, scandés par des arbres isolés ou des statues, et écoinçonnés par souci d'allégement. On ignore si ce projet fut exécuté3. Un plan dressé en 17904 reprend les schémas plus anciens. On retrouve des carrés de potager, les arbres en ligne et en quinconce du verger et des parterres décoratifs de broderie. Les procès-verbaux de vente de divers lots de l'enclos après la Révolution donnent peu de précisions5. Est alors vendu « à Louis Accard, tonnelier, et Jean-Baptiste Goisset aubergiste, un petit jardin contenant un pavillon de galandage en ruine, quelques espaliers et arbres en quenouille (de 9 toises) et un verger de 54 arbres fruitiers dont 6 doivent être arrachés pour l'alignement du nouveau mur de clôture ». La maison abbatiale avec cour, jardin, écuries, remise et pressoir est vendue à 2. B.M., Estampes, Dijon, portefeuille Saint-Bénigne. 3. Reproduction conservée au service du Vieux Dijon, inv. n° 373. 4. B.M., Estampes, Dijon, portefeuille Saint-Bénigne. 5. Q 428.
VUE b'ENSEMDLE I)É L'ABBAYE SAINT-BÉNIGNE EN 1674 n de item f r/nstst, 1074;
FIG. 1. — Saint-Bénigne en 1674 (dessin de dom Prinstet).
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FlCi. 2. — Saint-Bénigne : projet de Saint-Père, 1766 (B.M. Dijon, Estampes).
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Biaise Ardent, négociant. Enfin est cédée à André Jouvin : « Une portion de jardin et une terre faisant partie du grand jardin des ex-bénédictins bordé au nord par la rue de la Liberté, de 60 perches environ. » La plus grande partie des jardins enclos dans le pourpris de l'abbaye a été lotie et urbanisée. Seuls restent les jardins du petit et du grand cloître, de part et d'autre du dortoir. Ils correspondent respectivement à l'actuel « jardin » de l'école des Beaux-Arts (simple pelouse) et au square des Bénédictins, réaménagé en 1977, qui précède le Musée archéologique. Les immeubles bordant la rue de la Liberté au sud ont été lotis sur les anciens vergers et potagers de l'abbaye. Le logis abbatial et ses jardins ont, pour leur plus grande partie, également disparu. Un mur elliptique séparait l'abbaye du logis en dessinant une grande cour. La ville avait fort bien entretenu le bâtiment et les jardins, qui étaient ornés de statues, depuis qu'elle l'avait pris à bail pour loger l'intendant de la province qui y était resté jusqu'en 1781. Ce sont les transformations du xixe siècle qui ont altéré cet ensemble : en 1810, le percement de la rue du Docteur-Maret supprimait la cour, en 1854, l'ouverture de la rue Mariotte faisait disparaître les jardins et l'essentiel des bâtiments. Les Carmes On les retrouve sur le plan de Mikel au même emplacement qu'au xvie siècle, en l'actuelle rue Crébillon. La disposition est analogue à celle des Jacobins. Le jardin du cloître est dessiné avec des arabesques et organisé autour d'un pointxentral. À l'arrière des bâtiments, le jardin potager, organisé en compartiments, devait permettre l'approvisionnement en légumes et fruits de la communauté. Ce dispositif est confirmé par un plan dressé en mai 1790 pour être joint au procès-verbal de mise en vente, le 16 juin 1792, des « terrains appartenant aux Carmes, église, maison conventuelle, pressoir, cuve, jardins, cour et dépendances, avec une petite maison occupée par Loranz Tournent adossée à l'église ». Cette description sommaire et les annotations du plan rendent bien compte de l'organisation autarcique de la communauté, de la culture maraîchère et vinicole à la menuiserie6. Le jardin du cloître est plus simplifié que sur le plan de Mikel, où il figure gazonné et planté d'arbustes avec une bordure régulière, le centre en étant occupé par une vasque. À l'arrière, trois compartiments sont identifiés comme jardins avec des esquisses d'« arbres-vergers », trois 6. Q 172.
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FIG. 3. — Couvent des Carmes en 1791 (Arch. dép. Côte-d'Or, Q 172).
autres sont en « planches ». Contre le mur de l'enclos se développe une terrasse où les arbres semblent former une allée couverte. Enfin de la vigne est plantée sur portique dans la cour de gauche. L'église sera démolie. Les restes du couvent seront repris après 1822 par les sœurs de la Visitation. Un document de juin 1890 présente la cour du Sacré Cœur traîtée dans un style de parterre à l'anglaise avec des pièces de gazon, entourées de plates-bandes de fleurs ou d'arbustes, et des sentiers sablés7. La cour du cloître et le jardin ont été préservés jusqu'à nos jours dans leurs limites mais non dans leur forme. La restauration récente des bâtiments a été accompagnée d'une remise en valeur du jardin. Les Jacobins Eux aussi n'ont pas changé de place depuis le xvie siècle. L'église est située au sud de l'enclos. Le jardin du cloître est dessiné en broderie à motif quadrilobé. Un jardin potager en compartiments s'étend derrière les bâtiments. 7. B.M., ms. 3051.
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En l'état actuel des recherches, il n'existe pas de description plus précise. On trouve simplement mention de la vente à la ville de l'église en 1807 comme marché aux poissons8. Le sol en fut rehaussé sans respect pour les dalles sépulcrales9, puis elle fut détruite vers 1870. Sans doute les limites du cloître, qui lui était adossé, correspondentelles à celles des halles actuelles. Les jardins potagers, au nord de l'enclos, ont été lotis et sont occupés actuellement par les immeubles élevés en bordure de la rue Bannelier. Les Cordeliers Eux non plus n'ont pas changé d'emplacement depuis le plan de Bredin. Le jardin du cloître est en parterre de broderie. Le potager est compartimenté en planches. C'est alors l'un des plus beaux jardins conventuels. Un plan de 1791 confirme son importance malgré l'absence de détails10. Le jardin potager est divisé en quatre parties, deux en longueur de 145 et 140 perches chacune, avec un puits, une troisième, de 266 perches, longe le mur. La dernière est enclavée entre l'église, les salles et la maison voisine. Le monastère fut ensuite presque totalement rasé et coupé par les rues Franklin et Turgot. Actuellement la majeure partie des jardins a été lotie et transformée. Le jardin du cloître demeure, traîté en simples pelouses. D'autres portions des jardins anciens se rattachent à diverses propriétés, en particulier la maison Fyot, les écoles Turgot et l'hôtel des Cordeliers, rue Turgot. Les Jésuites Ils ont été établis en 1582 en iJhôtel que leur a légué le président au Parlement Odinet Godran. Cet hôtel est connu par un plan du collège « devant qu'on ait rien basti » n . Un jardin (avec emplacement du mur romain) apparaît enclavé entre les bâtiments. Il était séparé de la rue des Jésuites (actuelle rue de l'École-de-droit) par l'église occupée maintenant par la salle de lecture de la Bibliothèque municipale. Le plan de Mikel suggère un schéma plus élaboré où le jardin est divisé en quatre compartiments. Ce n'est plus maintenant qu'une cour asphaltée. 8. Q 430. 9. FOISSET (P.), « L'église des Dominicains », dans M.C.A.C.O., tome IX, 1874-1877, p. 113-140. 10. Q 169. 11. GRAS (P.), « L'ancien collège des Godrans », dans M.C.A.C.O., tome XXIV, 1954-1958, p. 217-240.
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Les Minimes Ils se sont installés en 1599 rue du Vieux-Collège. Le plan de Mikel n'indique pas de plan de jardin. Par contre un plan géométrique levé le 14 mai 1791 pour être joint au rapport d'estimation des biens12 révèle l'existence d'un jardin en sept compartiments visiblement cultivés en « planches ». Le dessinateur a pris soin de les colorier différemment. Ils sont bordés d'arbustes en plantation régulière. Le jardin du cloître est représenté avec un dessin en étoile autour d'un rond-point ou d'un bassin central. Un plan ultérieur, dressé en janvier 1793, est beaucoup moins précis. Le texte qui l'accompagne indique, à l'article 7 : « à la suite du bâtiment du midi, il y a un jardin qui est en friche et où sont plusieurs arbres tant en espaliers qu'à plein vents, et un puits et deux auges en pierre d'Is-sur-Tille et une [en] pierre de Dijon ». Il est donc clair que ce jardin n'a plus été entretenu depuis au moins deux ans. Une partie des cours du lycée des Arcades en occupe actuellement l'emplacement.
FIG. 4. — Couvent des Minimes en 1791 (Arch. dép. Côte-d'Or,Q173). 12. Q 173.
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Les Oratoriens Ils sont rue Saint-Jean depuis 1621. Sur le plan de Mikel, leur enclos s'étend de la rue de l'Oratoire (actuelle rue Bossuet) à la rue Dauphine. Tout un ensemble de jardins y est représenté avec des compartiments en planches, des arbres et un parterre de broderie. Le 24 frimaire an II est dressé procès-verbal de vente des biens des ex-Oratoriens, soit plusieurs corps de bâtiments, l'église, une chapelle, une cour, un jardin, un parterre et leurs dépendances. Estimés 26 000 livres, ils sont vendus 43 600 livres à Jean Mauriet, menuisier à Dijon13. Le couvent proprement dit est situé rue de l'Oratoire. On y accède par une grande porte à deux vantaux ornée de deux colonnes surmontées d'une niche « avec figure ». Au fond de la cour d'entrée s'ouvre la grande porte de l'église, à laquelle sont accotées des chapelles formant arrière-corps. Une succession de cours précède le couvent. Sa façade principale donne sur un grand jardin en potager : à la suite du principal corps de bâtiment, à droite et au fond du jardin se trouve un puits avec pompe en bois garnie de piston, verge et balancier en fer. Au sud du grand jardin, à la suite du principal corps de bâtiment, un escalier de trois marches mène à un parterre, « ladite terrasse est ornée en planche en allée, est implantée de buis. Ladite terrasse contient une superficie de 198 toises et demie ». Après bien des avatars, l'emplacement du jardin des Oratoriens est occupé par le centre commercial Dauphine. La commanderie de La Madeleine D'après le plan de Mikel, la commanderie ne possédait qu'un simple jardin à l'arrière des bâtiments. Ce que confirme l'acte de vente des biens de celle-ci le 12 messidor an IV au citoyen François Marie Cappule, négociant14. L'espace est resté libre, avec un jardin sur lequel ouvrent des maisons. Les résidences urbaines des cisterciens Sont également implantées en ville les résidences urbaines des cisterciens évoquées déjà par le plan de Bredin. Au xvme siècle, le Petit Citeaux et l'enclos de Clairvaux ont conservé des jardins importants. Les biens de Clairvaux, mis en vente en 1792 ont retrouvé une partie de leur unité avec l'aménagement des jardins de l'immeuble de la 13. Q 174. 14. Q 426.
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Région et de l'Hôtel du département15. Le Petit Citeaux abrite la maison de retraite Saint-Philibert : une partie des espaces verts a été conservée. Par contre le plan de Mikel n'indique pas les résidences urbaines de l'abbaye d'Auberive et de l'abbaye de la Bussière, ni leurs jardins. La première, au n° 28 de l'actuelle Pasteur, fut vendue et l'emplacement fut repris par l'hôtel bâti en 1760 par Jean Caristie. La seconde était établie au n° 27 de l'actuelle rue Buffon dès le xive siècle. Elle fut acquise au xvne siècle par le couvent des Ursulines auquel un passage la reliait. Les Carmélites Premier monastère de femmes fondé à Dijon, en 1605, le couvent des Carmélites connut deux implantations avant de s'installer dans l'hôtel voisin des Cordeliers. Le plan de Mikel montre un cloître planté d'arbustes et un potager en planches derrière les bâtiments. Après avoir été affectés à l'armée, les bâtiments le sont maintenant au District de l'agglomération dijonnaise et à l'Agence intercommunale d'urbanisme implantée là où se trouvaient les potagers. La création du parking Sainte-Anne, actuellement en construction, prévoit en surface la reconstitution d'un jardin divisé en quatre parterres, reprenant le schéma historique du jardin des Carmélites. Les Bernardines L'histoire des bâtiments des Bernardines est bien connue, mais pas celle de leur jardin. Le plan de Mikel le représente sous la forme d'un traditionnel jardin de cloître en motif quadrilobé, avec, à l'arrière des bâtiments, les potagers dont une part s'ordonne, avec une recherche de tracé, autour d'un rond-point. Le procès-verbal de mise en vente du 11 messidor an IV fait état d'une portion de jardin « joignant au couchant le grand jardin, avant la réunion qui y a été faite d'une partie de celui des ex-Cordeliers à partir et compris la fondation de l'ancien mur de séparation qui sont hors de terre et en se retournant parfaitement d'équerre sur ledit mur, joignant de levant la rue Turgot... ladite portion de jardin contenant en surface 15. Q 172 et VIGNIER (F.), « De l'enclos de Clairvaux à l'immeuble régional », dans M.C.A.C.O., tome XXXIII, 1982-1983, p. 199-209.
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1042 toises quarrés et étant plantée d'arbres fruitiers et d'un quinquonce de tilleuls »16. Un plan, de novembre 1792, annexé au.procès-verbal d'estimation des maisons des Bernardines17, n'apporte pas de précisions complémentaires. Il mentionne simplement des jardins. Il en va de même d'un plan général du 18 frimaire an V. La ville a acheté les bâtiments en 1803 pour installer l'hospice Sainte-Anne. S'y sont substitués depuis le musée d'Art Sacré et le musée de la Vie Bourguignonne-Perrin de Puycousin. Une partie des jardins a pu être préservée dans sa vocation. Elle est ouverte au public sous l'appellation de « Jardins Sainte-Anne ». Les Chartreux Hors des murs le clos des Chartreux constitue un vaste ensemble sur lequel les sources sont plus nombreuses. Le monastère, fondé en 1383 par Philippe le Hardi, comportait, suivant la règle de l'ordre, deux cloîtres entourés de deux groupes de bâtiments. Déjà sur le plan de Bredin, on peut repérer le puits de Moïse dans le grand cloître. Sur une vue du xvm e siècle18, ce grand cloître apparaît simplement divisé en quatre pelouses par deux allées transversales. Les jardins situés autour semblent essentiellement en vignes et vergers. Un autre plan, antérieur à la reconstruction de 1774, montre la Chartreuse en perspective axonométrique. Le potager est représenté, divisé en compartiments, en face du verger. Il existe également un plan,géométral de la fin du xvm e siècle très bien légende : les potagers sont quadrillés, le jardin décoratif est traîté non pas en parterre de broderie « fermé », mais composé, avec des allées rectilignes et un jeu géométrique qui recherche des effets de perspective18. Les données fournies par ces plans sont corroborées par le dossier de vente des biens en 1791. Ces biens comportent alors : « Tous les bâtiments, les cloîtres, cellules, églises... cours, jardins, vergers, clos composant le ci-devant monastère des Chartreux de Dijon, estimés par rapport du 14 mars 1791 la somme de 66 911 livres, 5 sous, 5 deniers. » « la maison du portier au bout de l'avenue du Faubourg de Rennes, et un jardin en dépendant, clos de murs, où se trouvent deux viviers considérables, le tout estimé par rapport du 15 mars 1791 la somme de 1 400 livres ». 16. Q 426. 17. Q 430. 18. B.M., Estampes, Dijon, portefeuille Chartreuse.
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« une maison dépendant du Clos des Chartreux, qui a son issue sur le Faubourg de Rennes, actuellement occupée par Monsieur Jolivat, jardinier... ». « cinq jardins dépendants de la dite maison, de deux journaux trois quarts, où se trouvent 23 viviers et deux canaux à serrer le poisson... » « l'enclos des Chartreux traversé par une grande allée d'arbres qui conduit au Faubourg de Rennes, de 25 soitures 2/3, et 24 perches de prés, et 37 journaux 2/3 25 perches de terres labourables... » « 4 soitures et 19 perches de prés situés contre l'enclos ci-dessus... » « un clos de vigne de 13 journaux 3/4 touchant par devant le monastère... » Ce rapport rend compte de l'importance des terres agricoles possédées par les Chartreux sur le finage de Dijon. Le procès-verbal d'estimation des bâtiments, jardins et vergers, enregistré le 19 mars 1791, apporte des précisions sur l'enclos luimême : Article 7 : « tout l'espace compris au milieu du cloître forme un verger implanté d'arbres fruitiers en espaliers, en boules et en quenouilles, avec un petit bâtiment au milieu en mauvais état et qui n'est pas couvert. C'est dans cet emplacement qu'est le cimetière, le sol de ce verger est très pierreux et les arbres ne peuvent y durer longtemps et forme une surface de 2 360 et 13 toises et demie, que nous estimons 15 sols la toise ». Article 30 : « derrière l'église et les bâtiments au nord est un verger autrefois planté en vignes et appelé la vigne blanche, planté en arbres fruitiers à plein vent, il contient 2 journaux et demi... » Article 31 : « le verger le long du mur du clos de côté de la rivière qui est en partie en pré, partie en verger implanté de mauvais arbres fruitiers et d'un assez mauvais terrain ; l'on a fait plusieurs creux pour en tirer du sable... »19 La Révolution a fait de la Chartreuse une carrière de pierre, puis elle est devenue asile départemental et enfin hôpital psychiatrique. Le réaménagement partiel des jardins autour du Puits de Moïse est actuellement à l'étude. Les Lazaristes Établis à Dijon en 1862, ils occupaient un vaste enclos hors les murs. Le jardin apparît comme un potager divisé en compartiments. Déclaré bien national, le domaine fut vendu à la Révolution puis divisé. 19. Q 169.
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II jouxtait l'hôtel du président Chartraire de Bourbonne dont le jardin apparaît traité en parterre à la française. Confisqué à la Révolution, il fut acheté et réuni au domaine des Lazaristes en 1867 par les Carmélites qui se réinstallaient à Dijon. Tombée à l'abandon, la propriété se délabra peu à peu. Une restauration privée a permis en 1982 de sauver un pavillon de l'hôtel et une part du jardin. Mais la plus grande partie de l'enclôt monastique a été lotie. Les Capucins Les Capucins se sont installés en 1602 hors des murs, près de la porte Saint-Nicolas. En 1759, leurs enclos étaient entourés de vignes et de prairies, entre la route de Langres et la rue Sainte-Catherine (actuelle rue Marceau). Leurs biens furent adjugés le 7 messidor an IV au citoyen Joseph Viardot20. L'acte de vente mentionne : « un petit jardin situé derrière le grand clos des ex-capucins et clos de murs, aboutissant de levant sur les hébergeages de l'acquéreur, de midi sur le jardin de la veuve Blondeau, de nord sur le grand verger desdits capucins et faisant pointe au couchant sur une petite cour des mêmes. » Le couvent des Capucins devint hôpital pendant la Révolution, prison sous l'Empire, hôpital militaire en 1813, caserne en 1816. Les terrains environnants ont été lotis progressivement. Les établissements hospitaliers ou de charité tels que le Bon Pasteur, le Refuge, l'Hôpital Sainte-Anne (actuel Collège Marcel Pardé) n'ont pas été étudiés mais comportaient aussi des jardins. Il en est de même, hors les murs, pour l'Hôpital Général qui a gardé son emprise foncière et pour la Maladière, léproserie créée au XIIe siècle et dont le bâtiment principal subsiste, au sein d'un habitat semi-pavillonnaire. JARDINS D'HÔTELS PARTICULIERS
Le plan de Mikel, curieusement, ne fait pas état de tous les hôtels particuliers de l'époque. En effet, une soixantaine d'hôtels ont été construits entre le XVe et le xvme siècle ; la plupart étaient en place lors de l'établissement du plan. Quelques-uns seulement ont été réalisés ultérieurement, encore ne s'agissait-il souvent que de remaniements de constructions antérieures. Ainsi ont été repris après 1759 l'hôtel Caristie, le petit hôtel Berbisey, l'hôtel Guyton de Morveau, l'hôtel Fleutelot 20. Q 426.
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de Beneuvre, l'hôtel Bazard, l'hôtel Esmonin de Dampierre, l'hôtel du Commandant militaire et l'hôtel Lory21. Or le plan de Mikel ne permet de dénombrer que 32 hôtels particuliers, dont 26 avec des jardins. Presque tous ont conservé leur emprise foncière d'origine et, très souvent, leur jardin, même si la forme s'en est appauvrie. En outre des hôtels certainement conçus avec jardin dès l'origine ne sont pas représentés : ainsi en est-il des hôtels Fyot de Mimeure, Saint-Père ou Rigoley de Chevigny dont le jardin clos par un curieux pavillon était voisin de celui des Carmélites. Par ailleurs les schémas ou plans complémentaires sont encore plus rares que pour les établissements religieux et ne portent souvent que sur des dépendances ou sur des modifications de construction. L'enquête n'a donc pas pu être exhaustive et devra être reprise ultérieurement. NB : La présentation des hôtels suit un regroupement géographique par rue ou par quartier, afin de faciliter un repérage comparatif sur plans anciens et actuels. L'hôtel Esmonin de Dampierre (40, rue de la Préfecture) Sa construction datant de 1775, il ne figure pas sur le plan de Mikel qui montre un état antérieur. Faute de place, le bâtiment ne put se développer entre cour et jardin selon la formule la plus recherchée. Le demi-cercle des constructions des communs s'établit sur l'emplacement de plantations d'arbres22. Ce parti ne permettait l'aménagement d'aucun jardin, mais seulement d'une cour de belle ampleur. L'hôtel Bouhier de Lantenay (47, rue de la Préfecture) Le plan de Mikel présente un jardin traité en parterre de broderie et bordé de rangées d'arbres. D'après le plan de l'hôtel dû à l'architecte Nicolas Lenoir le Romain, qui le bâtit en 1756-1760 pour Bénigne Bouhier, le jardin est ordonné en trois parterres de broderie, bordés de terrasses aboutissant à des cabinets de verdure, tandis qu'au centre, dans l'axe du perron, une rampe donne accès à une niche de rocaille23. Il est toutefois difficile de déterminer s'il s'agit d'un projet ou de sa 21. BAZIN (J.-F.), « Le quartier Clemenceau ou le Rocher de Sisyphe », dans Mémoires de l'Académie des Sciences, Arts et Belles Lettres de Dijon, tome CXXVI, 1983, p. 101-140. 22. BORDET (L.), « L'hôtel Esmonin de Dampierre », dans M.C.A.C.O., tome XXIII, 1947-1953, p. 256-260. 23. B.M., Estampes, Dijon, portefeuille Hôtels et Maisons, XVIIIC siècle.
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réalisation. Le plan de Mikel, exactement contemporain de sa création, rend peut-être mieux compte de son état réel dont le jardin actuel reflète encore les grandes lignes : parterre central entouré de terrasses engazonnées et niche dans l'axe de la façade, fermant l'horizon. L'originalité de ce jardin tient à la présence d'un potager toujours soigneusement ordonné en planches. C'est le dernier potager urbain de Dijon24. L'hôtel de Vogué (8, rue de la Chouette) Sur le plan de Mikel, il est accompagné, à l'arrière, d'un parterre de broderie25. Le seul autre document graphique actuellement connu est un plan joint à l'estimation des biens confisqués sur l'émigré Cérice-FrançoisMelchior de Vogué le 18 floréal an II. Le jardin y est constitué d'un simple parterre de gazon ovale planté d'arbustes et ceint d'une allée et d'arbustes en bosquets. Il semble qu'un socle ou piédestal pour statue apparaisse dans l'axe de la façade, tout au fond26. Actuellement le jardin n'existe plus. L'espace a été traité en cour gravillonnée avec quelques arbustes en rideau contre les murs. L'hôtel de Saint-Seine (27, rue Verrerie) II était accompagné d'un jardin que le plan de Mikel représente en broderie. L'espace subsiste, plus en cour qu'en jardin, avec quelques grands arbres. L'hôtel de la Toison (place de la Banque) Construit en 1646 entre la place de Suzon et la rue des Champs (actelle rue des Godrans), il occupa une partie des terrains dépendant du monastère des Jacobins acquis par Jean de Berbisey en 1591. L'hôtel est occupé par la Banque de France. Un beau parc boisé a remplacé le parterre de broderie décrit par Mikel. L'hôtel Berbis de Longecourt ou de Rouville (45, rue Jeannin) Le jardin est clos par un hémicycle sur le plan de Mikel. Cet hémicycle, couronné d'une balustrade amortie par des pots à feu, correspondait à une orangerie qui ouvrait sur le jardin par trois baies en plein 24. VIGNIER (F.), « L'hôtel Bouhier de Lantenay et la préfecture de la Côte-d'Or », Cahiers du Vieux Dijon, n° 7,1978. 25. QUARRE (P.), « L'hôtel de Vogué », dans M.C.A.C.O., tome XXV, 1959-1962, p. 97-98. 26. Q 207.
FiG. 5. — L'hôtel Bouhier de Lantenay et son jardin, 1760 (B.M., Dijon, Estampes).
FIG. 6. — L'hôtel de Vogué et son jardin en l'an II (Arch. dép. Côte-d'Or, Q 207).
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cintre. L'orangerie a malencontreusement été détruite en 1957 pour faire place à un immeuble de rapport donnant sur la rue du Lycée27. Le jardin a perdu son parterre en broderie. Il est clos d'une belle grille en fer forgé du début du xixe siècle. Le potager, qui existait au xvme siècle, a été loti. L'hôtel Cœurderoy (35, rue Vannerie) II figure en 1759 avec deux parterres et une bordure d'arbres à l'est. Il a conservé la même surface, mais est traité en vastes pelouses ombragées de beaux arbres. L'hôtel Chartraire de Montigny (39, rue Vannerie) II a été profondément, modifié postérieurement au plan de Mikel, aussi la disposition des jardins est-elle beaucoup plus récente et son histoire insaisissable. L'hôtel du Commandant militaire (41, rue Vannerie) II a été totalement remanié à partir de 1784 par l'architecte Claude Saint-Père pour Marc-Antoine Chartraire de Montigny. Le parterre en broderie, qui est dessiné à l'arrière du bâtiment en 1759, a subsisté sous la forme d'une simple pelouse. De grands arbres (marronniers, châtaigniers) s'alignent en fond de parcelle entre la pelouse et le portique commun aux deux hôtels. À noter, en contrebas du portique, une niche en rocaille. L'hôtel Macheco (43, rue Vannerie) L'immeuble était relié au xvme siècle par un jardin au pavillon élevé par le président à la Chambre des comptes, Bénigne Serre. L'emplacement des jardins a été conservé, mais le parterre en broderie a fait place à des pelouses et des arbres. L'hôtel de Vienne (32, rue Chabot-Charny) II figure sur le plan de Mikel avec un jardin décoratif en fond de parcelle, derrière la galerie. Ce dispositif demeure, mais le jardin a perdu son ordonnance : il est ombragé d'arbres de haute tige (marronniers, châtaigniers) et clos par un haut mur sur la rue du Palais. 27. GRAS (P.), « L'hôtel Berbis de Longecourt », dans M.C.A.C.O., tome XXIV, 1954-1958, p. 245-256.
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L'hôtel Des Barres (43, rue Chabot-Charny) Dès la fin du xvie siècle et au début du xvne siècle les familles des Barres28 et de Massol avaient bâti leurs hôtels sur des terrains aliénés par le monastère Saint-Étienne dont le jardin ainsi se réduisait peu à peu29. L'hôtel de Massol, agrandi en 1595, 1610 et 1613 devint mitoyen du Tripot des Barres. Sur le plan de Mikel, les deux hôtels apparaissent contigus, accompagnés chacun d'un parterre en broderie à l'arrière des bâtiments. L'hôtel des Barres possède un jardin plus vaste avec un second parterre rectangulaire et il est complété à l'arrière et sur un côté par une double rangée d'arbres. Ces dispositions ont été en partie conservées. L'hôtel de Cirey (62, rue Chabot-Charny) II est représenté sur le plan de Mikel avec un jardin en broderie à l'arrière, en bordure de l'actuelle petite rue du Prieuré. Un immeuble a été construit le long de celle-ci, mais le jardin subsiste sous la forme d'une simple pelouse. L'hôtel Bouhier de Savigny (10, rue Vauban) Le plan de Mikel fait figurer à l'arrière de ce bel hôtel édifié rue Vauban un jardin avec deux parterre de broderie, ombragés de part et d'autre par une double rangée d'arbres. Il occupe actuellement la même emprise, plantée uniquement de grands arbres (maronniers, châtaigniers) qui sont peut-être ceux d'origine. L'hôtel Maublanc de Martenet (14, rue Vauban) Sur le plan de Mikel est dessiné un parterre en broderie qui a totalement disparu : une partie du jardin a été construite, le reste transformé en cour pavée. L'hôtel Millotet (17, rue Piron) Sur le plan de Mikel un grand parterre en broderie s'étend à l'arrière de l'hôtel, le long des potagers des Oratoriens. Il n'en reste rien. 28. GRAS (P.), « L'hôtel des Barres », dans M.C.A.C.O., tome XXXI, 19781979, p. 115-116. 29. RICHARD (J.), « Le Vieux Chastel de Dijon », dans M.C.A.C.O., tome XXV, 1959-1962, p. 254-282.
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L'hôtel de Blancey (6, rue Berbisey) II est accompagné sur le plan de Mikel d'un jardin en broderie. Une partie de sa surface a été préservée malgré l'édification d'un bâtiment en fond de parcelle. Il est en friche, avec seulement trois marronniers. L'hôtel Legouz de la Berchère (21, rue Berbisey)30 L'orangerie, construite vers 1765 pour clore la perspective du jardin, a été détruite en 1973 pour faire place à un immeuble de plusieurs étages. Le jardin, maintenu dans sa surface, dépend de la Compagnie bourguignonne des Œnophiles. Le grand hôtel Berbisey (25, rue Berbisey) Édifié en 1657, il se présente en 1759 avec un jardin en broderie que limite un mur en hémicycle. Il s'est simplifié : c'est maintenant un parterre en gazon. Mais il a conservé son mur de clôture, couronnée d'une balustrade amortie par des pots à feu, que scandent des arcatures en plein cintre dont les claveaux centraux sont ornés de têtes sculptées. Le petit hôtel Berbisey (27, rue Berbisey) Dès 1759, le plan de Mikel représente l'hôtel avec un parterre en broderie et, dans le fond, une plantation d'arbres. L'ensemble fut profondément remanié de 1762 à 1767 pour Charles-Philibert Fyot, le premier créateur des jardins de Montmusard, par Nicolas Lenoir, l'architecte de l'hôtel Bouhier de Lantenay31. D'après un plan géométral dressé par ce dernier, l'hôtel ouvrait alors à l'arrière sur un parterre en broderie avec des motifs à la Berain, formés de rinceaux contournés, soutachés de bordures épaisses. Au-delà est aménagé un second jardin en terrasse constitué de deux parterres unis entourant un parterre quadrilobé. De part et d'autre s'alignent des arbres. La perspective devait se clore par un « mur d'appui et une balustrade de fer avec un obélisque en son milieu du côté de la rue des crais ». Un plan dressé le 20 germinal an III montre le jardin déjà simplifié avec le premier parterre bordé d'arbustes et la partie arrière plantée d'arbres en allées. 30. Pour cet hôtel et les deux hôtels Berbisey voir GIROUX (H.), « Quelques hôtels de Dijon », dans M.C.A.C.O., tome XXXI, 1978-1979, p. 277-315. 31. BEAUVALOT (Y.), « Le petit hôtel Berbisey (1761-1767) », Cahiers du Vieux Dijon , n° 1 à 4,1974.
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Actuellement l'espace est occupé partiellement par des constructions et des jardins sans rapport avec la composition initiale. Devant la façade, il n'y a plus qu'une simple pelouse. De l'obélisque, il ne reste plus que le socle, privé depuis 1987 des médaillons à l'effigie de Jean de Berbisey qui le décoraient. Les immeubles construits 29, et 31, rue Berbisey, non représentés par Mikel, ouvrent également sur des jardins composés de pelouses ombragées sur leur pourtour. L'hôtel de Ruffey (33, rue Berbisey) Édifié en 1752, il figure sur le plan de Mikel avec un parterre en broderie prolongé par une plantation d'arbres. Le jardin actuel, totalement à l'abandon, correspond au seul parterre en broderie.
FIG. 7. — Le Petit hôtel Berbisey et ses jardins en l'an III (B.M. Dijon, Estampes).
L'hôtel de Perreney-de-Charrey (6, place Bossuet)
D'après Mikel, cet hôtel donnait à l'arrière sur un parterre en broderie. Cet espace a été loti pour construire les immeubles bordant l'actuelle rue Michelet.
L'hôtel Fevret de Saint-Mesmin (8, place Bossuet) Le plan de Mikel le montre accompagné d'un parterre en broderie. Une gravure du xvme siècle32 en propose une vue à vol d'oiseau qui permet d'apercevoir l'extrémité de l'ovale d'un parterre en gazon avec des écoinçons plantés d'arbustes. Le procès-verbal de vente du 26 fructidor an IV à Pierre Jouvelot33 n'apporte pas d'éléments significatifs : on y mentionne que le jardin 32. GAILLARD (F.), « L'hôtel Févret de Saint-Mesmin », dans M.C.A.C.O., tome XXVIII, 1972-1973, p. 207-236. 33. Q 428.
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« est planté de quelques mauvais peupliers ». Un puits s'ouvrait dans le mur qui touchait au nord la propriété Perreney de Charrey, tandis qu'au midi un autre mur bordait l'orangerie des Fyot de Neuilly. Il subsiste encore une grande pelouse ovale ombragée de tilleuls, de peupliers et de marronniers sur le pourtour. L'hôtel de Lux (10, place Bossuet) II est accompagné, sur le plan de Mikel, d'un grand jardin composé de plusieurs parterres. L'emprise en a été peu modifiée, mais le dessin s'en est simplifié : ce n'est plus qu'une vaste pelouse agrémentée d'arbres divers (fruitiers, conifères, feuillus) et de massifs de fleurs. L'hôtel de Migieu (21, place Bossuet) II possède également un parterre en broderie en 1759. S'y est substituée une pelouse accompagnée de quelques arbres et arbrisseaux. L'hôtel Bouchu (1, rue Monge) II présente à l'arrière, sur le plan de Mikel, un parterre à quatre compartiments rectangulaires aménagé entre les ailes du bâtiment. Il est suivi de quatre autres, carrés, dont les angles abattus forment un demi-cercle du côté de la façade et un cercle au centre, puis d'arbres plantés sur deux rangées. Ce jardin a été agrandi et s'étend maintenant jusqu'à la rue du Gymnase. On y retrouve les grandes lignes de la composition du xvme siècle agrémenté d'un petit bassirLrond au centre. Quelques rosiers-tiges animent les parterres qu'ornaient encore, il y a quelques années, des buis taillés en boule. Au-delà se trouvent un cabinet de verdure, entourant une statue de femme avec un enfant, et une charmille. JARDINS ET PROMENADES PUBLICS
Le cours du Parc À l'instar des princes et des nobles, les villes cherchent des réalisations exemplaires. C'est ainsi qu'en 1671 le maire et les échevins, avec l'appui de l'intendant Bouchu, demandent à prélever 40 000 francs en cinq ans sur les octrois pour paver les rues et créer une promenade avec des arbres pour se mettre à couvert.
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Diverses lettres de Bouchu au prince de Condé permettent de suivre l'avancement du projet et sa réalisation. Le 5 août 1671 il écrit : « j'ay fait prendre les dimensions du cours qui sera l'une des plus belles choses qui se puisse voir : il aura 800 toises de long, l'allée du milieu 10 toises, les deux petites chacune 5 toises et les fossés 2 toises et demi... en sorte qu'au moys de may prochain, la ville de Dijon aura par la faveur de votre Altesse sérénissime la plus belle avenue de France et un cours de 800 toises de long et 200 pieds de large y compris les fossés »34. L'avenue prenait au sud de la place Saint-Pierre (actuelle place Wilson)35 En octobre 1671, un marché est passé avec le jardinier Dimanche Primard pour tracer l'avenue et y planter des tilleuls sur quatre rangs, ménageant des allées latérales36. L'entretien du cours est scrupuleusement assuré par la ville dont les délibérations, tout au long des xvme et xixe siècles, en fixent les conditions d'entretien et de gardiennage37. En effet la promenade est si fréquentée que la police de la ville doit intervenir en 1790 et placer des bornes de pierre aux deux extrémités des allées latérales — soit 32 bornes — pour empêcher les voitures à chevaux d'y accéder. Jusqu'en 1828 l'avenue bute, au nord, contre un fossé qui sera comblé lors de la démolition de la tour placée devant la porte Saint-Pierre. En 1865 on commence à niveler les fossés qui longent l'avenue, puis, en 1868, on crée le rond-point au centre duquel se trouve « une gerbe jaillissante »38. En 1924, la ville lui substitue le monument aux morts de la Grande Guerre dû aux sculpteurs Gasq, Piron, Dampt et Bouchard. Depuis une dizaine d'années, des travaux de restauration des plantations y sont effectuées. L'élargissement de la rue Chevreul et l'ouver34. CHABEUF (H.), « Notice sur Dimanche Primard, jardinier du prince de Condé à la Colombière », dans Mémoires de la Société Bourguignonne de Géographie et d'histoire, tome XI, 1895, p. VII-VIII. 35. Son entrée est marquée par deux majestueux piliers couronnés de vases à guirlandes, vestiges d'une porte de Dijon commandée en 1672 au sculpteur Jean Dubois et à l'architecte Clamonet. Ils portaient les armes du duc et de l'intendant de Bourgogne. Cf. GOIZET (P.), Étude centenale rétrospective sur Dijon, Dijon, Barbier-Marilier, 1899. 36. Archives municipales de Dijon, K 125, promenades, parc et cours du Parc. 37. Cf. note 34. 38. B.M., Estampes, Dijon, « Plan d'établissement d'une gerbe jaillissant et aménagement du rond-point du Parc ». « Plan d'aménagement du Parc et de la demi-lune d'entrée. »
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ture du boulevard Robert-Schumann, en y introduisant une circulation transversale, en ont toutefois fâcheusement rompu la paisible harmonie. La plupart des maisons qui bordent la promenade ont été bâties à la fin du xixe siècle ou au début du xxe siècle, quand le développement économique de la ville favorisait l'émergence d'une bourgeoisie aisée. Il y avait là des parcs privés et des terrains maraîchers. Entre 1970 et 1980 plusieurs immeubles modernes s'y sont substitués, entraînant la disparition de quelques-unes des constructions primitives. Aussi, les allées elles-mêmes étant classées depuis 193839, a-t-il fallu édicter des règles rigoureuses pour en protéger les abords. Le Parc de la Colombière Louis II de Bourbon, prince de Condé (le Grand Condé), avait acquis en 1649 le domaine de la Colombière pour en faire une résidence d'été. Mais il n'eut guère le loisir de s'en occuper, aussi est-ce son petit-fils, Henri-Jules, duc d'Enghien, qui en poursuivit l'aménagement. Il fit d'abord dessiner et planter le parc, puis construisit la maison de la Colombière sur l'autre rive de l'Ouche. On redressa alors et on canalisa le lit de la rivière qu'enjambait une passerelle. La conception en est inspirée par Le Nôtre qui envoya à Dijon un de ses meilleurs élèves, Antoine de Maerle40. Le parc est traité « à la française », selon les principes de perspective et de symétrie chers au maître. Seize allées, huit larges et huit étroites, rayonnent à partir d'un rond-point central établi au cœur du parc, dans la perspective de la façade du Castel. Elles sont elles-mêmes reliées entre elles par une allée octogonale contournant le bois et butent sur deux mails limitant le parc de part et d'autre. D'après un plan attribué à Le Nôtre étudié par Henri Chabeuf41 il n'y avait en taillis et futaie que la partie centrale délimitée par l'allée octogonale. Tout autour s'étendaient des gazons et des cultures ; le long de la rivière étaient tracés des parterres en broderie. Il est intéressant de comparer le détail de ces parterres42 avec ceux dessinés par Le Nôtre pour les Tuileries, à Paris, son jardin préféré. On retrouve exactement les mêmes éléments en trapèze et d'autres en car39. Mémoires de l'Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Dijon, séance du 27 juin 1945. 40. CHABEUF (H.), « Documents inédits sur le Logis de roi et le Palais des États », dans M.C.A.C.O., tome XIII, 1895-1900, p. 69-90. 41. Recueil des dessins et plans de Mansart, premier architecte du Roy, année 1688, R.IV. 15, n° 10, Paris, bibliothèque de l'Université. 42. B.M., Estampes, Dijon, Portefeuille Promenades et Jardins.
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F i e 8. — Plaiti du parc de la Colombière en 1682 (B.M. Dijon, Estampes).
FiG. 9. — Projet pour le parc de la Colombière (B.M. Dijon).
touches oblongs à petits côtés cintrés. L'art des jardins reprend le même vocabulaire que celui utilisé pour les panneaux de meubles. Les plantations alors prévues sont fort variées. En marge du plan de 1682, les essences sont précisées : épicéas, ifs, chèvrefeuille, soleil vivace, lilas. En 1683, 10 milliers de charmilles, 500 bottes de buis, 100 tilleuls sont plantés ; l'année suivante, 8 000 charmes et 200 lilas ; en 1685,140 épicéas et 140 ifs**. Quand le parc est achevé, le prince de Condé en concède le libre accès aux Dijonnais. Au moment de la Révolution il est confisqué comme propriété de la famille de Condé. La ville s'y intéresse : l'adjoint au maire expose au préfet son utilisation possible : outre son agrément, on pourrait y créer une école de natation et d'équitation. Il demande donc au gouvernement d'en favoriser l'aliénation. Celle-ci est autorisée par la loi du 9 flo43. THACKER (Th.), L'histoire des jardins, Paris Denoël, 1981, p. 145.
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réal an IX et la vente est réalisée le 25 ventôse an IX pour une superficie de 33 hectares, 23 ares, 22 centiares44. L'architecte-voyer de Dijon, Caumont, élabore alors divers projets. Un plan partiel regroupe un plan dressé pour l'Arquebuse en mai 1804 et un plan du parc, curieusement daté d'août 1816 car il ne fait pas état du plus notable changement intervenu : en 1811, le préfet a fait tracer d'autorité une allée cavalière elliptique servant d'hippodrome, sans consulter la municipalité. Le 6 mai 1811 le conseil municipal s'était réuni pour manifester sa désapprobation. En vain. L'allée avait été percée au mépris du plan de Le Nôtre. Des ifs séculaires avaient été remplacés par du gazon. Ces ravages s'ajoutaient à une catastrophe naturelle qui s'était abattue sur le parc : en 1807, un ouragan avait brisé plus de 600 arbres. Les ifs, du moins ceux illustrant l'art topiaire, ne furent pas regrettés par tous puisque Fyot de Mineure, en 1817, écrivait à leur propos : « au bout de la principale allée on trouvait, il y a quelques années, une vaste collection de pions, bonnets carrés ou pyramides, ou, pour s'exprimer plus clairement, d'ifs qu'on avait forcés de prendre cette forme »45. Autre étape en 1821 : la piste cavalière n'étant pas utilisée, on imagine de la simplifier et d'en faire un cercle. Un plan de Caumont fils, en novembre 182146, donne « le projet de rétablissement des allées du parterre de gazon, d'une grande allée ronde autour de l'elliptique dite hippodrome, ainsi que les bosquets ou massifs et allées latérales, avec la construction de deux bassins qui seraient toujours remplis d'eau courante et meublés de poissons dorés à l'instar de ceux du jardin des Tuileries ». Le projet ne fut pas totalement réalisé : seules les modifications de plantations intervinrent par la suite. On planta une partie des espaces autrefois en gazon, puis des sapins parmi les gazons. La futaie se développa et le parc devint « indiscipliné ». En 1843, l'entrée vers la ville reçoit la grille et les pavillons de l'ancien octroi de la place Saint-Bernard. Réalisé par Caumont en 1827, initialement placé au jardin Darcy, le cadran solaire, copie d'un modèle du xvie siècle, est installé face au Castel de la Colombière en 1854. Il sera restauré en 1980. En 1912, la ville achète les bâtiments de la Colombière et les prés voisins pour protéger la perspective de l'allée centrale. Classés Monuments historiques en 1925, le parc et le domaine font 44. Q 430. 45. FYOT DE MIMEURE, Notice inédite sur la ville de Dijon, ses environs et quelques autres villes de l'ancienne Bourgogne, Dijon-Paris, 1817. 46. B.M., Estampes, Dijon, portefeuille Parcs et Jardins.
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l'objet de l'attention vigilante de la ville, ainsi que de l'Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres et de la Commission des antiquités de la Côte-d'Or qui émettent un vœu de remise en état du cours et du parc malmenés par l'occupation militaire et les faits de guerre47. Elles suggèrent le sablage des allées rayonnantes pour montrer aux visiteurs le dessin initial, le repérage des vestiges de la voie romaine qui y est visible et le remplacement des sapins qui dépérissent au fond du parc par un parterre à la française proche de la conception originelle. En 1965, le chanoine Kir fait remonter dans le parc le temple d'Amour du xvne siècle provenant du château de Bierre-les-Semur, classé Monument historique en 1946. La dégradation du bois, peu entretenu pendant des décennies, nécessite, à partir de 1978 une véritable cure de jouvence poursuivie depuis chaque année. Frappés notamment par la maladie des ormes, les arbres ont été renouvelés et toutes les allées restaurées. Avec ses 6 000 arbres, surtout des feuillus (tilleuls, marronniers, chênes, charmes, frênes, érables), la Colombière est redevenue un lieu de promenade apprécié des Dijonnais : une vaste pelouse occupe l'axe médian et débouche sur une aire de jeux et d'enclos animaliers créés en 1970. De nombreux bancs évoquent le style « chimère ». Un des commentaires les moins connus sur le parc a été écrit par Henry James48. L'Arquebuse Ce nom désigne actuellement tout un ensemble englobant le jardin botanique, un arboretum, un parc et les bâtiments du musée d'histoire naturelle. C'est en 1543 que les chevaliers de l'Arquebuse s'installèrent sur le terrain communal de la Saussaye. Le plan de Bredin fait figurer la piste des arquebusiers dans l'axe d'un petit bâtiment à arcades. Ils purent ensuite construire là des bâtiments à la mesure de la prospérité de leur compagnie : ainsi s'édifia, à partir de 1608, un long corps de logis flanqué de deux pavillons en retour d'équerre vers le jardin. À l'origine le rez-de-chaussée formait une galerie à arcades de 70 m de long, peut-être héritée de l'édifice primitif. « On arrivait à l'Arquebuse par une avenue rectiligne, bordée d'une triple rangée de marronniers et qui s'élargissait en demi-cercle devant la façade49. » Le portail avec fronton aux armes de France date de 1710. 47. Cf. note 39. 48. JAMES (H.), A little tour in France, Paris, R. Laffont, 1987. 49. FYOT (E.), Dijon. Son passé évoqué par ses rues, Dijon 1928.
JARDINS DE DIJON
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Le dernier capitaine de la compagnie, Marc-Antoine Chartraire de Montigny, fit restaurer, à ses frais, jardins et bâtiments. Il fit appel à son architecte habituel, Saint-Père. En 1783, il ajouta aux pavillons deux terrasses formant portique, desservies par de majestueux escaliers, et des fontaines décoratives furent plaquées contre la façade du rez-dechaussée. Il voulut aussi transformer le jardin et fit venir de Lyon un jardinier connu, Morel50, qui le remodela dans le style anglais alors en vogue : le canal rectiligne fut supprimé au profit d'une pelouse bordée de bosquets, de chaque côté furent aménagées des pistes de tir et, le long de celles-ci, furent montées cinq logettes de marqueurs faites d'éléments des petits cloîtres de la Chartreuse que l'on démolissait. Lors de la Révolution, terrains de jeux et bâtiments devinrent biens nationaux que l'État concéda gratuitement à la ville en 1808. On peut suivre l'évolution du jardin depuis un plan dressé en 176051 jusqu'à celui de 1804 établi par l'architecte voyer52, Caumont, qui fait état des transformations antérieures. En 1817, Fyot de Mimeure53 en donne la description suivante : « Ce jardin dessiné dans toute la rigueur de l'école de Le Nôtre, n'était composé que de simples allées parallèles, séparées par une pièce d'eau. Au fond se trouvait un arbre vénérable encore. Planté en 1609, il semblait dominer sur tout ce qui l'entoure comme il a dominé sur les siècles. » Ce gigantesque peuplier, objet de nombreuses lithographies, fut abattu après une tempête en 1917. En 1833, le jardin botanique, fondé par Legouz de Gerland en bordure des allées de la Retraite, est transféré à l'ouest du terrain de l'Arquebuse, tandis que la galerie du rez-de-chaussée est murée ; le mur le séparant du jardin de l'Arquebuse proprement dit est abattu et deux logettes sont déplacées. On dessine alors les canaux avec des ponts rustiques. En 1855 Jean-Baptiste Bachet, voyer de la ville, dresse le plan de l'Arquebuse et du jardin des plantes, avec, en marge, une description des plantations54. L'ensemble juxtapose alors le style paysager, dans ses parties d'agrément, et une ordonnance stricte de parterre pour le jardin botanique. La première partie comporte environ 600 feuilius et une centaine de conifères, des massifs de fleurs, un théâtre de verdure, une 50. Cf. ci-dessus, p. 00. 51. Archives municipales de Dijon, H 35 à 38 bis, Arquebuse. 52. B.M., Estampes, Dijon, chemise Arquebuse : « Plan partiel regroupant le parc de Dijon, la fontaine de l'Arquebuse, dressé en 1804 par Caumont pour l'Arquebuse ». 53. Cf note 45. 54. B.M., Estampes, Dijon, chemise Arquebuse : « Plan de l'Arquebuse et du jardin des plantes ».
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FIG. 10. — L'Arquebuse vers 1760 d'après le grand plan de la Chartreuse (Arch. munie, Dijon, SU).
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