Pain de l`amour ou de la discorde - A. Le

January 8, 2018 | Author: Anonymous | Category: Arts et Lettres, Sciences des religions, Catholicisme
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Genese 14-18 1 cr 11 23-28

La semaine dernière, un baptême a été célébré dans ce temple, ce fut l’occasion pour Alain Le Joncour d’aborder le thème du sens de ce sacrement. Hasard des textes du jour c’est de l’autre sacrement dont il est question aujourd’hui , dans le texte de Paul qui rappelle l’institution de la cène. Loin de moi l’idée de faire une étude exhaustive de ce sacrement, mais nous allons tenter d’aborder l’aspect du pain et par voie de conséquence du vin comme nous y invite les textes du jour. Lorsque nous abordons le thème du pain dans la cène, la question qui vient a l'esprit immédiatement est de savoir ce qu'il faut comprendre par "ceci est mon corps" "ceci est mon sang" Pour certains, le pain est vraiment la chair et le vin vraiment le sang, l'un et l'autre s'étant purement et simplement transformé comme l'eau en vin aux noces de cana. Pour d'autres, il ne s'agit pas de mutation physique, mais d'une présence réelle certes mais mystique du corps et du sang du christ dans les espèces Pour d'autres encore, cette présence n'est que symbolique alors que pour certains c’est essentiellement « le souvenir « qui prime.

Bien sur je ne vais pas résister a employer des gros mots, puisque nous abordons le sujet, rappelons ce que veulent dire ces mots que nous connaissons mais dont nous ne savons pas tous ce qu'ils impliquent en dehors d'un casus belli entre les tenants de l'une et l'autre thèse. Donc nous allons parler de transsubstantiation et de consubstantiation La transsubstantiation est la doctrine qui affirme que les matières se transforment réellement, selon le dictionnaire et selon la définition de l’église catholique est littéralement la transformation d’une substance en une autre. Dans la théologie catholique, c’est la doctrine selon laquelle au cours de l’eucharistie, au moment de la consécration, les espèces du pain et du vin deviennent le Corps et le Sang du Christ tout en conservant les caractéristiques physiques et les apparences originales. Aujourd’hui, les catholiques préfèrent utiliser l’expression "présence réelle". Cette doctrine prend le nom de transsubstantiation au concile de Trente (1551) où elle est officiellement proclamée par l’Église catholique, prenant ainsi position à l’encontre de la consubstantiation envisagée par les protestants. Alors que la consubstantiation est plutôt La conception luthérienne

Elle peut se résumer en trois points.

1. Premièrement, elle se caractérise par la thèse de la "consubstantiation", terme qui ne se trouve pas sous la plume de Luther, mais rend bien compte de sa pensée. Selon les luthériens, le pain et le vin consacrés à la fois restent substantiellement pain et vin et deviennent substantiellement corps et sang du Christ. Ils ont, en quelque sorte une double substance. La substance du pain et du vin porte, contient la substance du corps et du sang du Christ. 2. Deuxièmement, elle insiste sur la parole. Le pain et le vin ne deviennent corps et sang du Christ que "saisis dans la Parole de Dieu, et liés à elle"*. Quand la parole ne les accompagne pas, il n'y a pas sacrement. Autrement dit, après la cérémonie, quand la parole a cessé de retentir, le pain et le vin consacrés redeviennent du pain et du vin ordinaires (il n'y a donc pas "réserve eucharistique"). 3. Troisièmement, elle refuse le caractère sacrificiel de la Cène. Luther et Mélanchthon opposent le sacrement, œuvre de Dieu offerte à l'être humain, et le sacrifice, œuvre humaine offerte à Dieu*. Mélanchthon admet bien que la Cène ait, comme la prière ou les bonnes œuvres, un aspect sacrificiel; mais, d'une part, il s'agit d'un sacrifice de louange (c'est à dire d'un remerciement adressé à Dieu pour ce qu'il a fait) et non d'un sacrifice propitiatoire (c'est à dire, un acte humain pour obtenir la faveur de Dieu); et, d'autre part, ce sacrifice est second, subordonné, accessoire. Mélanchthon précise qu'en rédigeant la Confession d'Augsbourg, il a volontairement écarté le mot "sacrifice" qu'il a jugé trop équivoque, qui prête trop à malentendus*.

Mais il existe encore d’autres approches comme la conception zwinglienne Il serait plus juste de dire "la conception suisse", ou “la conception de la première génération réformée” car, après Zurich, Bâle, Berne et Lausanne l'ont adoptée. Elle se résume en deux points. 1. Dans le temps qui suit l'Ascension, c'est l'Esprit qui assure la présence du Christ et non le sacrement. Quarante jours après Pâques, le corps du Christ a quitté la terre, il siège à la droite de Dieu et il y restera jusqu'à son retour à la fin des temps. Entre temps, on a une présence qui n'est pas corporelle, tangible, mais spirituelle et invisible. Elle se sent, se vit, s'éprouve dans la foi, dans notre lien intérieur et intime avec le Christ. 2. La Cène a pour fonction d'extérioriser cette présence vécue et sentie intérieurement et d'en témoigner, un peu comme on porte le deuil pour exprimer et manifester son chagrin. Cette comparaison n'est pas très bonne, parce que, pour Zwingli, la Cène est essentiellement heureuse et joyeuse; lui-même utilise plutôt la métaphore de l'alliance, de l'anneau nuptial*. Le pain et le vin ne portent donc pas ni ne véhiculent la présence du Christ, ils la signalent. Quand Jésus, le soir du vendredi saint déclare : "ceci est mon corps", il faut comprendre, écrit Zwingli, "ceci signifie mon corps". De même, lorsqu'il dit "je suis la porte" ou "je suis le bon berger", il ne faut pas prendre dans ces expressions le verbe “être” à la lettre.

Zwingli rejette, bien évidemment, toute idée de sacrifice. La Cène est une cérémonie, une action de grâces publique par laquelle les croyants proclament ce que le Christ a fait et ce qu'il représente pour eux.

Et enfin La conception calviniste Il serait plus juste de parler de la conception qui domine dans la seconde génération réformée, celle qui subit fortement l’influence de Calvin, mais sans oublier ni abandonner les thèses de Zwingli. En fait, l’élaborent ensemble Calvin et Bullinger (le successeur de Zwingli à Zurich). Elle distingue deux choses dans la Cène : - D'une part, il y a le pain et le vin qui sont des signes du corps et du sang de Jésus, qui les représentent ou les figurent. Le pain et le vin restent ce qu'ils sont. Ils ne sont pas transformés, ils ne deviennent pas autre chose. Il ne s'opère ni transsubstantiation ni consubstantiation. - D'autre part, il y a l'action du Saint Esprit dont Zwingli a eu raison de souligner l'importance. C'est l'Esprit, et non des éléments matériels qui rendent le Christ véritablement présent. C'est lui qui nous met en communion avec le Seigneur et Sauveur et qui nous fait participer à sa grâce. Jusqu'ici on est très proche de Zwingli. Calvin s'en distingue cependant parce qu'il voit dans le pain et le vin non pas, comme le Réformateur de Zurich, des signes que le croyant fait pour ceux qui l'entourent, des signes par lesquels il exprime ce qu'il a reçu, mais des signes que Dieu utilise pour atteindre le croyant, pour lui faire percevoir, sentir la présence du Christ. Dans la Cène, Dieu agit en opérant une rencontre, en produisant une conjonction entre le signe et l'action de l'Esprit. Quand nous prenons le pain et le vin de la Cène, Dieu, au même moment, nous donne intérieurement, par son Esprit, ce que représentent extérieurement le pain et le vin. Le pain et le vin ne deviennent pas corps et sang du Christ, mais en recevant le pain, nous recevons le Christ. Comme le dit le Consensus Tigurinus, Dieu accomplit "vraiment dedans nous par son Esprit tout ce que les sacrements figurent par dehors"*. La Confession helvétique postérieure précise : "le ministre nous représente par dehors, et nous fait comme voir à l'œil en ce sacrement ce de quoy le saint Esprit nous fait jouir invisiblement au dedans et en l'âme"*. L'officiant donne le pain, et en même temps Dieu donne sa grâce, son salut et la présence du Christ. Je remercie au passage un jeune professeur émérite du nom d’André Gounelle pour m’avoir « soufflé » ces définitions. Voilà donc un débat qui dure depuis des siècles, et dont on peut penser qu'il ne sera pas définitivement tranché dans les 15 jours qui viennent. Mais tout cela ce n'est que de la doctrine, des discussions byzantines sur le sexe des anges avec tout le respect que je peux avoir pour les croyances des uns et des autres. Il saute aux yeux de chacun de nous que le pain est du pain, pas de la chair humaine, et le vin est bien du vin, pas du sang ceci étant dit sur le plan strictement matériel. Nous sommes donc amenés a constater qu'il y a une incohérence entre ce que nous sommes supposés croire selon nos convictions et la réalité matérielle de ce que nous constatons. Il convient donc de pousser plus loin. La première chose qui apparait, c'est que Jésus n'a jamais dit : ceci est mon corps comme nous le disons le plus souvent. Il y a une bonne raison a cela: il y a 2000 ans le français n'existait pas. Il a donc dit autre chose.

On s'accorde a penser que Jésus parlais araméen, or en araméen "est" n'existe pas, il aurait donc dit quelque chose qu'on peut traduire par "ceci mon corps"," ceci la coupe de l'alliance en mon sang". Faites ceci en mémoire de moi. Le sens de ces phrases nous affranchit d'une interprétation stricte et dogmatique de ce que nous devons croire, et c'est a dessein que je parle de devoir croire. Pourquoi devrions-nous obligatoirement croire que le pain devient la chair de Jésus ? Si c'est ce que nous "devons croire" nous devons aussi chercher le sens de cette affirmation. Si l'on croit que le pain est la chair de Jésus, au-delà du fait que le manger est de l'anthropophagie pure et simple, il y a lieu de s'interroger sur le sens de cette consommation. Nous savons que dans les peuplades primitives anthropophages, au-delà de la nécessité nourricière, la consommation de la chair est supposée donner au consommateur les qualités et la force du consommé. Faut-il donc faire un rapprochement entre cette doctrine de mutation et ces anciennes coutumes ? Ou encore, si l'on s'en réfère, a la doctrine de l'agneau de Dieu, donc du bouc émissaire, s'agit il de participer au repas du sacrifice? Ce qui serait surprenant dans un monde juif ou les offrandes divines ne peuvent être consommées que par les prêtres sauf erreur de ma part ? La formulation "ceci mon corps" nous libère dans le sens que nous donnons a cette consommation alimentaire. Elle n'interdit pas cette perception, mais ne nous enferme pas dans cette interprétation. Par le texte de la genèse, nous voyons que la consécration du pain et du vin ne sont pas une innovation de Jésus, mais un rite bien plus ancien et antérieur au judaïsme puisque l'histoire se passe au temps ou Abram n'a pas encore conçu ses enfants . Dieu n'a même pas encore scellé son alliance avec lui. Cette alliance n’intervient qu’immédiatement après ce passage. Donc le texte nous rapporte que Melki sedec roi de Salem il fit apporter du pain et du vin , il était prêtre du Dieu très haut et il le bénit… Nous voyons donc que par ce geste, Jésus s'inscrit dans une tradition extrêmement ancienne qui donne au pain et au vin une valeur symbolique et centrale dans la relation a Dieu. Et rien ne permet de voir dans ces versets un sens sacrificiel, mais plutôt celui d’une bénédiction donnée de la part du Dieu très haut sur le pain et le vin qui seront partagés. Il me semble que ceci doit nous questionner sur un sens sacrificiel donné au pain et au vin dans la célébration de la cène. A ce point de notre réflexion, nous avons exposé différentes doctrines, nous avons vu que certaines sont quand même basées sur une compréhension improbables des textes, et nous avons vu que la bénédiction du pain et du vin est un acte religieux bien antérieur au judaïsme. Apres avoir exposer la doctrine, science de spécialistes chevronnés, il nous appartient de redescendre de ces hauteurs intellectuelles et de nous interroger sur l'essentiel, non pas quelle est la

bonne doctrine, non pas ce que nous devons croire selon nos chapelles respectives, mais, lorsque je participe a la cène, ce pain et ce vin, que représente t'ils au plus profond de moi ? Jésus a souvent insisté sur l'accueil des simples, des petits, des cœurs purs. Croyez-vous qu'il attende de ces petits de faire un choix entre transsubstantiation et consubstantiation? Est-il nécessaire de consommer le pain et le vin pour que la présence de Jésus se révèle parmi nous ? ou devons-nous plutôt insister sur la mémoire, le devoir de mémoire si cher a notre époque ? Et là encore, n'y a t-il pas contre sens en se bornant a ce souvenir en attendant un retour hypothétique en tout cas a l'échelle d'une vie humaine? Ne serait-ce pas très réducteur et une manière de passer a côté de l'essentiel de faire de la cène une simple célébration mémorielle? Lorsque nous célébrons la cène, nous affirmons que les enfants peuvent communier mais que les parents doivent expliquer a leurs enfants le sens de cet acte. En tant que parent, j'ai été, je suis confronté a cette nécessité, comment expliquer a un enfant la présence du christ ? ou est-il? Dans le pain? Dans le vin? Dans le temple? Partout ? Tout le temps ? ET de se mettre ensemble autours de la table, de passer le plat rempli de ce pain rompu et cette coupe de vin dont nous prenons? Que cela signifie t-il ? Y a-t-il un seul sens? Doit-il y en avoir un seul ? ou bien devons-nous considérer que justement la communion signifie que nous sommes en communion, c’est-à-dire ensemble, tout a la fois collectivement et individuellement en accord , avec Dieu bien sur, mais aussi que nous sentons la présence de Jésus avec nous comme ces compagnons qui sont là même quand ils sont absents. Et je pense a ces parole de Jésus, Je suis la et je frappe, si quelqu'un m'entend je prendrais le repas avec lui et lui avec moi. En opposition avec les sacrifices, le prix du sang, le bouc émissaire, et cette idée même qu'un Dieu d'amour puisse exiger le sacrifice de son propre fils pour apaiser sa colère, cette bénédiction du pain et du vin partagés ensemble n'est-ce pas le symbole de l'amour et de la paix comme un repas de noce, Un repas de joie et de remerciement comme Melki Sedecq et abram ? Le repas qui rappelle que la vie est plus forte que la mort ? Pour ne pas conclure, je n'ai pas tenté de dire ou est le vrai ou est le faux, je n'en sais rien. J'ai été interpelé par cette histoire de pain, et ce que cela signifie pour chacun de nous quand nous mangeons le pain et quand nous buvons le vin. Nous vivons dans une église unie, dans cette paroisse, nos origines confessionnelles, nos parcours personnels sont divers, et pourtant nous vivons ensemble et nous sommes tous invités au repas du Seigneur et nous prenons ensemble le pain et le vin, quelques soit nos convictions intimes quelques soit le sens que nous donnons a cet acte, quelques soit la manière dont nous ressentons la présence du Christ parmi nous.

Jésus a dit, nous ne vivons pas de pain seulement, nous sommes aussi nourris par le sens que nous donnons a nos actes et a nos pensées, que le questionnement soit le levain de vos méditation Amen

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