Le caractère d`une école

January 14, 2018 | Author: Anonymous | Category: Arts et Lettres, Architecture
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Le caractère d’une école

Comment discerner la fonction d’un bâtiment contemporain?

Etudiante : Franca Riva Responsable énoncé théorique : Prof. Bruno Marchand Directeur pédagogique : Prof. Luca Ortelli Maître EPFL : Barbara Tirone Enoncé théorique, MA Architecture EPFL, Janvier 2010

Table des matières

Introduction : apparence et contenu Questionnement et démarche Le caractère en architecture 

Quatremère de Quincy : sentiments correspondants Adolf Loos : l’émotion juste et le contexte urbain Venturi & Scott Brown : le symbolisme en architecture Martin Steinmann : la forme forte Prise de position

5 7 9

9 11 12 13 14

Types d’écoles dans le passé Maison de commune

19

La grande école urbaine L’école progressiste et fonctionnaliste L’école pavillonnaire Groupe scolaire Changements programmatiques, spatiaux et expressifs

19 21 22 23 23 25

Description des exemples d’écoles contemporaines

27

Evaluation et interprétation

51

Conclusion et hypothèses de projet Bibliographie et crédits iconographiques

63 67



1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8.



Ecole Volta Les Ouches Leutschenbach Vella Villa Thérèse Vers l’Eglise Les Tuillières Collombey

Absence d’inscriptions connotatives La grande fenêtre et le préau couvert comme seuls symboles scolaires Traitement de l’entrée Dégagement et clôture des terrains scolaires Le grand volume et la valorisation de l’unité Lieu et intégration au contexte Bâtiments simples Cas particuliers

28 31 34 36 39 42 44 47

51 52 54 55 56 58 59 60

3

Fig. 1 Jacques Tati, Mon oncle, 1958 4

Fig. 2 Jacques Tati, Mon oncle, 1958

Introduction : apparence et contenu

Dans son film Mon oncle Jacques Tati présente une école et l’usine Plastac comme deux bâtiments qui ont le même caractère. Ou pourrait-on dire, qui n’ont pas de caractère du tout. Les deux constructions banales affichent seulement l’inscription école ou plastac ainsi que quelques éléments typiques qui indiquent de quel genre d’édifice il s’agit. Pour Tati visiblement l’architecture contemporaine n’est plus capable de donner une identité spécifique aux bâtiments qu’elle produit. Bien que Mon Oncle date de 1958, le film provoque des questions qui sont toujours d’actualité. Quelle est la relation entre l’apparence d’un bâtiment et sa destination ? Quels messages et quelles émotions l’architecture contemporaine veut-elle transmettre par rapport à une certaine fonction ? Comment le bâtiment peut-il informer sur sa fonction ? Ce travail veut discuter toutes ces questions à partir du thème de l’école. Ce choix vient de l’importance de l’école comme lieu collectif dans chaque village ou quartier, et du fait qu’il s’agit d’une institution publique dont tout le monde a une expérience personnelle. De plus, l’image de l’école dans la société ayant changé considérablement dans le temps, il est intéressant de voir comment ce type de bâtiment change de caractère. En Suisse, depuis les années trente du vingtième siècle la construction scolaire étant soumise à une procédure de concours1, une certaine qualité architecturale des bâtiments scolaires est assurée. L’école va en outre être le thème de mon travail de master auquel cet énoncé sert comme base théorique. Les conclusions tirées de ce mémoire fourniront les hypothèses pour le projet d’architecture. 1 Oberhänsli, This, Vom Eselstall zum Pavillonschulhaus, Volksschulbauten anhand ausgewählter Luzerner Beispiele zwischen 1850 und 1950, Luzern : Kommissionsverlag Reaber Bücher AG, 1996, p. 223. 5

Questionnement et démarche

La question principale du mémoire est  : Quel est le caractère d’une école contemporaine en Suisse ? Il s’agit d’abord de définir ce qu’est le caractère en architecture ainsi que les éléments importants pour son affirmation. Ensuite, un survol des différents types d’édifices scolaires dans le passé permet de mettre en avant les continuités et les changements dans l’image de l’école publique. La partie centrale du mémoire consiste dans l’analyse de huit écoles primaires et secondaires en Suisse, construites entre 1997 et 2007. Les outils d’analyse sont les photos de la visite des bâtiments ainsi que plans, textes et images des publications. Un tableau synoptique en annexe rassemble les éléments pertinents à la détermination du caractère de chaque école. À la description des bâtiments suit une évaluation générale qui permet d’identifier les éléments récurrents de ces écoles ainsi que l’image qu’elles donnent de cette institution. Vu l’échantillon limité, il n’est cependant pas possible de faire des assertions générales sur les écoles. Un regard critique permet de formuler des hypothèses sur lesquelles pourra se fonder le projet d’architecture développé par la suite.

7

Le caractère en architecture

Le mot caractère vient du grec kharakter qui signifie empreinte1. Le dictionnaire Larousse le définit comme « marque distinctive », « aspect particulier » et « aspect typique » d’une chose ou d’une personne. En architecture, quand on parle de caractère d’un édifice, on se réfère « à la capacité [de l’édifice] à exprimer un programme, à informer sur sa destination »2. La notion de caractère ainsi que l’importance qui est attribuée à la capacité d’expression d’un bâtiment varie selon les époques et les architectes. Nous nous attaquons maintenant à transcrire cette variation en étudiant la position de certains architectes théoriciens qui apparaissent comme les plus importants à ce sujet.

Quatremère de Quincy : sentiments correspondants Dès le xvie siècle, c’étaient les ordres qui servaient à exprimer des qualités liés au programme d’un édifice3. Mais la grande diversification des programmes de l’architecture publique développée au xviiie siècle augmente la gamme de sensations devant être exprimées par les bâtiments, et par conséquent, les ordres ne sont plus considérés comme suffisants en tant que seuls instruments d’expression. C’est à ce stade que l’on commence à parler de caractères, et beaucoup d’architectes – Germain Boffrand, Jacques-François Blondel, Le Camus de Mézières, Etienne-Louis Boullée, pour nommer les plus impor1 Larousse encyclopédie, URL : http://larousse.fr/encyclopedie/nom-commun-nom/caractère/30686 (consulté le 21 décembre 2009). 2 Soubeyrand, Paule, [UE-L/Dessin d’architecture au siècle des lumières : Boullée, Ledoux et Lequeu], Lausanne : epfl, 2009, p. 80. 3 Szambien, Werner, « Caractère » in Symétrie, goût, caractère, Théorie et terminologie de l’architecture à l’âge classique 1550-1800, p. 174 - 199, Paris : Picard, 1986, p. 176. 9

tants – écrivent des textes à ce sujet sans pour autant donner une définition du mot caractère. Chacun a une compréhension un peu différente du terme. Le caractère peut désigner les émotions qu’un édifice éveille comme aussi les traits particuliers d’un bâtiment d’une certaine destination. Le premier à donner une véritable définition du terme caractère en architecture est Antoine Crysostôme Quatremère de Quincy4. Dans son Encyclopédie méthodique parue en 1788 il dédie un long article au sujet du caractère en architecture5. Il distingue quatre formes de caractère dont les deux premières se réfèrent aux constructions historiques et les deux dernières à la contemporanéité. Le caractère distinctif est la qualité dominante de l’architecture de chaque peuple  ; c’est la légèreté pour l’architecture chinoise, la pesanteur pour celle des égyptiens, la grâce pour l’architecture grecque, le luxe pour celle des romains6. La présence du caractère essentiel est une qualité positive pour un bâtiment. Ce caractère exprime la solidité et la grandeur d’une architecture. On le retrouve surtout chez les Grecs, mais on peut l’obtenir par l’utilisation de l’ordre dorique et la symétrie7. Les caractères présents dans les édifices contemporains de l’époque sont le caractère relatif idéal qui incarne la poésie dans l’architecture et que seul les génies sont capables de produire et le caractère relatif imitatif qui donne à un type de bâtiment l’expression qui lui convient. Ce dernier dépend des règles qui déterminent les caractères adéquats pour chaque type d’édifice et qui sont indiqués dans l’Encyclopédie méthodique. Plus tard, en 1832, dans sont texte Dictionnaire historique de l’architecture, Quatremère de Quincy écrit de nouveau un article au sujet du caractère. Ici l’architecte donne des règles pratiques. « Le caractère entendu comme synonyme de propriété indicative de ce qu’est l’édifice et de ce qu’il doit paroître [...]8 ». La tâche de l’architecte est d’un côté d’identifier les « qualités » et les « idées

4 5 6 7 8 10

Szambien, idem, p. 184. Encyclopédie méthodique, p. 477 - 518, in Szambien, idem, p. 184. Idem, p. 185. Idem, p. 186. Idem, p. 198.

spéciales »9 à l’usage d’un édifice, et de l’autre de mettre en œuvre les bons moyens pour provoquer des sentiments correspondants. Quatremère précise les moyens qui permettent d’attribuer du caractère à un bâtiment : ce sont les formes, les ornements et les matériaux10.

 dolf Loos : l’émotion juste et le contexte urbain A Quand Adolf Loos écrit dans les articles Das prinzip der bekleidung en 1898, et onze ans plus tard dans Architektur sur ce qui concerne la relation entre le contenu d’un édifice et son apparence, il se sert des deux termes wirkung11 et stimmung12, donc de l’effet et de l’émotion d’un édifice. L’effet et l’émotion d’un édifice doit correspondre à sa destination. La provocation de l’émotion juste pour un certain bâtiment est une tâche majeure de l’architecte. Die architektur erweckt stimmungen im menschen. Die aufgabe des architekten ist es daher, diese stimmung zu präzisieren. Das zimmer muss gemütlich, das haus wohnlich aussehen. Das justizgebäude muss dem heimlichen laster wie eine drohende gebärde erscheinen. Das bankhaus muss sagen: hier ist dein geld bei ehrlichen leuten fest und gut verwahrt.13  L’architecture éveille des émotions dans l’homme. La tâche de l’architecte est de préciser cette émotion. La chambre doit être chaleureuse, la maison confortable. Le palais de justice doit apparaître comme un geste menaçant au vice clandestin. La banque doit dire : ici ton argent est bien gardé par des gens honnêtes.14

Dans l’article Das prinzip der bekleidung, Loos dit que l’architecte doit en premier lieu penser à la wirkung qu’il veut produire pour un certain programme et seulement ensuite concevoir l’espace correspondant. Les moyens pour

9 Ibidem. 10 Ibidem. 11 Loos, Adolf, « Das prinzip der bekleidung » (1898) in Ins leere gesprochen, Gesammelte Schriften 1897 - 1900, Vienne : Georg Prachner Verlag, 1997 [1921], p. 140. 12 Loos, Adolf, « Architektur » (1909) in Trotzdem, Gesammelte Schriften 1900 - 1930, Vienne : Georg Prachner Verlag, 1997 [1931], p. 102. 13 Idem, p. 102 - 103. 14 Traduit par Franca Riva. 11

produire la wirkung sont la forme et le matériau15. Loos précise deux possibilités dont l’architecte peut se servir pour produire des émotions. L’une est celle où les caractéristiques d’une architecture sont intrinsèques au programme. Loos donne ici l’exemple d’une colline pyramidale en terre de six pieds de long et trois pieds de large qui inspire le sérieux car nous savons qu’il s’agit d’une tombe16. L’autre possibilité renvoie à des expériences du passé. L’architecte peut réussir à produire des émotions quand il renoue avec l’architecture du passé. En s’inspirant d’architectures par le biais desquelles les gens ont déjà vécu une certaine émotion, l’architecte peut reproduire cette émotion dans un nouveau bâtiment. Il s’agit donc d’éléments qui par convention à l’intérieur d’une culture donnée sont liés à des émotions. Loos donne l’exemple de la couleur symbolique du deuil qui est le noir chez nous et le blanc chez les chinois17. Dans un autre texte, Zwei aufsätze und eine zuschrift über das haus auf dem Michaelerplatz, Loos parle de caractère en architecture quand il s’agit de la relation d’un bâtiment à son contexte urbain18. Le baucharakter eines ortes est ce qui est distinctif dans l’architecture de chaque ville et même de chaque quartier. L’architecte devrait respecter ce caractère dans l’utilisation des matériaux et des formes. Pour Loos, le choix des matériaux et des formes dépend donc non seulement du programme mais aussi du lieu.

Venturi & Scott Brown : le symbolisme en architecture Dans leur livre Learning from Las Vegas Robert Venturi & Denise Scott Brown utilisent le terme symbolisme pour designer la communication travaillant par allusion entre forme et contenu19. Ils distinguent trois types d’énoncés pour les bâtiments contemporains, à 15 16 17 18

Loos, Adolf, « Das prinzip der bekleidung » op. cit., p. 140. Loos, Adolf, « Architektur » op. cit., p. 103. Ibidem. Loos, Adolf, « Zwei aufsätze und eine zuschrift über das haus auf dem Michaelerplatz » (1910) in Trotzdem, op. cit., p. 111. 19 Venturi, Robert, Scott-Brown, Denis, et Izenour, Steven, Learning from Las Vegas: The Forgotten Symbolism of Architectural Form, Cambridge : The mit Press, 1977 [1972], p. 7. 12

savoir le civique, le commercial et le résidentiel20. Pour eux, il existe dans l’architecture deux possibilités pour transmettre une signification. D’une part, les moyens connotatifs qui sont reconnaissables dans le caractère physionomique des éléments architecturaux et qui transmettent le sens général (p. ex. bâtiment public). D’autre par des moyens dénotatifs, à savoir les symboles - des éléments familiers ou des inscriptions - qui expriment des significations concrètes (p. ex. école primaire). Denotation indicates specific meaning ; connotation suggests general meaning. [...] Generally, to the extent that it is denotative in its meaning, an element depends on tis heraldic characteristics ; to the extent that it is connotative, an element depends on tis physiognomic qualities.21 

Pour produire une architecture riche, il faudrait se servir des deux moyens. Comme Loos, Venturi & Scott Brown se réfèrent à la capacité évocatrice de l’expérience partagée pour transmettre des significations connotées à un élément architectural. Pour des nouveaux bâtiments, il faut utiliser des matériaux et des éléments de l’architecture existante pour provoquer des associations. Les deux architectes donnent l’exemple de la fenêtre pour illustrer la qualité symbolique et expressive d’un élément architectural22. La forme de l’ouverture et l’apparence du mécanisme d’ouverture dénotent la fenêtre en tant que telle – et en distinction avec une ouverture quelconque. Sa simplicité et son arrangement sur la façade connotent le résidentiel et l’ordinaire. Leur manière de véhiculer des sensations passe moins à travers la forme et les matériaux, que par des éléments tels la fenêtre, l’entrée, la façade, le décor.

Martin Steinmann : la forme forte La question de la relation entre l’apparence d’un édifice et sa destination trouve également une grande importance dans les textes de Martin Steinmann. Dans le texte La leçon des choses Steinmann utilise le terme caractère comme

20 Idem, p. 130. 21 Idem, p. 101.. 22 Idem, p. 129. 13

l’expression convenable d’une architecture23. Pour savoir ce qui est convenable pour une architecture, il faut se référer à des expériences déjà faites. Dans le texte La forme forte Steinmann affirme que la signification d’un bâtiment est véhiculée par sa forme : « tout ce que les objets peuvent transmettre comme signification est lié à leur forme24 ». La forme possède deux niveaux de communication  : celui des signes et celui des lois de la perception. La communication par signes nécessite une convention qui fixe le signifiant et le signifié. Il s’agit donc d’un processus artificiel lié à une culture donnée. La communication qui se fait uniquement par le biais de la perception dépend des propriétés physiques d’une forme telle sa dimension ou sa couleur. Par les propriétés générales, les formes véhiculent des « sensations primaires25 ». Ces dernières sont plus « naturelles » que des signes conventionnels et par conséquent elles touchent tous le monde indépendamment du milieu culturel. La forme forte est la forme dont l’expression basée sur les sensations primaires, est en harmonie avec la signification d’un bâtiment. La signification étant un niveau de sa fonction, la forme forte est ainsi évocatrice de la fonction d’un édifice26.

Prise de position Nous avons vu que les différents auteurs n’utilisent pas tous de la même manière le terme caractère. Pour Quatremère de Quincy, il est au centre de l’attention de tout un article. Pour Loos le caractère est en lien avec le contexte bâti d’un édifice. Venturi & Scott Brown et Steinmann quant à eux, se servent du mot qu’occasionnellement. Ce qui est commun à tous est qu’ils s’intéressent à la capacité de l’architecture à préparer l’observateur au contenu d’un édifice. Ils proposent cependant des moyens et des manières différents

23 Steinmann, Martin, « La leçon des choses » in Forme forte : écrits 1972 - 2002, Lucan, Jacques et Marchand, Bruno (éd.), Basel : Birkhäuser 2003, p. 176. 24 Steinmann, Martin, « La forme forte » in Forme forte : écrits 1972 - 2002, op. cit., p. 180. 25 Idem, p. 197. 26 Ibidem. 14

pour ce faire. Les moyens sont la forme et le matériaux, éventuellement les ornements. Venturi & Scott Brown y rajoutent les éléments symboliques et les inscriptions. Deux manières de transmission sont alors possibles  : les moyens évoqués peuvent avoir un effet direct sur l’observateur ou un effet indirect, en passant par l’association basant sur des expériences vécues. Le passage par associations se base sur les conventions d’une entité culturelle. Toutefois, il n’est pas dit que tout le monde a les mêmes associations, voire émotions avec un certain élément architectural. Pour éluder ce problème, les architectes, comme Steinmann, aimeraient trouver des possibilités d’atteindre les gens directement par les propriétés physiques des éléments architecturaux. Il reste pourtant à prouver qu’il existe vraiment des lois de la perception qui sont indépendantes de la culture. Dans des textes contemporains sur l’architecture, le terme caractère apparaît peu souvent. Quand je parlerai de caractère par la suite, j’utilise ce terme comme l’expression qui convient à un bâtiment d’une certaine destination. Pour évaluer le caractère d’un bâtiment il faut prendre en compte les différents moyens qui sont déterminants. En me basant sur les théories évoquées plus haut, pour les bâtiments contemporains j’estime que ce sont surtout la forme et les matériaux, éventuellement le décor et les éléments symboliques ainsi que l’emplacement qui sont relevants. Pour déterminer le caractère d’un bâtiment, il s’agit d’un côté d’identifier la capacité expressive des moyens utilisés, donc de déterminer les sensations qu’ils éveillent et l’image qu’ils donnent d’un bâtiment et de son programme. D’un autre côté, il sera important de voir quelles sont les parties récurrentes dans un bâtiment d’un certain programme – contemporain ou plus ancien – et qui pourraient agir comme symboles ou au moins comme éléments associatifs. Il paraît que la question de la relation entre contenant et contenu n’a pas perdu d’importance aujourd’hui, mais qu’elle a changé de registre. Comme Judit Solt l’affirme, la communication s’est déplacée d’un niveau intellectuel à un niveau de plus en plus uniquement émotionnel27. Une raison qu’elle donne pour cela est le fait que dans notre société pluraliste il n’existe plus de valeurs 27 Solt, Judit, « Verstand und Gefühl, Architektur als Zeichen und Körper », Archithese, n° 3, 2001, p. 8. 15

et de conventions partagées par tout le monde. Le manque de conventions a pour conséquent que le seul moyen de véhiculer encore des messages est celui qui passe directement par les matériaux et les formes en se servant des lois de la perception et qui est indépendant de la culture et l’éducation d’une personne. L’absence d’idées abstraites, telles des formes d’organisation de société, implique que les différents programmes n’aient plus un fond idéologique en fonction duquel les bâtiments pourraient se positionner. Personnellement, il me semble que les hypothèses de Solt ont une certaine justesse, mais concrètement, j’aimerais rajouter quelques réflexions. Je pense qu’il y a bien encore des valeurs idéologiques partagées par tout le monde comme par exemple la démocratie, l’égalité des chances et autres. Pourtant, il s’agit évidemment de thèmes difficiles à transmettre. Pour ce qui concerne le mode de communication il reste à voir quel est le plus efficace. Bien qu’il est recevable que les messages émotionnels passant le plus directement par les matériaux et les formes atteignent le plus grand nombre de gens, il est cependant douteux que par ce moyen seul une grande diversité de messages différents puissent être communiquée.

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Types d’écoles dans le passé

Le bâtiment scolaire hébergeant l’école publique a considérablement changé d’apparence depuis son essor jusqu’à aujourd’hui. Suivant les idéologies politiques, sociales, pédagogiques et architecturales, différents types de bâtiments se sont développés au fil du temps. Ces types sont plus ou moins attribuables à une époque, mais pas toujours ; l’utilisation d’un type ou d’un autre dépend aussi de la situation urbanistique et la taille de l’école. Faute d’un classement existant de types pour ce qui concerne l’apparence des écoles, j’ai établi moi-même une série de types qui se distinguent dans leur caractère, se basant principalement sur un classement typologique établi par This Oberhänsli et un classement chronologique conçu par Geneviève Heller et Marianne Fornet.

Maison de commune A l’essor de l’enseignement public au xviiie siècle, il n’existe pas de type de bâtiment destiné uniquement à l’éducation1. Les salles de classe sont logées ensemble avec d’autres fonctions communales dans le bâtiment public du lieu. Souvent y sont réunies une ou deux salles de classe, une chapelle, l’habitation du régent, la salle communale, la fromagerie, le four, la forge et les pompes. Les salles de classe ne sont pas des pièces spéciales. Depuis l’extérieur, les bâtiments ne diffèrent pas fondamentalement des habitations même si quelques-uns présentent une véritable composition de façade. Parfois ces bâtiments sont pourvus d’un clocher avec horloge et l’enFig. 3 Maison de commune, Bofflens, 1795 (les deux chambres d’école se trouvent au rez-de-chaussée)

1 Heller, Geneviève, et Fornet, Marianne, La cage dorée, de la chambre d’école au groupe scolaire, Deux siècles d’architecture vaudoise, Chapelle-sur-Moudon : Edition Ketty & Alexandre, 1997, p. 21. 19

trée est marquée par un encadrement soigné et des inscriptions. Au début du xixe siècle on commence à critiquer la proximité de locaux avec des fonctions disparates qui se gênent mutuellement. Par conséquent l’école partage dès lors le bâtiment seulement avec l’habitation du régent, la salle communautaire, éventuellement la gendarmerie ou la fromagerie.

Volume simple avec clocher A partir des années 1830, les législations de plusieurs cantons définissent clairement les établissements scolaires, leur taille et la disposition des salles2,3. Les écoles sont dès lors des bâtiments spécifiques, comprenant uniquement les salles de classe et l’habitation du maître. Les bâtiments sont dessinés par des architectes et approuvés par le Conseil de l’instruction publique. Ils se distinguent fortement des autres bâtiments publics comme la forge, la fromagerie, etc., qui sont des établissements utilitaires. En contraste, les écoles deviennent des bâtiments représentatifs des communes et du pouvoir public cantonal qui en voit un « instrument pour le développement économique et politique4 ». On rencontre ces bâtiments de taille modérée le plus souvent dans la campagne. Ces volumes simples se distinguent surtout par un clocher avec horloge et l’entrée noble au milieu ainsi que par des sanitaires en saillie à l’arrière du bâtiment5. Le nombre d’étage varie selon la taille de l’école, généralement il est de deux à trois. La plupart des bâtiments ont une distribution centrale avec une classe de part et d’autre. L’étages supérieur est en général destiné aux logements du maître et de la maîtresse d’école. Les bâtiments de ce genre expriment la dignité et la solidité par leur façades symétriques, les encadrements et les chaînages en pierre. Le clocher est un 2 Idem, p. 33. 3 Schneeberger, Elisabeth, Schulhäuser für Stadt und Land, Der Volksschulbau im Kanton Bern am Ende des 19. Jahrhunderts, Bern : Historischer Verein des Kantons Bern, 2005, p. 15. 4 Heller, Geneviève, et Fornet, Marianne, La cage dorée, de la chambre d’école au groupe scolaire, Deux siècles d’architecture vaudoise, op. cit., p. 37. 5 Schneeberger, Elisabeth, Schulhäuser für Stadt und Land, Der Volksschulbau im Kanton Bern am Ende des 19. Jahrhunderts, op. cit., p. 95. 20

Fig. 4 Ecole de Villars-Mendraz, JeanPierre Jaton, 1844

élément fonctionnel des bâtiments scolaires mais attribue à ces édifices aussi une prééminence sur leurs voisins et constitue un symbole du pouvoir institutionnel emprunté des églises.

Fig. 5 Grosses Länggassschulhaus, Berne, Eugen Stettler, 1891

La grande école urbaine L’augmentation de la population dans les villes pendant la deuxième moitié du xixe siècle a pour conséquence la construction de grandes écoles urbaines6. C’est aussi dans cette période, en 1874, que la Confédération impose la gratuité de l’école et la neutralité religieuse7, sans pour autant réglementer la construction scolaire. Ce sont des recommandations hygiéniques qui ont des répercussions considérables sur la disposition et la taille des espaces. Surtout l’ensoleillement et une ventilation suffisante sont importants, mais aussi les soins corporels. Ceci mène à une augmentation de la taille des fenêtres et au développement d’une typologie où les salles des classe sont disposées plutôt au sud, tandis que les distributions et les sanitaires sont placés au nord. En plus des innovations concernant taille et disposition des différentes parties, de nouvelles fonctions s’ajoutent au programme de l’école. Ce sont les préaux pour la récréation à l’extérieur, les salles pour l’exercice physique à l’intérieur et les bains. Les salles pour l’exercice physique et les bains sont souvent disposés dans un rez inférieur. Les grandes écoles urbaines font partie des extensions des villes à cette période et sont souvent placées en limite des centres médiévaux8. Il s’agit de bâtiments de grande taille avec la symétrie axiale très prononcée qui présentent des parties en saillie et en retrait. Au-dessus du rez inférieur habité se dresse un rez supérieur auquel mène un grand escalier d’entrée qui devient 6 Heller, Geneviève, et Fornet, Marianne, La cage dorée, de la chambre d’école au groupe scolaire, Deux siècles d’architecture vaudoise, op. cit., p. 53. 7 Schneeberger, Elisabeth, Schulhäuser für Stadt und Land, Der Volksschulbau im Kanton Bern am Ende des 19. Jahrhunderts, op. cit., p. 24. 8 Mestelan, Patrick, «  La construction scolaire des années vingt et trente, L’adéquation rationnelle aux nouveaux programmes », in Charollais, Isabelle, et Marchand, Bruno (éd.), L’architecture de la raison, La Suisse des années vingt et trente, p. 90 - 123, Lausanne : Presse polytechnique et universitaire romande, 1991, p. 97. 21

une caractéristique formelle de beaucoup d’écoles de la fin du xixe siècle, en plus des étages hauts et des grandes fenêtres. Par sa grandeur, des éléments en pierre de taille et son emplacement prestigieux, la grande école urbaine représente la solidité de l’institution école publique et son importance pour l’état.

L’école progressiste et fonctionnaliste Dans les années 1920 et 1930, les premières écoles modernes et fonctionnalistes sont construites en Suisse. Souvent ces écoles présentent toujours – comme les grandes écoles urbaines – des volumes assez importants avec les salles de classe au sud et la distribution au nord9. Pourtant, ce ne sont plus de grands bâtiments unitaires mais plutôt des volumes articulés abritant les différentes fonctions dans des parties distinctes. La symétrie stricte des grandes écoles urbaines est abandonnée en faveur d’une composition articulée de l’ensemble. Les progrès techniques permettent de rationaliser la construction d’un côté et de créer de grandes fenêtres en longueur. L’image véhiculée par ces écoles n’est plus celle d’une institution puissante mais d’un établissement fonctionnel et modern, « La forme du bâtiment [...] exprime stylistiquement sa propre fonctionnalité10 ». Chaque partie du programme de l’école s’affiche vers l’extérieur. La grande sobriété de ces édifices donnant une image de la modernité, attribue à ces bâtiments aussi un caractère de sévérité. Un détail typique pour ces écoles sont les stores en tissu. Fig. 6 Stapfenacker, Bern, Karl Indermühle, 1932

9 Un autre dispositif utilisé est celui où les distributions sont orientées transversalement au volume, ce qui permet de doublement orienter toutes les classes. (cf. Oberhänsli, This, Vom Eselstall zum Pavillonschulhaus, Volksschulbauten anhand ausgewählter Luzerner Beispiele zwischen 1850 und 1950, Luzern : Kommissionsverlag Reaber Bücher AG, 1996, p. 204.) 10 Mestelan, Patrick, «  La construction scolaire des années vingt et trente, L’adéquation rationnelle aux nouveaux programmes », op. cit., p. 119. 22

Fig. 7 Wasgenring, Ecole primaire, Bâle, Bruno et Fritz Haller, 1953 - 1955

L’école pavillonnaire Déjà vers la fin du xixe siècle, le système pavillonnaire est recommandé pour la construction d’écoles tant par des hygiénistes que par des pédagogues11. Pendant les années 1930, quelques exemples sont construits en Suisse, mais ce type ne voit ici une propagation importante qu’à partir des années 1950. Le système pavillonnaire consiste en groupements de quelques classes dans de petits volumes à un ou deux étages, les salles collectives étant regroupées dans un volume à part12. Les petits volumes favorisent la déconcentration des élèves et le rapport à l’extérieur qui étaient à l’époque considérés bénéfiques pour les enfants. Le contact avec l’extérieur est renforcé par de grandes ouvertures et l’adaptation du bâtiment au terrain. Souvent les classes ou groupes de classes disposent d’un espace extérieur privatisé. Toujours pour améliorer le rapport ente intérieur et extérieur, les écoles sont davantage situées dans des espaces verts et non plus dans le tissu urbain. L’école pavillonnaire présente un contraste marqué par rapport aux grandes écoles des générations précédentes en ce qui concerne l’image de l’école. L’école est libérée de la représentation institutionnelle. Par les petits volumes les nouvelles écoles aimeraient exprimer l’adaptation à l’enfant13.

Groupe scolaire Pour des raisons économiques ainsi que dû à la raréfaction du sol, les écoles redeviennent plus amples et compactes à partir des années soixante14. Les formes des écoles deviennent plus variées, une propriété commune à toutes 11 Schneeberger, Elisabeth, Schulhäuser für Stadt und Land, Der Volksschulbau im Kanton Bern am Ende des 19. Jahrhunderts, op. cit., p. 37. 12 Mestelan, Patrick, «  La construction scolaire des années vingt et trente, L’adéquation rationnelle aux nouveaux programmes », op. cit., p. 103. 13 Oberhänsli, This, « L’architecture scolaire pavillonnaire en Suisse alémanique, dans les années 1950 », in Histoire de l’éducation [En ligne], 102 | 2004, mis en ligne le 31 décembre 2008, consulté le 09 décembre 2009, url : http://histoire-education.revues.org/index717. html, p. 7. 14 Oberhänsli, This, Vom Eselstall zum Pavillonschulhaus, Volksschulbauten anhand ausgewählter Luzerner Beispiele zwischen 1850 und 1950, op. cit., p. 216. 23

les écoles est pourtant la répartition des différentes fonctions en des volumes distincts. On parle d’ailleurs de plus en plus de « groupe scolaire15 » au lieu d’utiliser le terme école tout court. Le fait de répartir les fonctions sur plusieurs volumes a pour effet que même un grand ensemble n’a pas un impact aussi fort que si tout le programme était regroupé dans un seul volume. Le souci de créer des écoles adaptées aux enfants est toujours présent. Les matériaux mis en place sont le béton et le bois ainsi que l’acier et le verre. La classe en décrochement Un type d’école qui se cristallise dans le courant des années soixante et septante est celui présentant des décrochements de volumes. C’est la classe qui se démarque dans l’ensemble. L’école n’est plus un bâtiment unitaire, mais une agglomération de parties. Ceci permet de créer des espaces d’entre-deux très variés. Ce type d’école s’oriente plus vers l’intérieur et vers les utilisateurs. Sa forme globale découle de l’organisation interne et non pas de la définition d’un volume ou de l’espace extérieur. Par la concentration d’efforts sur la vie interne, ces édifices véhiculent l’idée que l’école est un monde séparé, le monde des enfants. En même temps, la forte présence de la petite unité de la classe propose une conception d’individualisation des composantes de l’école. L’utilisation de matériaux (et aussi de formes) nouveaux est un moyen de représenter le progrès et l’ouverture d’esprit du commanditaire.

Fig. 8 Ecole secondaire, Locarno, Dolf Schnebli, 1964

Grands volumes lisses et séparés Une autre configuration que l’on pourrait nommer en tant que type est celle des grands volumes séparés. Les différentes fonctions sont regroupées dans des volumes séparés. Contrairement au type où les classes en décrochement sont très présentes, les classes sont ici souvent peu visibles. Les salles sont arrangées sur une ou deux façades ou autour d’un hall central. Les façades sont lisses, rythmées par la trame de la structure. Souvent des éléments préfabriqués sont utilisés pour les façades. Plutôt que d’exprimer l’importance individuelle de chaque classe, l’ensemble et la diversité de l’école sont centraux 15 Heller, Geneviève, et Fornet, Marianne, La cage dorée, de la chambre d’école au groupe scolaire, Deux siècles d’architecture vaudoise, op. cit., p. 119. 24

Fig. 9 Groupe scolaire de la Vallée de la Jeunesse, Lausanne, Jacques Dumas, 1971

pour l’image de ces écoles. Souvent des éléments préfabriqués sont utilisés et la trame prononcée qu’ils produisent donne à ces bâtiments un aspect de rationalité et d’efficacité qui ressemble parfois à des bâtiments de bureau.

Changements programmatiques, spatiaux et expressifs Si l’on considère les différents types de bâtiments scolaires, la grande diversité est frappante. Le programme, son étendu et sa diversité, l’emplacement et l’image donnée diffèrent beaucoup d’un type à l’autre. D’une époque à une autre, les besoins spatiaux et programmatiques ont toujours changé. Les salles de classe sont devenues plus petites tandis que la diversité des fonctions s’est agrandie. L’emplacement d’école s’est transféré d’endroits prestigieux en milieu urbain à des zones vertes et de là en des lieux variés selon l’espace disponible. L’image de l’école s’est développée en conséquent : comme institution publique nouvelle et importante elle est d’abord surtout représentative du pouvoir d’une commune. Ensuite elle reflète le progrès technique et par la suite exprime les besoins de l’enfant. Plus tard, l’image de l’école reste représentative de l’efficacité des processus de construction mais elle montre aussi l’école qui comme un monde à part avec son organisation particulière.

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Description des exemples d’écoles contemporaines

Dans ce chapitre, huit écoles contemporaines seront analysées dans l’objectif de déterminer les qualités qui composent leur caractère. Les exemples traités sont des écoles primaires, secondaires ou mixtes construites en Suisse entre 1997 et 2007. Ces critères ne définissant encore pas un échantillon de taille raisonnable à visiter et à analyser, d’autres critères plus personnels ont également été décisifs pour le choix des écoles. Il a été considéré important de représenter la grande diversité de bâtiments scolaires. Les exemples ont donc été choisis tant en ville qu’en périphérie et en campagne, des écoles toutes nouvelles mais aussi des extensions d’écoles existantes, de grandes écoles aussi bien que de petites. Les écoles suivantes ont été retenues : 1. Volta, Bâle, BS, Miller & Maranta, 1996 - 2000 2. Les Ouches, Genève, GE, Andrea Bassi, 2001 - 2005 3. Leutschenbach, Zürich, ZH, Christian Kerez, 2002 - 2007 4. Vella, GR, Bearth & Deplazes, 1994 - 1997 5. Villa Thérèse, Fribourg, FR, Daniele Marques, 1999 - 2003 6. Vers l’Eglise, Fully, VS, Bonnard Woeffrey, 1998 - 2001 7. Les Tuillières, Gland, VD, Capua Mann, 2001 - 2005 8. Cycle d’orientation Collombey, VS, Galetti Matter, 1997 - 1999

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1. Ecole Volta Lieu, implantation, accès L’école Volta se trouve en plein milieu urbain. Il s’agit d’une nouvelle école primaire avec une salle de sport. Son implantation s’oriente au bâtiment qui se trouvait à sa place auparavant. Les espaces extérieurs se limitent à une place de jeu à caractère de cour, formée par l’école et les bâtiments voisins. L’accès à l’école se fait uniquement par cette cour et n’est pas possible depuis la rue, ce qui a pour conséquence que le bâtiment semble fermé depuis la rue. L’ouverture de l’entrée ne se distingue des autres ouvertures du rezde-chaussée que par quelques aspects fonctionnels comme la présence de l’avant-toit et le fait que l’ouverture descend jusqu’au sol. L’acte d’entrer n’a que peu d’importance. Le bâtiment n’essaie pas d’attirer des gens comme le font souvent d’autres bâtiments publics. Volumétrie et typologie Les locaux destinés aux différentes fonctions, classes, salles spécialisées et locaux de sport, sont rassemblés dans un grand volume pur. Ce volume est percé par quatre puits de lumière qui éclairent le centre de ce bâtiment d’une grande profondeur. Le gabarit est donné en profondeur par le bâtiment adjacent existant, tandis que sa hauteur ainsi que sa longueur découlent des besoins en espace demandé par le programme. Le bâtiment se divise verticalement en deux parties. A moitié enfoncé dans le sol se situe la salle de sport, sur laquelle se dressent quatre étages avec un mélange de classes et de salles spécialisées sur chaque niveau. L’organisation du plan provient d’une opération sophistiqué de symétrie et répétition d’une couche de base consistant d’une salle de classe, un puits de lumière, un espa28

Ecole Volta Bâle, BS, 2000 Architecture : Miller & Maranta Programme : Ecole primaire (12 classes), salles spécialisées, salle de sport

ce commun ouvert et une salle spécialisée qui coïncide avec une unité structurelle. Les espaces primaires se situent dans les deux façades principales à l’est et à l’ouest tandis qu’au centre du bâtiment, entre les puits de lumière, se trouvent les espaces communs et de distribution. Ces espaces communs qui sont liés visuellement mais séparés par les puits de lumière, ont un effet troublant comme dans un labyrinthe. La classe est façonnée de manière à avoir deux espaces différents, la classe proprement dite qui est orientée vers l’extérieur et un local adjoint qui donne sur un puits de lumière. L’entrée à une classe se trouve toujours au bout d’un petit couloir. Le fait d’attribuer à chaque classe un couloir et un puits de lumière évoque les écoles pavillonnaires où la distribution est également relativement personnalisée, menant à un nombre limité de classes, et les classes disposent de leur propre espace extérieur. Façades et fenêtres Etant accolé à un autre bâtiment, l’école Volta ne présente que trois façades. Celle qui est orientée vers l’est donne sur la rue, celle orientée vers l’ouest sur la cour. La façade sud fait face à un coin d’immeuble. Les trois faces du bâtiments sont en béton lisse et les fenêtres à fleur avec l’extérieur. Les façades est et ouest sont les façades principales derrière lesquelles se trouvent tous les espaces primaires. Elles sont très similaires l’une à l’autre en ce qui concerne le dessin des fenêtres. De grandes ouvertures subdivisées en cinq parties s’alignent horizontalement et verticalement dans les quatre étages supérieurs. La largeur des grandes fenêtres coïncide avec celle de la couche de base de l’organisation du plan. Contrairement à ce que l’on pourrait s’attendre, une fenêtre ne correspond pas forcément à une classe. Une fenêtre sur deux illumine en effet en même temps deux espaces différents, une salle spécialisée et un couloir. Au rez-de-chaussée les fenêtres sont différentes. Côté rue il y en a quatre comme aux étages supérieurs, côté cour il y en a cinq. Cette différence peut s’expliquer par le fait que deux fonctions différentes se trouvent derrière ces parties des façades – côté rue est située la salle de sport, sur cour il y a un hall d’entrée. Cependant, le découpage des ouvertures dans chaque façade donne aussi l’image d’un mur porteur de la façade sur rue (les fenêtres sont 29

alignées en vertical) et d’un mur non porteur pour la façade cour – cette image correspond en effet à la logique structurelle sans pour autant que les façades contribuent à la structure porteuse1. La troisième face du bâtiment est aveugle, à l’exception d’une rangée de fenêtres illuminant l’espace de distribution. Cette façade est comme la continuité de la série de murs porteurs transversaux à l’intérieur du bâtiment qui joue ici le rôle de façade. L’arrangement des ouvertures dans les trois façades décèle avant tout la logique structurelle et conceptionnelle. Les façades ne sont pas représentatives des espaces intérieurs ou de leur destination, mais elles sont le corollaire d’un certain nombre de choix compositeurs. Matériaux et couleurs Peu de matériaux différents sont visibles dans l’école Volta : ce sont principalement le béton et des panneaux en aggloméré de bois. Toutes les couleurs utilisées sont très proches les unes des autres : gris clair, blanc, écru, nacre. Le choix des différents matériaux et couleurs vise à dévoiler la logique de la structure à l’intérieur en utilisant des matériaux différents pour les parties porteuses et non porteuses : les murs porteurs et les dalles sont en béton gris, les cloisons ainsi que les meubles de rangement et les garde-corps des escaliers sont des panneaux peints en gris ou nacre. Mais les matériaux sont utilisés de manière différente aussi selon l’utilisation des espaces. Les parties en béton composant la gym et les distributions sont laissées brutes, tandis que les salles de classe sont habillées de plaques mdf. Un troisième rôle communicatif des matériaux est celui de clarifier la relation de l’édifice avec son entourage. Le béton utilisé pour les façades se fond bien dans le paysage bâti environnant, sa couleur est notamment très proche de celle de la façade du bâtiment adjacent. Matériaux et couleurs sont donc utilisés ici pour intégrer l’école dans son contexte.

1 Deplazes, Andrea (éd.), Architektur konstruieren  : vom Rohmaterial zum Bauwerk  : ein Handbuch, 3e édition, Basel : Birkhäuser, 2009 [2005], p. 378. 30

2. Les Ouches Lieu, implantation, accès L’école des Ouches se trouve dans le milieu urbain d’une densité modérée dans le quartier d’Aïre à Genève. L’école primaire partage le bâtiment avec d’autres fonctions importantes à la vie publique du quartier : une crèche, une salle de sport et des locaux pour associations. L’édifice se trouve au milieu d’un quartier résidentiel, constitué d’une part de petites maisons du cité-jardin et d’autre part de barres de logement plus amples et plus récentes. Dans le sens nord – sud, le bâtiment prend presque toute la largeur de la parcelle entre deux rues, dans l’autre sens, des surfaces ouvertes font office de terrains scolaires pour les enfants et de place du quartier. L’accès au bâtiment se fait par plusieurs seuils successifs. Une rue ouverte provenant des bords du terrain de l’école se transforme en allée interne couverte qui permet de traverser le bâtiment. Sur les côtés de la rue interne se trouvent les entrées aux différentes parties de l’édifice.

Les Ouches Genève, GE, 2005 Architecture : Andrea Bassi Programme : Ecole primaire (17classes), crèche, restaurant, salles de sport, locaux de sociétés

Volumétrie et typologie Le volume du bâtiment naît d’un grand parallélépipède auquel ont été soustrait deux cours et la rue couverte. Avec seulement deux étages au-dessus du terrain, l’école est un bâtiment très bas. Sa taille quand même considérable se manifeste dans sa largeur. Les différentes fonctions sont réparties sur les trois niveaux. Au rez-dechaussée se trouvent la crèche et le restaurant ainsi que les entrées à l’école primaire et aux salles de sport et locaux de sociétés. Le premier étage est réservé aux salles de classe de l’école. Elle sont situées en trois rangées sur les 31

façades est et ouest ainsi que sur les cours. Au centre du bâtiment se forme un espace commun et de distribution qui est entre couloir et hall central. Le plan en S du premier étage permet de créer des groupements de classes dans les coins. Façades et fenêtres L’école des Ouches présente deux longues faces principales, celles qui donnent sur les terrains de jeu devant et derrière le bâtiment. Les deux façades latérales sont coupées en longueur par les cours. Toutes les façades sont marquées par la trame des éléments de l’enveloppe. La présence des fenêtres dans les façades principales et les façades sur cour marquent une différence par rapport aux faces latérales qui sont presqu’aveugles. Les premières sont prédominées par les bandes horizontales produites par l’alternance des fenêtres et des allèges. Les fenêtres sont composées d’une grande partie fixe et d’un petit ouvrant. La largeur est donnée par la structure porteuse ponctuelle en acier et découle indirectement de la largeur d’une salle de classe. Deux unités de fenêtre correspondent alors à une classe. Le même type de fenêtre se trouve partout dans le bâtiment indépendamment de l’usage du local situé derrière. Par conséquent, le bâtiment obtient une grande unité malgré le fait qu’il abrite des fonctions très différentes. Cette unité est pourtant brisée par la différence des façades latérales aveugles. Tandis qu’on peut affirmer que le volume est engendré par la soustraction des cours à un parallélépipède pur, le dessin des façades contredit cette hypothèse. Depuis un point de vue de l’angle, on a l’impression qu’il s’agit de deux bâtiments plus petits. Le bâtiment est ainsi rapproché de l’échelle de la cité-jardin voisine. Matériaux et couleurs Les matériaux et les couleurs choisis pour l’école des Ouches sont peu spectaculaires : le verre verdâtre, le lino et le parquet beige, le béton, des surfaces peintes en blanc et gris. A l’intérieur, les mêmes matériaux et couleurs sont appliqués dans tous les locaux. Ils visent, selon l’architecte, à unifier cet ensemble à multiples fonctions ainsi qu’à inspirer du calme et une atmosphère domestique et à laisser la liberté d’aménagement aux occupants : 32

« Ceci permet à l’utilisateur [...] d’apporter le caractère qu’il désire à ces espaces1 ». Les façades sont matérialisées par le verre transparent et translucide et le métal pour les cadres. Les mêmes éléments se trouvent partout et le bâtiment obtient un aspect très unitaire. Cependant, les matériaux de revêtement des sols sont variés et permettent de donner une identité particulière à chaque zone. L’allée couverte et la cour appelée agora sont revêtues de grandes dalles en béton. Le matériau dur reflète le caractère public et ordinaire de ces parties ; malgré leur position à l’intérieur des limites de l’école, il s’agit d’espaces publics utilitaires, comme les voiries d’une ville. La place de jeu est aussi dure, mais en asphalte, d’autres parties qui invitent davantage à des promenades sont recouvertes de gravier. La cour destinée à la crèche présente un revêtement mou.

1 Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005. 33

3. Leutschenbach Lieu, implantation, accès L’école de Leutschenbach a été créée pour le nouveau quartier d’habitation qui est en train de se construire dans une zone auparavant industrielle. Elle est côtoyée d’une part par les cff sur les autres côtés par du logement et l’industrie. Comme la plupart des bâtiments des alentours, l’école s’oriente aux chemins de fer. Elle est implantée dans le coin de la parcelle afin de laisser libres de grandes surfaces extérieures. Aucune grande rue ne mène directement à l’école ; on y accède par des chemins pour piétons. Les entrées au bâtiment se trouvent dans les deux longues façades. Elles ne sont pas articulées, il s’agit simplement d’une porte en verre dans une façade vitrée. Volumétrie et typologie Tout le programme de l’école de Leutschenbach est abrité dans un seul grand parallélépipède. Selon la position de l’observateur devant son côté long ou court, celui-ci semble être couché ou debout, et on ne sait pas s’il s’agit plutôt d’une barre ou d’une tour. Par l’empilement de toutes les parties du programme, l’école est devenue aussi haute pour être vue depuis loin. Les différentes fonctions sont disposées en strates sur les six niveaux : le restaurant et la crèche au rez-de-chaussée, les classes du premier au troisième étage, médiathèque et salle polyvalente au quatrième, et la salle de sport au dernier étage. Les classes sont disposées en deux rangées sur les façades nord et sud. Au centre du bâtiment se trouve un espace commun et de distribution qui est assez ample pour accueillir également des fonctions d’enseignement. Un grand escalier à double sens au milieu de l’édifice rappelle les dispositifs de distribution imposants des grandes écoles urbaines. 34

Leutschenbach Zürich Schwamendingen, ZH, 2007 Architecture : Christian Kerez Programme : Ecole primaire et secondaire (22 classes), salles spécialisées, médiathèque, restaurant, crèche, salle de sport

Façades et fenêtres L’école de Leutschenbach présente une enveloppe qui tourne tout autour du bâtiment. A part leur taille, les quatre façades sont identiques. Il n’y a pas de hiérarchie des différents côtés de l’édifice par le traitement des façades. C’est la taille des façades et la présence des entrées qui pourraient qualifier les côtés nord et sud comme les faces principales. L’enveloppe proprement dite consiste uniquement en verre. Il n’existe pas de fenêtres proprement dites dans ce bâtiment. Les faits marquants dans l’apparence des façades sont surtout la structure porteuse extérieure et les dalles des balcons. La structure porteuse reflète les différentes parties fonctionnelles de l’école. Elle est uniquement à l’intérieur pour les diverses parties communes au rez-de-chaussée et au quatrième étage. Pour la salle de sport ainsi que pour le corps des classes elle s’affiche à l’extérieur. La visibilité de la structure et la correspondance entre les parties fonctionnelles et structurelles a pour effet que les différents usages de l’école sont bien lisibles sur les façades. Le bâtiment exprime ainsi d’un côté l’unité de l’école par l’enveloppe uniformément en verre et les quatre faces identiques, de l’autre côté il démontre sa propre construction ainsi que les différentes parties du programme. Matériaux et couleurs Les couleurs comme les matériaux mis en œuvre sont peu variés ; ce sont uniquement le gris du béton et le turquoise typique au verre. Les matériaux assurent la continuation entre tous les espaces, notamment entre les espaces communs et de distribution et les classes, mais aussi entre l’intérieur et l’extérieur. L’enveloppe est l’élément le plus immatériel de toute l’école, il s’agit de verre transparent, tandis que tous les autres éléments séparateurs sont mis en œuvre en verre translucide. La continuation entre extérieur et intérieur est également soulignée par la prolongation du sol intérieur pour former des balcons ainsi que par la structure qui est aussi bien présente à l’extérieur comme à l’intérieur du bâtiment.

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4. Vella Lieu, implantation, accès La nouvelle école de Vella est une extension de l’école existante, devenue nécessaire suite à la fusion des établissements scolaires des différents villages de la vallée. Le site est proche du centre, mais ne se trouve pas directement sur la rue principale. Le programme de l’école – auquel se rajoutent d’autre fonctions publiques du village – est répartie sur quatre volumes séparés qui sont liés par des portiques. Depuis la rue qui donne accès au complexe un escalier mène à où l’on trouve les entrées aux deux bâtiments préexistants, la bibliothèque et l’école primaire. En passant entre les deux, on arrive sur un deuxième préau qui donne accès aux deux bâtiments nouveaux. Sur les autres côtés, le périmètre de l’école n’est pas limité et les champs arrivent jusqu’aux bâtiments. Volumétrie et typologie L’école est un véritable centre du village de Vella avec ses différentes fonctions publiques, soit l’école primaire et secondaire, la bibliothèque et la salle polyvalente. Ces fonctions sont réparties sur les quatre bâtiments de façon à ce que chacun abrite une fonction spécifique. En ce qui concerne les nouvelles constructions, un bâtiment contient l’école secondaire et l’autre la salle polyvalente. L’école primaire et la bibliothèque sont logées dans les deux bâtiments préexistants. L’école secondaire suit une typologie traditionnelle où les classes sont disposées toutes sur le côté sud du bâtiment, desservies par un couloir au nord. La salle polyvalente prend toute l’ampleur de l’édifices. L’entrée aux deux bâtiments se fait par contre par un volume intercalé, et la salle polyvalente pro36

Vella Vella, GR, 1997 Architecture : Bearth & Deplazes Programme : Ecole primaire et secondaire (env. 12 classes), salles spécialisées, bibliothèque, salle polyvalente

fite de l’école secondaire, s’en servant pour la distribution verticale. Les deux nouveaux bâtiments sont des volumes à base rectangulaire avec des toits légèrement en pente. Ils essaient de s’intégrer dans le village par leur forme et la correspondance de leurs gabarits. Avec les deux bâtiments préexistants ils délimitent la place de jeu au centre du nouveau complexe. Façades et fenêtres Dans les deux nouveaux volumes de l’école de Vella, toutes les façades sont différentes les unes des autres. Les deux bâtiments se correspondent cependant dans la composition des façades. Les espaces principaux sont ouverts sur les côtés longs pendant que les pignons sont généralement aveugles. La position des fenêtres répond à des besoins fonctionnels et dépend de l’organisation du plan. Les fenêtres sont toutes du même type mais diffèrent selon l’usage du local qu’elles illuminent. Elles sont toutes en forme de rectangles couchés, mais de dimensions variées. Les embrasures sont coupées dans un angle à laisser entrer le plus de lumière possible. Les fenêtres des classes sont constituées d’une grande partie fixe et un ouvrant étroit. Deux fenêtres appartiennent à une classe, leur disposition sur la façade est pourtant régulière et il n’est alors pas possible de lire la présence d’une classe sur la façade. La conception des façades vise à dévoiler les différentes parties fonctionnelles de l’école par la composition des faces de même que par le dessin des cadres et les proportions des fenêtres. La fenêtre, avec les embrasures peintes en blanc et les angles non rectangulaires, évoque sa fonction de capteur de l’énergie solaire. Elle n’est pas fonctionnelle en tant que telle – les angles les plus ouverts sont orientés parfois vers le sud, parfois vers le nord – mais elle est l’image d’une fenêtre fonctionnelle avec des angles ouverts comme on la voit souvent dans les maisons vernaculaires des Grisons. Matériaux et couleurs La construction en béton armé est revêtue de crépi à l’extérieur. A l’intérieur, le béton reste apparent ou il est couvert par du bois. L’intérieur est marqué par trois matériaux : pierre pour les sols, béton pour les murs et dalles, bois pour un revêtement intérieur partiel ainsi que pour les 37

fenêtres et les portes. Le lambris en bois donne une touche chaleureuse là où les gens se trouvent le plus souvent : sur les bancs dans les couloirs et dans les classes. Par l’utilisation du bois comme lambris, les salles de classe sont rapprochées du domestique. A l’extérieur, le crépi et sa couleur beige clair permettent de relier les deux nouveaux bâtiments aux deux déjà existants. En plus, la couleur beige clair s’intègre dans le paysage bâti sans reprendre l’une ou l’autre couleur spécifiquement.

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5. Villa Thérèse Lieu, implantation, accès L’école Villa Thérèse se trouve à Fribourg, au bord d’un quartier résidentiel avec de grands immeubles des années 1960 et 1970, sur un terrain fortement pentu. Il s’agit d’une extension d’une petite école préexistante. Le nouveau programme a été réparti sur trois bâtiments qui reprennent la même orientation que l’ancien bâtiment. Les quatre volumes indépendants gravitent autour d’une place de jeu au centre. Les terrains de l’école ont une limite nette en bas par une rue, vers le haut pourtant le jardin de l’école se mélange avec l’espace ouvert du quartier résidentiel. L’accès se fait par la rue ainsi que par le jardin. On passe entre les bâtiments pour arriver à la place centrale sur laquelle s’orientent les entrées de tous les édifices. Les entrées sont légèrement accentuées par leur position en creux par rapport aux surfaces lisses des bâtiments.

Villa Thérèse Fribourg, FR, 2003 Architecture : Daniele Marques Programme : Ecole primaire (12 classes), école enfantine (4 classes), salles spécialisées, double salle de sport

Volumétrie et typologie Comme chez l’école de Vella, la Villa Thérèse comprend quatre volumes séparés qui abritent chacun une fonction différente. Les trois nouveaux bâtiments comprenant l’école primaire, l’école enfantine et les salles de sport respectivement, sont tous des parallélépipèdes purs. Leurs tailles et proportions varient beaucoup suivant le programme qu’ils abritent. L’école présente un volume considérable de quatre étages, l’école enfantine est une barre mince couchée et le bâtiment de sport est un volume trapu avec des longues façades. L’orientation principale de chaque volume se fait dans le sens de la pente, mais les typologies sont différentes. Les espaces principaux, les services et 39

les distributions sont toujours répartis en bandes parallèles, mais dans chaque volume l’arrangement des bandes est différent. L’école primaire montre un plan courant avec une rangée de classes au sud-est et un large couloir au nord-ouest. Calé entre les deux se trouve une bande de services. Dans l’école enfantine, l’agrégation des couches se fait dans le sens transversal du bâtiment, classes, services, distributions se répètent quatre fois sur le niveau principal. Grâce à ce dispositif, les classes bénéficient toutes d’une lumière bilatérale (cf. sous-chapitre L’école progressiste et fonctionnaliste) . Le même dispositif est appliqué pour la salle de sport, sauf qu’ici la position des distribution et des services sont inversée. Façades et fenêtres Comme dans l’école de Vella les bâtiments de la Villa Thérèse présentent des compositions de façades spécifiques. Quelques règles qui valent pour toutes les façades sont cependant reconnaissables dans le dessin des fenêtres et leur arrangement. L’emplacement des ouvertures correspond à la logique du plan. Par l’orientation bilatérale des espaces primaires dans le sens de la pente, les façades sud-est et nord-ouest sont les façades principales pour tous les bâtiments. Les entrées sont pourtant placées sur les côtés latéraux. Chaque espace a seulement une ouverture et parfois les ouvertures de deux espaces adjacents sont même couplées pour former une seule baie. Par conséquent les façades sont constituées de très peu d’éléments. De grandes surfaces pleines avec quelques grandes ouvertures attribuent du calme aux trois édifices. Les fenêtres en longueur sont divisées en plusieurs parties et puisque les ouvrants sont coulissants, les ouvertures peuvent être divisées en grandes vitres qui ont toutes la même taille. Ces très grandes baies divisées en parties égales donnent une image abstraite de la fenêtre. Ceci est encore renforcé par le noir des cadres et de l’embrasure qui fait disparaître la division et l’articulation avec le mur. La position de la vitre dépend du type d’espace situé derrière. Les espaces principaux ont les vitres à l’intérieur du mur tandis que les locaux des distribution et de service ont les vitres à fleur avec la façade. La fenêtre reflète alors la hiérarchie des espaces à l’extérieur. 40

Matériaux et couleurs Les matériaux et surtout les couleurs trouvent une attention particulière dans ce projet. On est frappé avant tout par la différence entre intérieur et extérieur. Le béton rugueux et gris foncé des façades et les encadrements de fenêtre noirs donnent une impression de fermeture et de pesanteur presque hostile, mais les bâtiments inspirent aussi la durabilité par le matériau pierreux. L’intérieur est par contre baigné en lumière de couleurs variées et les surfaces y sont lisses. Les couleurs à l’intérieur donnent une ambiance particulière et jouent aussi un rôle pour l’orientation dans le bâtiment. A l’école enfantine, chaque unité a sa propre couleur du sol et des murs. Les quatre couleurs différentes se prolongent de chaque salle de classe jusqu’à l’espace d’entrée au niveau inférieur et annoncent ici les quatre unités. Dans le bâtiment de l’école primaire, les murs et les plafonds sont partout peints en jaune et ce sont seulement les vestiaires et les sols par lesquels les classes se distinguent. Dans le bâtiment de sport, le jaune est aussi prépondérant. Le violet dans les escaliers fait penser à la couleur fréquemment utilisée dans les tricots de sport1 et atteint ainsi une connotation avec le monde du sport.

1 Adam, Hubertus, « Farben verwenden », in gta Verlag (éd.), Daniele Marques, Zürich : gta Verlag, eth, 2003. 41

6. Vers l’Eglise Lieu, implantation, accès Cette école se trouve au bord du village Vers l’Eglise, sur une des rue principales. Les bâtiments voisins en direction du Rhône sont de grands immeubles tandis que vers l’amont il y a de petites maisons d’habitation. Par sa taille modérée, l’école fait le lien entre les deux types de grain urbain. Le bâtiment est implanté de manière à définir une place avec la salle de sport existante. Les entrées de l’école s’ouvrent sur la place de jeu et en direction du village. Les quatre portes d’entrée sont rassemblées sous un énorme auvent. Dans ce bâtiment simple, l’auvent avec les entrées est l’élément le plus marquant, et de ce fait l’école semble accueillante. Toutefois l’auvent ne s’ouvre pas vers la rue car un mur aveugle ferme le rez-de-chaussée de la voirie. En s’orientant sur la place de jeu et non pas sur l’espace public, le bâtiment montre clairement son appartenance primordiale à l’ensemble scolaire. Le terrain de l’école est en plus fermé sur tous les côtés par des haies ou des clôtures hautes. Volumétrie et typologie L’école de Vers l’Eglise est un volume à base d’un quadrilatère quelconque qui répond par l’inclination de ses côtés au contexte immédiat. Les côtés principaux sont parallèles à la rue d’une part et perpendiculaires à la salle de sport de l’autre part. A cette forme simple est soustraite la partie qui crée l’auvent d’entrée. Le programme étant limité à des classes et quelques espaces secondaires, le plan se base sur la typologie conventionnelle de deux rangées de classes sur la façades est et ouest respectivement et un couloir central avec les services 42

Vers l’Eglise Fully, VS, 2001 Architecture : Bonnard Woeffrey Programme : Ecole primaire (env. 18 classes), salles spécialisées

et les escaliers au début et à la fin du couloir. Le couloir profite de la forme en quadrilatère quelconque du plan pour s’élargir vers la montagne en un véritable hall. Façades et fenêtres L’école de Vers l’Eglise se présente avec quatre façades distinctes avec une hiérarchie claire. Les deux longues façades est et ouest montrant les classes sont les faces dominantes. Sur le côté est se trouve la façade principale. Son orientation vers la place de jeu qui lui donne une position en dégagement ainsi que le grand auvent d’entrée lui attribuent une importance particulière. Les deux faces latérales sont traitées comme des pignons. Ici se trouvent seulement les espaces de distribution et les services. Le bâtiment montre deux types d’ouvertures : de véritables fenêtres pour les classes et des surfaces vitrées pour illuminer les autres espaces. Chaque classe possède une seule fenêtre quadripartite avec des ouvrants coulissants. Les fenêtres sont positionnées dans la profondeur du mur tandis que les surfaces vitrées sont à fleur avec le crépi extérieur. Matériaux et couleurs Relativement peu de matériaux différents sont utilisés pour cette école : le béton brut, le linoléum, la tôle perforée et la toile à l’intérieur, le crépi ainsi que le verre et l’aluminium des fenêtres pour l’extérieur. Les couleurs des matériaux semblent être repris des couleurs du paysage naturel et bâti des alentours : jaune, orange, vert et différentes nuances de brun et de gris. Les matériaux et les couleurs servent à séparer les espaces communs des classes ainsi qu’à différencier les classes entre elles. Les matériaux durs comme le béton et la tôle perforée sont utilisés partout comme les matériaux de base. Ils sont laissés bruts et ont des couleurs neutres. Les matériaux mous tels la toile et le lino sont réservés pour habiller les salles de classe et changent de couleur pour donner une identité propre à chaque classe. Le revêtement extérieur est du crépi gris. Etant un matériau très usuel, il donne un caractère discret à l’école. En même temps l’utilisation du crépi crée un lien avec les bâtiment du village. Notamment les édifices publics comme l’ancienne école et l’église présentent des façades en crépi gris. 43

7. Les Tuillières Lieu, implantation, accès L’école des Tuillières se trouve au bord de l’agglomération de Gland à proximité d’une école existante. Le bâtiment s’intègre par sa taille dans son voisinage qui consiste en barres résidentielles des années 1960 et 1970. Le volume est placé au bord de la route pour dégager un espace ouvert au nord, vers le quartier résidentiel. Les terrains de l’école se mélangent avec les espaces verts du quartier, ce qui augmente encore l’intégration de l’école dans son environnement immédiat. Les terrains scolaires sont légèrement surélevés par rapport à la rue qui donne accès à l’école. Il se crée ainsi un seuil entre la rue et l’école sans que le contact visuel soit brisé. L’entrée au bâtiment est très prononcée par le grand auvent qui s’ouvre dans la direction du village. L’auvent marque l’entrée à l’édifice mais plusieurs portes donnent des accès séparés aux différentes parties du bâtiment. Volumétrie et typologie Toutes les fonctions trouvent leur place dans un parallélépipède unique. Il est brisé uniquement par le grand auvent de l’entrée d’une part et la loggia donnant sur le parc de l’autre part. La répartition des fonctions à l’intérieur du bâtiment est similaire à celle de l’école Volta. Au rez-de-chaussée et semi-enterré se trouve la salle de sport et les bureaux des maîtres ainsi que du support psychologique, tandis qu’aux trois étages supérieurs sont logées les classes et les salles spécialisées. Les étages de l’école sont organisés par un plan en éolienne où les classes sont en périphérie sur les quatre façades et au centre un grand espace collectif se 44

Les Tuillières Gland, VD, 2005 Architecture : Capua Mann Programme : Collège secondaire (env. 15 classes), bureaux, salles spécialisées, double salle polyvalente

trouve au centre. Ce dernier a des ouvertures sur l’extérieur dans chaque façade et connecte les trois étages par une cour au milieu. Il s’agit d’une disposition des classes qui s’inspire des typologies en anneau avec atrium central qui étaient souvent utilisées dans les écoles des grands volumes séparés (sauf qu’ici les autres fonctions de l’école se trouvent dans le même bâtiment à un autre niveau). Façades et fenêtres Les quatre façades de l’école des Tuillières sont composées de manière à former une surface extérieure presque continue d’une face du volume à l’autre. Le dessin de tous les côtés est basé sur une trame de quatre mètres cinquante, ce qui correspond à la moitié de la longueur d’une classe. Les mêmes fenêtres sont disposées au milieu de la trame sur les trois étages supérieurs de toutes les façades. Parfois, une ou deux trames dans l’angle sont dépourvues de fenêtres et l’arrangement des fenêtres n’est donc pas le même à tous les étages. L’emplacement des ouvertures reflète ainsi la différence des trois étages en ce qui concerne la disposition des locaux en plan. Malgré leur taille, les fenêtres semblent quelque peu domestiques par leur proportions et le fait qu’elles sont constituées seulement d’un ouvrant et d’une baie fixe. Leur répétition régulière sur toute la façade ne permet pas de deviner la position des salles de classe. Tandis que les façades des étages supérieurs attribuent la même importance à tous les côtés, les ouvertures du rez-de-chaussée hiérarchisent les quatre faces du bâtiment. Le grand auvent caractérise déjà par sa volumétrie le côté nord-est comme le devant de l’édifice. La surface aveugle au rez-de-chaussée dans la façade opposée augmente encore cette impression. Les côtés sud-est et nord-ouest sont équivalents. De très grandes ouvertures illuminent la salle de sport et les bureaux sur chacune des deux façades. Le rez-de-chaussée se distingue fortement des trois étages supérieurs dans le traitement des ouvertures. Avec le porte-à-faux de l’auvent et les grandes ouvertures latérales, cette distinction fait probablement allusion aux rezde-chaussée sur pilotis des immeubles voisins plus qu’aux socles lourds des grandes écoles du passé.

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Matériaux et couleurs En général, les matériaux utilisées pour l’école des Tuillières sont laissés bruts et se présentent dans leurs couleurs intrinsèques. On observe une différenciation nette entre les divers espaces. A l’extérieur, le klinker est utilisé comme revêtement des murs et le métal pour les fenêtres et la partie sous l’auvent. Les couleurs foncées font le lien avec quelques-unes des constructions environnantes. En même temps elles augmentent encore la massivité du volume. A l’intérieur, le béton, le terrazzo, le chêne et le crépi blanc sont prépondérants. Les classes se distinguent clairement des espaces communs par les matériaux. Le béton et le terrazzo des espaces communs contranstent avec le parquet et le crépi blanc dans les classes. En passant de l’extérieur à l’intérieur et dans les classes, les matériaux deviennent toujours plus mous et plus chauds, les couleurs toujours plus claires.

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8. Collombey Lieu, implantation, accès Le bâtiment du cycle d’orientation de Collombey se trouve au bord du village, dans la plaine du Rhône. il fait partie de tout un complexe public, comprenant en outre, l’école primaire, des terrains de sport et une salle de gymnastique, la piscine et une garderie. Le cycle d’orientation est le bâtiment le plus éloigné du village. Il s’avance dans la plaine, se tournant vers les autres bâtiments avec son pignon. Son orientation est parallèle au sens de la vallée. L’accès à l’école se fait à travers les terrains de jeu. L’entrée au bâtiment, par son emplacement dans le mur pignon, a peu d’impact visuel sur le lointain. Un portique liant les différents équipements mène aussi à l’entrée du cycle d’orientation et c’est lui qui attribue à cette école un caractère de bâtiment public. Volumétrie et typologie Le volume du cycle d’orientation est un parallélépipède pur, couché sur le sol. Son hauteur de trois étages correspond à celui de l’école primaire voisine. La typologie de l’école et simple est classique. Sur trois étages se trouvent des salles de classe de part et d’autre d’un couloir central. Le couloir s’élargit des deux côtés du bâtiment. C’est ici que se trouvent les services et les locaux administratifs. Des salles spécialisées se trouvent surtout au rez-de-chaussée et au premier étage du côté ouest. Collombey Collombey, VS, 1999 Architecture : Galetti Matter Programme : Cycle d’orientation (env. 18 classes), salles spécialisées

Façades et fenêtres Dans le même esprit que la disposition du volume, les quatre façades orientent le bâtiment clairement dans l’espace : les deux façades au nord-est et au sud-ouest sont ouvertes sur les deux chaînes de montagnes du Valais, tandis 47

que les pignons restent très fermés. Les proportions des fenêtres sont choisies pour valoriser cette orientation. Les fenêtres donnant sur les montagnes sont en verticales pour montrer « la succession des éléments : la Plaine, la Montagne, le Ciel1 » tandis que les fenêtres dans les pignons sont en longueur pour mieux faire voir « le caractère d’une vallée glaciaire : sa largeur, l’horizontalité de son sol, la puissance des montagnes qui la bornent2 ». Les éléments des deux façades dominantes sont composés de manière à produire des surfaces unitaires. De petites fenêtres sont dispersées irrégulièrement sur toute la façade. Chaque local dispose de plusieurs de ces petites fenêtres qui sont toutefois arrangées différemment dans toutes les pièces. Trois bandes horizontales courent sur toute la longueur de chaque étage. Les fenêtres qui prennent la hauteur de deux bandes sont disposées parfois dans les deux bandes inférieures, parfois dans les deux bandes supérieures d’un étage. Ce procédé rend une lecture des trois étages toute aussi impossible qu’une lecture des différents locaux. La taille réduite des fenêtres ne permet même pas d’avoir une idée de l’ampleur des salles à l’intérieur. La composition des deux façades principales donne l’image d’un bâtiment unitaire et mystérieux. L’image de l’unité est également mise en valeur aussi par le jeu d’ombres. Les murs en béton des pignons et la toiture dépassent les façades en verre d’environ cinquante centimètres. Ils créent ainsi une ombre qui est d’autant plus forte que la façade est lisse. On a par ce fait l’impression que le mur en béton emballe le bâtiment et en crée une unité forte. Matériaux et couleurs Une grande variété de matériaux et de couleurs est mise en œuvre dans le bâtiment du cycle d’orientation de Collombey. Les matériaux sont parfois laissés bruts, parfois peints. Les couleurs choisies soulignent encore la différence des matériaux, de sorte que la brique et peinte en blanc, l’acier en bleu foncé, le lino a la couleur rouge, etc. 1 Marchand, Bruno, et Croset, Pierre-Alain, Galetti & Matter : 1989 - 2005 : état des lieux, Gollion : Infolio, 2005, p. 18. 2 Ibidem. 48

Les différents matériaux distinguent les éléments de la construction tandis que les couleurs différencient aussi les espaces communs des classes. Les poteaux sont en acier, les dalles et les noyaux de distribution verticale en béton brut, les murs sont revêtus en crépi. Les classes sont plus neutres que les espaces communs en ce qui concerne le choix des couleurs. Dans les classes le blanc, le beige et le gris sont prépondérants, tandis que dans les couloirs, le sol est vert et les murs sont rouges. A l’extérieur, la différence entre la composition des façades principales et celle des pignons est traduite aussi dans la matérialité. Les pignons sont en béton brut tandis que les longues façades sont en verre profilit. L’utilisation du verre pour les façades principales peut être perçu comme une manière de contextualiser le bâtiment en rappelant les constructions des serres dans la plaine du Valais3.

3 Marchand, Bruno, «  L’âme des matériaux  » in Marchand, Bruno, et Croset, PierreAlain, Galetti & Matter : 1989 - 2005 : état des lieux, Gollion : Infolio, 2005, p. 8. 49

Evaluation et interprétation

Dans ce chapitre il s’agit de trouver, sur la base des écoles décrites précédemment, des éléments récurrents qui permettent d’identifier ces bâtiments comme des écoles ainsi que de dévoiler l’image de l’école contemporaine donnée par l’architecture.

Absence d’inscriptions connotatives Depuis l’antiquité, les inscriptions sont des moyens pour communiquer la fonction d’un bâtiment. Elles n’étaient cependant pas perçues comme de bons moyens par tous les architectes et dans toutes les époques. Déjà Quatremère de Quincy s’oppose à l’idée de communiquer la destination d’un bâtiment par des inscriptions  : «  Quelle pauvre ressource que celle d’une inscription sans laquelle j’ignorerois cependant le genre et la destination de l’édifice que s’offre à ma vue!1 ». Pour Quatremère, une méthode de communiquer plus apte à l’architecture est celle des allégories2. Tati semble également par ses images de l’usine Plastac et de l’école, critiquer les inscriptions comme des moyens trop faciles. Plus favorables aux inscriptions se montrent Venturi & Scott Brown qui se servent beaucoup de ce moyen dans leurs bâtiments. Pour eux, les inscriptions sont les symboles les plus dénotatifs3. Mais ils attribuent également un potentiel d’expression connotative au caractère de l’inscription et à son em1 Quatremère de Quincy, Antoine Chrysostôme, Encyclopédie méthodique [1788], 1:515-516, cité in Lavin, Sylvia, Quatremère de Quincy and the invention of a modern language of architecture, Cambridge : The MIT press, 1992, p. 268. 2 Idem, p. 143. 3 Venturi, Robert, Scott-Brown, Denis, et Izenour, Steven, Learning from Las Vegas: The Forgotten Symbolism of Architectural Form, Cambridge : The MIT Press, 1977 [1972], p. 130. 51

placement4. Un exemple comment cette pensée pourrait se montrer : l’inscription Primarschule en lettres dorées sur une grande école urbaine à Berne (cf. chapitre La grande école urbaine), placée au-dessus de l’entrée dans l’axe de symétrie du bâtiment, connote l’importance et la dignité de l’institution en plus de dénoter l’école primaire du quartier. Parmi les huit écoles analysées, il y en a trois qui sont pourvues d’une inscription : Les Ouches, Les Tuillières et Collombey. En général, il s’agit du nom ou du type de l’école, comme Ecole Les Ouches, Collège des Tuillières, Cycle d’orientation. Il est à noter que ces inscriptions ne se trouvent pas sur les bâtiments. Elles sont placées sur de petits murets aux abords de l’école ou au-dessus de la porte d’entrée mais sur un volume annexe au bâtiment principal dans le cas de Collombey. Ces inscriptions sont avant tout informatives ou dénotatives, pour utiliser les mots de Venturi & Scott Brown. Les lettres sont petites et leur emplacement est peu spectaculaire, il faut presque les chercher pour les voir. Si on aimerait quand-même leur attribuer une capacité d’expression connotative, l’expression serait celle de modestie ou, à la limite, de moindre importance. Il faut se demander si une telle expression correspond à la volonté des architectes. Une inscription de caractère neutre et modeste se met toutefois en opposition à l’architecture commerciale, et pour une école il est peut-être convenable de donner une image qui s’écarte de celle du commerce et de la concurrence.

La grande fenêtre et le préau couvert comme seuls symboles scolaires Comme nous l’avons vu dans le chapitre sur le caractère, pour Loos comme pour Venturi & Scott Brown la communication par association, en utilisant des formes qui sont liées par convention à des programmes spécifiques, peut être un bon moyen pour véhiculer une idée de la destination d’un édifice. Il s’agit alors de déterminer des formes récurrentes et symboliques pour les écoles. Différentes formes se sont cristallisées pour les écoles dans les différentes époques. Le clocher avec l’horloge était typique pour les écoles du 4 Idem, p. 101. 52

siècle jusqu’au début du xxe. Il avait l’importante fonction publique d’être le repère temporel pour le voisinage. Celle-ci étant devenue obsolète, les cloches servaient dès lors uniquement à l’école et sont devenues invisibles. L’horloge toute seule est restée encore plus longtemps un signe sur les murs de beaucoup d’écoles même si elle avait entre-temps perdu son emplacement dominant. Un élément qui existe depuis longtemps et qui est devenu symbolique jusqu’à nos temps est la grande fenêtre. C’étaient les courants hygiénistes vers la fin du xixe siècle qui avaient exigé de grandes fenêtres pour les établissement scolaires pour des raisons de ventilation et d’éclairage5. Les grandes fenêtres ont persisté pour les mêmes raisons dans l’architecture moderne. Elles ont cependant changées de proportions et de nombre. Les écoles construites entre 1870 et 1920 environ, sont marquées par plusieurs fenêtres en verticale par classe. Contrairement à elles, les écoles modernes de type progressiste, grâce à des structures en acier ou en béton, ont souvent une seule grande fenêtre en longueur pour chaque classe. La grande fenêtre a continuée à être utilisée, notamment dans les groupes scolaires avec des volumes imbriqués. Un autre élément fonctionnel qui atteint un statut de symbole architectural dans quelques écoles est le préau couvert. Comme pour les grandes fenêtres, ce sont les courants hygiénistes qui avaient donné l’incitation pour l’aménagement de préaux qui permettraient aux enfants de prendre l’air. Depuis les années trente, on observe la présence de préaux couverts. Souvent il s’agit de portiques situés à l’entrée ou le long d’une façade ou liant plusieurs corps de l’école. Des portiques très fonctionnels se trouvent à Vella et à Collombey. L’espace sous le premier balcon de l’école de Leutschenbach est aussi d’un genre surtout fonctionnel. Un nouveau type de préau couvert se voit dans les écoles des Tuillières et Vers l’Eglise. Il ne s’agit pas d’un élément autonome mais d’un vide creusé dans le volume bâti. Dans les deux cas le creux est si important par rapport à la taille du volume et sa forme simple qu’il devient un véritable symbole de l’école. xixe

5 Heller, Geneviève, et Fornet, Marianne, La cage dorée, de la chambre d’école au groupe scolaire, Deux siècles d’architecture vaudoise, Chapelle-sur-Moudon : Edition Ketty & Alexandre, 1997, p. 53. 53

Traitement de l’entrée Le traitement de l’entrée est déterminant pour le caractère public d’un édifice. Plus une entrée est marquée, plus un bâtiment a de caractère public prononcé. Dans les grandes écoles urbaines l’entrée est placée dans l’axe de symétrie du bâtiment et souvent elle est mise en valeur par des escaliers représentatifs. Ce geste attribue au bâtiment un caractère public marqué. Au fur et à mesure que l’école perd sa fonction représentative du pouvoir communal, l’entrée devient plus humble. Déjà dans les écoles progressistes, mais encore d’avantage dans les écoles pavillonnaires, il n’y a plus une entrée unique comme seul accès à l’école. Les entrées sont plus privatives, destinées à un groupe d’élèves et non pas au grand public. Le traitement des entrées dans les écoles analysées est très varié. Un élément qui se retrouve dans tous les exemples – et que Tati a aussi identifié comme déterminant pour une école (cf. fig. 1 et 2) – est l’avant-toit en dessus de la porte d’entrée. Son importance et son expression varient cependant d’un simple élément fonctionnel, comme à l’école Volta, jusqu’au grand geste architectural aux Tuillières. Un autre aspect important au traitement de l’entrée est son rapport avec le bâtiment. Quelques écoles établissent une hiérarchie claire entre les différents côtés du bâtiment par le traitement des volumes et des façades et l’emplacement de l’entrée. L’école de Vers l’Eglise est un exemple où la composition des façades et le creux dans le volume confèrent à la façade est un aspect dominant. Le fait que l’entrée se trouve ici, augmente son importance. Un exemple contraire est l’école de Leutschenbach. Le dédoublement des entrées de part et d’autre du bâtiment diminue l’importance de chacune des deux. En plus, elles sont placées sans articulation dans un endroit quelconque dans les façades nord et sud. Un troisième point déterminant pour la nature d’une entrée est son emplacement par rapport aux voies publiques. Un bâtiment dont l’entrée est bien visible, voire ouverte sur la rue, semble plus accueillant que celui dont l’entrée est cachée et placée loin de l’espace public. Parmi les écoles choisies, Les Tuillières est un exemple pour une entrée bien visible. Elle est positionnée 54

face à l’observateur provenant du village de Gland, et l’escalier très large invite à monter vers la petite place dégagée. On peut donc constater qu’il n’y a pas une position commune de ces écoles en ce qui concerne le traitement de l’entrée et son importance pour l’expression du caractère public du bâtiment. La transition est graduelle entre une affirmation de l’entrée et son dévoilement. Les écoles analysées pourraient être mises dans une suite ainsi  : Les Tuillières, Les Ouches, Vers l’Eglise, Collombey, Vella, Villa Thérèse, Leutschenbach et école Volta.

Dégagement et clôture des terrains scolaires Un autre aspect décisif au caractère public d’une école est sa visibilité depuis le lointain. Celle-ci dépend du dégagement autour du bâtiment en ce qui concerne d’autres constructions et du degré de clôture des terrains scolaires ainsi que du volume de l’édifice. Les écoles analysées se trouvent dans des environnements très divers. Si quelques bâtiments attribuent beaucoup d’importance à la présence des écoles dans l’espace public, d’autres offrent plutôt un monde fermé aux élèves. Les écoles de Leutschenbach, des Ouches et des Tuillières se situent dans des espaces dégagés par rapport à d’autres constructions et les terrains scolaires sont ouverts à l’espace public. L’école qui démontre le plus clairement sa volonté d’être perçu comme bâtiment public destiné à tout le quartier est celle des Ouches. Les terrains de l’école avec le petit parc adjacent forment une place entourée de bâtiments d’habitation. La façade principale de l’école domine cette place en occupant l’entier d’un de ses côtés. La place de son côté offre le dégagement nécessaire pour que le bâtiment puisse être perçu dans toute sa largeur. Les clôtures des terrains de jeu sont basses et n’empêchent pas le rapport visuel entre les voiries et le bâtiment. L’école Volta et celle de Vella sont plutôt introverties. Les espaces scolaires extérieurs sont au centre du groupe de bâtiments et les bâtiments sont que partiellement visibles depuis la rue. Les écoles de Collombey, Vers l’Eglise et la Villa Thérèse adoptent une position d’entre deux. La Villa Thérèse, quoique concentrée sur l’espace de jeu au centre de tous les bâtiments, ne présente aucune limite de ses terrains vers 55

l’amont. A la concentration sur un centre l’école oppose ainsi l’ouverture vers son voisinage. Un cas contraire est l’école de Vers l’Eglise qui est très dégagée vers le village par la place de jeu, mais dont les limites sont plantées avec des haies et bornées par des clôtures hautes. Au niveau de la volumétrie, quelques écoles visent clairement à se servir de grands volumes pour marquer leur présence dans l’entourage. L’école de Leutschenbach en est l’exemple le plus typique. Un empilement maximal – la plus grande pièce, la salle de sport, est déterminante toute seule pour l’empreinte au sol – permet d’obtenir une hauteur considérable et par ce fait le bâtiment peut être vu depuis loin. Le dessin très dominant des façades avec les poteaux inclinés de la structure renforce encore cet effet à distance. La question du dégagement et des clôtures des écoles est liée à celle de l’entrée. Souvent un dégagement vers la voirie va de pair avec une entrée affirmée, au contraire, une école introvertie a plutôt une entrée peu visible.

Le grand volume et la valorisation de l’unité Les volumes unitaires et de forme simple des écoles du xixe siècle se sont de plus en plus transformés en complexes scolaires éparpillés au cours de la première moitié du xxe siècle. Les raisons principales en étaient la volonté de faire des volumes plus adaptés aux enfants et la démultiplication de fonctions variées au sein de l’école. Pour des raisons économiques et dû à la raréfaction du sol, les écoles sont par la suite redevenues plus amples et plus compactes. Dans les écoles contemporaines, on peut observer un développement de volumes unitaires qui va au-delà de ces raisons pratiques. Dans six des huit écoles tout le programme est logé dans un seul volume simple. L’expression de l’unité ne se produit toutefois pas seulement par la volumétrie de ces écoles, mais aussi par l’utilisation des matériaux et des couleurs ainsi que par la composition des façades. A part l’école de Collombey, toutes les écoles présentent un seul matériau de revêtement extérieur sur toutes les façades. En plus ce matériau est mis en œuvre partout dans la même couleur. La composition des façades comme instrument unificateur est utilisée de manière très conséquente dans les écoles de Leutschenbach, des Tuillières et Collombey. 56

Dans les cas de Leutschenbach et Les Tuillières c’est surtout le fait que toutes les façades sont traitées de la même manière qui unifie l’édifice. A l’école de Collombey ce sont la saillie du toit et des murs pignons emballant le bâtiment ainsi que le dispersement de petites fenêtres sur l’entier des façades principales qui donnent une image d’unité. Plusieurs raisons pourraient expliquer ce souci d’unité qui est présent dans toutes les écoles analysées. Un grand volume unitaire est plus évocateur d’un bâtiment public que les petits volumes éparpillés. Après l’apogée de la concentration sur les besoins des enfants dans les écoles pavillonnaires, l’école semble être redevenue une institution dont on aimerait affirmer la portée pour l’ensemble de la société. Dans cet esprit Martin Tschanz affirme : [...] Schulen [sind] ein wesentlicher Teil eines funktionierenden, sozialen Gemeindewesens, das sich nicht zuletzt in seinen Bauten repräsentiert. Das ist auch für die Kinder wichtig. Die Schule ist oft der erste Ort, an dem sie Öffentlichkeit erfahren. Sie verlassen den Familienverband, die kleine Welt des Privaten, und treten in eine grössere Gemeinschaft ein. [...] Dazu gehören auch Erfahrungen von relativer Grösse und Funktionen, die sich nicht auf das Kind als Individuum, sondern auf die Allgemeinheit beziehen6.  [...] les écoles sont une part essentielle de la vie publique communale qui se reflète entre autre dans les bâtiments communaux. Ceci est aussi important pour les enfants. L’école est souvent le premier endroit où ils éprouvent la présence publique. Ils quittent la famille, le monde privé, et entrent dans une plus grande communauté. [...] Il importe aussi l’expérience de taille relative et de fonctions qui ne concernent pas l’enfant comme individu mais la communauté.7

En plus de transmettre du savoir aux enfants, l’école a la fonction importante de les initier à une vie en société. Un grand volume est apte à transmettre la sensation d’une large communauté. La valorisation de l’unité peut être vu aussi dans un contexte pédagogique. L’apprentissage ne devrait plus se faire uniquement au sein de la classe mais

6 Tschanz, Martin, «  Städte im Kleinen, Typologische Neuerungen im Schulhausbau  », Werk, bauen + wohnen, n° 1-2, 2003, p. 23. 7 Traduit par Franca Riva. 57

de plus en plus dans des groupes de travail8. On aimerait laisser travailler les élèves selon leur rythme et avec d’autres élèves qui partagent leurs intérêts sans que ceux-ci soient forcément de la même volée et de la même classe. Par le biais de grands volumes unitaires, l’architecture met en avant l’école en entier et non pas une agglomération de petits groupes et de fonctions diverses.

Lieu et intégration au contexte Pendant certaines époques les écoles étaient situées de manière privilégiée dans des lieux spécifiques : à la fin du xixe siècle leur emplacement était souvent sur les anciens boulevards, au milieu du xxe elles se trouvaient fréquemment dans de vastes espaces verts. Les écoles contemporaines analysées se trouvent dans des contextes très divers. En campagne, les nouvelles constructions peuvent être placées sur du terrain vide : c’est le cas de Collombey, Vers l’Eglise, Les Tuillières et Vella. Ces écoles se trouvent souvent au bord de l’agglomération. Les écoles en ville sont construites dans des quartiers existants ou planifiés en remplaçant des constructions obsolètes. Des exemples sont l’école Volta, Les Ouches et Leutschenbach. De plus en plus. les nouveaux bâtiments scolaires sont des extensions d’écoles existantes : Vella, Les Tuillières, Villa Thérèse, Collombey et Vers l’Eglise. Il semble que les écoles sont simplement placées là où du terrain est à disposition. On peut constater que la plupart des écoles se trouvent à une certaine distance d’autres constructions – l’école Volta fait ici une exception. Dans toutes les écoles on peut observer un souci d’intégration du bâtiment dans son contexte. Les matériaux et les couleurs ainsi que les formes et alignements des volumes sont des moyens pour montrer l’appartenance des écoles à leur environnement bâti. La volonté d’intégration des bâtiments d’école au voisinage est probable8 Wakefield, Alan, et Kurz, Daniel, Der Stand der Dinge  : Neues vom Schulhausbau, in Hochbaudepartement der Stadt Zürich (ed.), Schulhausbau – Der Stand der Dinge, Basel : Birkhäuser 2004, p. 22 et p. 24. 58

ment basée sur l’intention d’exprimer une identité du quartier. Le bâtiment scolaire qui sert avant tout à son environnement proche, essaie de provoquer l’identification des habitants du quartier avec leur école. En plus, les écoles devenant de plus en plus autonomes dans leur organisation9, l’image d’une école devrait s’orienter plus à sa location qu’à l’institution école en général. Toutefois, l’intégration d’un bâtiment dans un lieu est devenue une préoccupation importante pour beaucoup d’architectes et n’est pas liée spécialement au programme de l’école.

Bâtiments simples Une préoccupation commune pour la plupart des écoles traitées, est celle d’une recherche de simplicité. A l’intérieur tant bien qu’à l’extérieur des matériaux très usuels sont mis en œuvre : le béton, le crépi, le bois, le verre, le lino. Dans la majorité des cas ces matériaux se présentent dans leur couleur intrinsèque. Non seulement les matériaux et couleurs véhiculent la simplicité mais aussi les volumes et les façades. Les volumes sont des parallélépipèdes purs, au moins le sont dans leur forme d’ensemble. Le degré de simplicité des façades est variable d’école en école. Dans beaucoup de cas la composition des façades est obtenue par un arrangement régulier du même type de fenêtres pour la majeure partie des façades. Il est ainsi pour les écoles Les Ouches, Volta, Les Tuillières, Collombey et Vers l’Eglise. Plusieurs raisons sont imaginables pour cette recherche commune. La simplicité pourrait être perçue comme image de durabilité. En renonçant à imposer des matériaux et des couleurs très particuliers et à la mode, on espère que le bâtiment plaise plus longtemps. En même temps, la discrétion dans le choix des matériaux et couleurs facilite des affectations variées et des transformations futures. Une autre raison pourrait être en lien avec l’école comme institution. Dû à 9 Keller, Hans-Jürg, Und sie bewegt sich doch... : Der Wandel der Schule in den letzten 15 Jahren, in Hochbaudepartement der Stadt Zürich (ed.), Schulhausbau – Der Stand der Dinge, Basel : Birkhäuser 2004, p. 16. 59

plusieurs réformes scolaires, l’image de l’école est devenue celle d’un organisme très compliqué, et on aimerait y mettre un contrepoint au moyen de bâtiments simples. En plus, selon l’une des trois exigences pour de nouvelles constructions scolaires qu’a formulées Anton Strittmatter, il n’y a plus de place pour des monuments, « kein Platz mehr für teure Denkmäler10 ». Au vu des budgets réduits des écoles, des bâtiments coûteux sont mal vus. D’autre part, la tendance de créer des bâtiments qui ont des formes simples et présentent des matériaux ordinaires et bruts n’est pas limitée à la construction scolaire et peut être attribuée à l’influence de l’art minimal.

Cas particuliers Certains thèmes surgissent uniquement dans quelques-uns des bâtiments considérés et seront brièvement énoncés par la suite. Harte Schale, weicher Kern Un thème qui apparaît dans l’école Villa Thérèse et aussi dans Les Tuillières est celui d’une opposition entre l’intérieur et l’extérieur. Cette opposition se manifeste par le choix des matériaux et couleurs. L’extérieur est revêtu d’un matériau dur et sombre, à l’intérieur règne une atmosphère plus claire. Ce contraste pourrait exprimer l’univers protégé qu’offre l’école. Continuité entre intérieur et extérieur Une position contraire à celle évoquée ci-devant est adoptée par l’école Volta et surtout par l’école de Leutschenbach. La continuité est montrée par l’utilisation des mêmes matériaux à l’intérieur qu’à l’extérieur ainsi que des formes correspondantes dedans et dehors. A l’école de Leutschenbach non seulement les dalles continuent vers l’extérieur, mais aussi la structure est présente à l’intérieur comme à l’extérieur. La couche séparatrice est en effet uniquement du triple verre transparent. 10 Strittmatter, Anton, « Pädagogische Koordinaten für Schulbauten », Werk, bauen + wohnen, n° 1-2, 2003, p. 12, (les deux autres exigences sont une atmosphère de valeur et des espaces variables). 60

Ces écoles semblent affirmer l’école comme une partie du monde quotidien et réel et non pas comme un univers à part. Bâtiments administratifs ? Une chose qui m’a frappée lors de la découverte de ces écoles, est que quelques-unes semblent répandre une atmosphère qui ressemble à celle d’un bâtiment administratif. Je pense ici à l’école de Leutschenbach et à Les Tuillières. A l’extérieur, ce sont la régularité et la taille des fenêtres dans le cas des Tuillières et la façade toute en verre avec les balcons à Leutschenbach qui provoquent des associations avec des bâtiments administratifs plutôt qu’avec des écoles. A l’intérieur, cette sensation persiste, entre autres à cause des matériaux très lisses et réfléchissants. Elle est plus forte aux Tuillières, dû d’une part aux encadrements des portes et au fait que celles-ci se ferment toutes seules, d’autre par à l’espace commun dépourvu de tout aménagement.

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Conclusion et hypothèses de projet

Comment discerner une école contemporaine ? Ce qui donne un indice sur la présence d’une école est le fait qu’un bâtiment est grand, unitaire et dégagé et dont la matérialisation est discrète. Des grandes fenêtres régulièrement disposées et des espaces couverts extérieurs, soit en forme d’avant-toit, de portiques ou d’un volume en port-à-faux, sont des signes évidents pour une école. Eventuellement une petite inscription peut rassurer qu’il s’agit effectivement d’un bâtiment scolaire. Les moyens de transmettre la signification sont surtout les formes et les matériaux. Des éléments architecturaux symboliques, tels les grandes fenêtres et le préau couvert, sont également utilisés pour véhiculer du sens par l’association avec des formes connues. Quelle image de l’école contemporaine veulent transmettre les constructions scolaires analysées ? Par un dégagement du bâtiment et des entrées articulées ainsi que surtout par de grands volumes simples, les édifices expriment l’importance de l’école comme institution publique. Le degré de représentation de la communauté varie d’école en école, mais elle est plus grande aujourd’hui que ce que l’on peut observer dans les constructions scolaires issues d’il y a quelques décennies. Des matériaux usuels comme le bois, le béton, le crépi et autres ainsi que l’intégration soignée des bâtiments dans leur contexte permettent cependant de créer une atmosphère familière. La volumétrie, la régularité des façades ainsi qu’une réduction du nombre de matériaux différents donnent une image d’unité à l’institution.

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Quelles pistes suivre pour entamer mon projet d’école ? L’idée de mettre en avant le côté institutionnel de l’école me semble pertinente. L’école devrait soutenir les enfants dans leur développement individuel, mais aussi lui apprendre à faire partie d’une communauté. La création d’une atmosphère familière est également une approche judicieuse pour ne pas intimider les enfants. D’autres valeurs qu’une bonne école devrait à mon avis exprimer sont l’égalité des chances, l’ouverture d’esprit, la stabilité et l’impartialité de l’institution et une atmosphère sereine et de tolérance ainsi que l’importance de l’éducation publique pour la société. En ce qui concerne l’école, il me semble que la grande fenêtre répétée régulièrement est un bon symbole, à la fois fonctionnel et relevant d’une tradition dans la construction scolaire. Le préau couvert mérite également une attention particulière. Je suis plutôt favorable à la présence d’une horloge et d’une inscription même si ces deux éléments ne sont mis en avant que peu souvent dans les écoles contemporaines. L’horloge est le symbole d’une convention importante ­–­celle de la mesure du temps – à l’intérieur de notre communauté. L’inscription quant à elle, en plus d’être expressive par son élaboration, a l’avantage d’offrir un niveau de communication rationnel. Les matériaux et les couleurs visent à exprimer les valeurs énoncées ci-dessus. Par rapport aux écoles visitées, il faut veiller à ne pas créer une atmosphère peu sereine par l’utilisation de matériaux bruts et des couleurs sombres. Il me semble que la transmission d’idées par association ainsi que la création d’émotions directement par des formes et des matériaux sont deux possibilités valables. Il faut toutefois se rendre compte que certaines significations ne sont pas intelligibles et vraies pour tout le monde. Néanmoins il est possible d’offrir un sens, et de laisser le choix au spectateur de le découvrir ou non.

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Bibliographie et crédits iconographiques

Bibliographie général Beckel, Inge, « Erziehungslaboratorium, Wohnstube oder Gemeinschaftszentrum? », Werk, bauen + wohnen, n° 1-2, 2003, p. 6-9. de Vigan, Jean, Le petit dicobat : dictionnaire général du bâtiment, Ris-Orangis : Arcature, 1994. Heller, Geneviève, et Fornet, Marianne, La cage dorée, de la chambre d’école au groupe scolaire : Deux siècles d’architecture vaudoise, Chapelle-sur-Moudon : Edition Ketty & Alexandre, 1997. Hochbaudepartement der Stadt Zürich (éd.), Schulhausbau – Der Stand der Dinge, Basel : Birkhäuser 2004. Lavin, Sylvia, Quatremère de Quincy and the invention of a modern language of architecture, Cambridge : The mit press, 1992. Loos, Adolf, Ins leere gesprochen, Gesammelte Schriften 1897 - 1900, Vienne  : Georg Prachner Verlag, 1997 [1921]. Loos, Adolf, Trotzdem, Gesammelte Schriften 1900 - 1930, Vienne : Georg Prachner Verlag, 1997 [1931]. Mestelan, Patrick, «  La construction scolaire des années vingt et trente, L’adéquation rationnelle aux nouveaux programmes  », in Charollais, Isabelle, et Marchand, Bruno (éd.), L’architecture de la raison, La Suisse des années vingt et trente, p. 90 - 123, Lausanne : Presse polytechnique et universitaire romande, 1991. Oberhänsli, This, Vom Eselstall zum Pavillonschulhaus, Volksschulbauten anhand ausgewählter Luzerner Beispiele zwischen 1850 und 1950, Luzern  : Kommissionsverlag Reaber Bücher AG, 1996.

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Oberhänsli, This, « L’architecture scolaire pavillonnaire en Suisse alémanique, dans les années 1950 », in Histoire de l’éducation [En ligne], 102 | 2004, mis en ligne le 31 décembre 2008, consulté le 09 décembre 2009, url : http://histoire-education.revues.org/index717.html. Odinga, Thomas «Schulbau wohin?», Werk, bauen + wohnen, n° 1-2, 2003, p. 15-18. Roth, Alfred, The New Schoolhouse, Zürich  : Verlag für Architektur, 1966 [4ème édition]. Schneeberger, Elisabeth, Schulhäuser für Stadt und Land, Der Volksschulbau im Kanton Bern am Ende des 19. Jahrhunderts, Bern : Historischer Verein des Kantons Bern, 2005. Steinmann, Martin, Forme forte : écrits 1972 - 2002, Lucan, Jacques, et Marchand, Bruno, (éd.), Basel : Birkhäuser 2003. Steinmann, Martin, «Was bedeutet es, wenn Stützen schräg sind?», werk, bauen + wohnen, n° 11, 2003. Strittmatter, Anton, « Pädagogische Koordinaten für Schulbauten », Werk, bauen + wohnen, n° 1-2, 2003, p. 12-14. Solt, Judit, « Verstand und Gefühl, Architektur als Zeichen und Körper », Archithese, n° 3, 2001, p. 8 - 13. Soubeyrand, Paule, [UE-L/Dessin d’architecture au siècle des lumières : Boullée, Ledoux et Lequeu], Lausanne : epfl, 2009. Szambien, Werner, « Caractère » in Symétrie, goût, caractère, Théorie et terminologie de l’architecture à l’âge classique 1550-1800, p. 174 - 199, Paris : Picard, 1986. Tschanz, Martin, « Städte im Kleinen, Typologische Neuerungen im Schulhausbau », Werk, bauen + wohnen, n° 1-2, 2003, p. 20-25. Venturi, Robert, Scott-Brown, Denis, et Izenour, Steven, Learning from Las Vegas: The Forgotten Symbolism of Architectural Form, Cambridge  : The mit Press, 1977 [1972].

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Bibliographie pour les exemples d’écoles Adam, Hubertus, «  Schwebend Monumental, Christian Kerez : Schulhaus Leutschenbach, Zürich-Schwamendingen  », archithese, vol.5, 2009, p. 14 - 21. Architecture Suisse, Les Ouches  : école, crèche et équipements de quartier, 1203 Genève (GE), 160-1, 2006, [En ligne] consulté le 12 novembre 2009, url : http://www.as-architecturesuisse.ch/pdf/as160_01.pdf. Deplazes, Andrea (éd.), Architektur konstruieren  : vom Rohmaterial zum Bauwerk : ein Handbuch, 3e édition, Basel : Birkhäuser, 2009 [2005]. El Croquis Editorial (éd.), Christian Kerez 2000 - 2009, Madrid, n° 145, 2009. gta Verlag (éd.), Daniele Marques, Zürich : gta Verlag, eth, 2003. Graeme Mann & Patricia Capua Mann, plans échelle 1 : 200. Marchand, Bruno, et Croset, Pierre-Alain, Galetti & Matter : 1989 - 2005 : état des lieux, Gollion : Infolio, 2005. Marchand, Bruno, et Fretton, Tony, Graeme Mann & Patricia Capua Mann, Gollion : Infolio, 2008. sia, section vaud, visite architecturale, « Collège secondaire ’Les Tuilleries’ Gland 2001 - 2005 Graeme Mann & Patricia Capua Mann  », 2005 [En ligne] consulté le 30 novembre 2009, url : http://www.siavd.ch/Documents/41_V4_GLAND_MEP.pdf. Steinmann, Martin, «  Du soleil dans la ville. L’école Volta à Bâle (1996 2000). Archtitectes : Miller & Maranta », Faces no 49, 2001, p 38 - 47. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005. werk-material, «  Ecole primaire, Vers l’Eglise, Fully, VD  », werk, bauen + wohnen, n° 1I2, 2002. Wirz, Heinz (éd.), Bearth & Deplazes, Konstrukte / Constructions, Luzern  : Quart Verlag, 2005.

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Crédits iconographiques fig.1 Jacques Tati, Mon oncle, 1958, extrait du dvd. fig.2 Jacques Tati, Mon oncle, 1958., extrait du dvd. fig.3 Maison de commune, Bofflens, 1795, Heller, p. 20. fig.4 Ecole Villars-Mendraz, Jean-Pierre Jaton, 1844, Heller, p. 37. fig.7 Wasgenring, Ecole primaire, Roth, p. 153. fig.9 Groupe scolaire de la Vallée de Jeunesse, Lausanne, 1971, Heller, p. 135. Les photos sans indications sont des photos prises par Franca Riva.

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Plan

Situation

Lieu

Nom

Entrée

Abords

Fenêtre

Façade

Volume

Couloirs

Porte

Classe

Matériaux

Ecole Volta

091112_enth_plans_fr.vwx

Volta 1:500

Fig a. 2.

implantation, 1:4000

Fig a. 3. site et entourage, google earth, novembre 2009

Fig a. 8. http://www.millermaranta.ch/0305/0305%20VOLT.php

Leutschenbach

91112_enth_plans_fr.vwx

eutschenbach 1:500

Fig b. 1.

plan 1er-3e étage, 1:1250

Fig b. 2.

implantation, 1:4000

Fig b. 3.

Fig a. 9. photo Bastien Thorel

Fig b. 8. El Croquis Editorial, Christian Kerez 2000 - 2009, Madrid, n° 145, 2009, p. 120 - 121, 122.

Fig a. 1. plan 4e étage, 1:1250

site et entourage, google earth, novembre 2009

Fig b. 10. El Croquis Editorial, Christian Kerez 2000 - 2009, Madrid, n° 145, 2009, p. 133.

091112_enth_plans_fr.vwx

Les Ouches 1:500

Les Ouches Fig c. 1. plan 1e étage, 1:1250

Fig c. 2.

implantation, 1:4000

Fig c. 3.

Fig c. 5. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005.

site et entourage, google earth, novembre 2009

Fig c. 6. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005.

Fig c. 7. Ville de Genève,Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005.

Fig c. 8. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005.

Fig c. 9. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005. .

Fig c. 10. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005.

Fig c. 12. Ville de Genève, Les Ouches : Ecole, crèche et équipements, Genève : Ville de Genève, 2005.

Fig c. 13. photo Marlis Zimmermann

Vella Fig d. 1. plan 1er étage, 1:1250

Fig d. 2.

implantation, 1:4000

Fig d. 3. site et entourage, google earth, novembre 2009

_plans_fr.vwx

Villa Thérèse Fig e. 1. plan, 1:1250

Fig e. 2.

implantation, 1:4000

Fig e. 13. espace intérieur, gta Verlag, Daniele Marques, Zürich : gta Verlag, eth, 2003 ; mur extérieur, photo Franca Riva

Fig e. 3. site et entourage, google earth, novembre 2009

091112_enth_plans_fr.vwx Villa Thérèse 1:500

Vers l’église Fig f. 1. plan 2e étage, 1:1250 091112_enth_plans_fr.vwx

Fig f. 2.

implantation, 1:4000

Fig f. 3.

site et entourage, google earth, novembre 2009

Fully 1:500

Les Tuillières

fr.vwx

0

Fig g. 1. plan 3e étage, 1:1250

Fig g. 2.

implantation, 1:4000

Fig g. 3. site et entourage, google earth, novembre 2009

Collombey Fig h. 1. plan 1er étage, 1:1250

091112_enth_plans_fr.vwx Leutschenbach 1:500

Fig h. 2.

implantation, 1:4000

Fig h. 3. site et entourage, google earth, novembre 2009

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