Les Cahiers de l’Urbanisme N° 68 Juin 2008 Patrice Collignon Association internationale Ruralité – Environnement – Développement Directeur
Avec la collaboration de Christiane Steinmetzer, Danièle Antoine, Marie-Sylvie Schmitt, Marie-Luise Niewodniczanska
Patrimoine rural, patrimoine d’avenir
La ferme du Monceau à Vaux-sur-Sûre (B) © R.E.D. Juseret 12, B-6642 Vauxsur-Sûre Maître d’ouvrage : Asbl La boîte à couleurs Maître d’œuvre : architectes associés S.A. Barbason, Brevers, Jacques
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Brochure «Patrimoine d’avenir» © R.E.D.
Introduction à l’heure où l’Union européenne appelle au renforcement de la compétitivité pour relancer sa croissance, les territoires ruraux ont à s’organiser pour apporter leur contribution à ce défi : occupant 90 % de l’espace communautaire et générant 45% de sa valeur ajoutée, ils en sont en effet des acteurs incontournables. L’attractivité et la capacité d’accueil de nos campagnes sont, à côté de leurs réalités économiques et environnementales, deux facteurs déterminants de leur compétitivité. Le bâti rural, plus particulièrement lorsqu’il témoigne d’une certaine valeur patrimoniale, est à la croisée de ces deux vecteurs de dynamisme. Porteurs d’une image culturelle positive à l’impact touristique reconnu, les bâtiments anciens peuvent aussi à travers de judicieuses réaffectations contribuer à la vitalité économique ou sociale des villages. C’est le sens de la démarche engagée en 2003 sous le titre «Patrimoine d’avenir» par l’association internationale Ruralité-EnvironnementDéveloppement (R.E.D.). Mettre en valeur, au sein de la Grande Région, des réaffectations de bâtiments anciens dont la nouvelle fonction apporte une plus-value à l’économie ou à la dynamique locale, voilà l’objectif de ce projet interrégional. On trouvera ci-après une sélection de huit réalisations parmi les vingtcinq qui figurent dans la brochure «Patrimoine d’avenir» et l’exposition en vingt-huit panneaux réalisées dans ce cadre. Ces deux supports sont également disponibles en langue allemande sous le titre «Denkmäler der Zukunft». à l’image de l’approche partenariale qui caractérise les actions menées par R.E.D., la mise en oeuvre de ce projet a pu s’appuyer sur la coopération active d’organismes et de personnalités qui, dans chacune des régions, ont animé les différentes étapes d’identification des bâtiments réaffectés. Parmi ces relais, qui ont assuré le succès d’une démarche soutenue par de nombreuses collectivités territoriales et rehaussée par la tenue d’un jury international en charge de la sélection finale, citons : la Maison de l’Urbanisme Lorraine-Ardenne, Qualité-
Village-Wallonie, le C.A.U.E de Moselle et l’Union régionale des C.A.U.E. de Lorraine, le Service des Sites et Monuments Nationaux du Grand-Duché de Luxembourg et le Service Développement rural de Rhénanie-Palatinat. Chacune des pages suivantes renvoie à l’une des quatre catégories adoptées pour la conduite du projet, en relation avec l’usage initial des bâtiments sélectionnés : agriculture, culte, habitation, métiers et services. Ces quelques exemples, venus de Wallonie, de Lorraine, du Luxembourg et de Rhénanie-Palatinat, montrent la diversité des nouvelles affectations et de leurs contributions au développement local. Ils témoignent aussi de la vitalité des espaces ruraux à s’insérer dans les dynamiques contemporaines tout en s’appuyant sur leurs atouts patrimoniaux. Liste des projets wallons retenus — Le fournil de Wéris réaffecté en outil pédagogique sur la fabrication du pain et la technique des pans de bois ; — l’atelier de pierre à rasoir de Vielsalm réaffecté en musée du coticule ; — la «Maison Godenir» de Hotton réaffectée en Syndicat d’initiative, vitrine des produits du terroir et Centre d’expositions ; — le domaine de la ferme de Gouvy réaffecté en Centre culturel et hébergement touristique ; — la ferme de l’abbaye de la Ramée à Jodoigne réaffectée en centre d’événements ; — la ferme de Juseret à Vaux-sur-Sûre réaffectée en ferme d’animation pédagogique. Un partenariat financier international — Le Ministère de la Région wallonne (B) — le Ministère de la Communauté germanophone de Belgique (B) — le Ministère de la Culture du Grand-Duché de Luxembourg (L) — le Ministère de l’Intérieur de RhénaniePalatinat (D) — l’Union Régionale des C.A.U.E. de Lorraine (F)
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Accueillant en toute saison, des groupes d’enfants, jeunes ou adultes, valides ou non dans le cadre d’accueil à la journée ou de séjours, la ferme du Monceau vise à intégrer des personnes handicapées et à favoriser l’apprentissage de la différence par l’accueil simultané d’enfants valides et handicapés dans un lieu spécialement aménagé.
La ferme du Monceau à Vaux-sur-Sûre (B) Ferme-château en carré datant du 17e siècle, elle compte parmi les rares monuments classés de ce genre en Ardenne. Sa réaffectation en ferme d’animation, adaptée aux personnes handicapées et accessible à tous, a valorisé la ferme-château dans son environnement naturel et historique en la transformant en outil d’intégration pour mettre le patrimoine rural à la portée de tous. Dans le cadre des travaux de restauration, les annexes qui altéraient la vue et la lecture des fonctions du bâtiment ont été démolies. Des interventions contemporaines légères et bien intégrées dans l’aile Sud, telles que le percement régulier de petites fenêtres et le vitrage des portes de granges, ont permis d’éclairer les locaux abritant les nouvelles fonctions (hébergement et lieux communs) tout en conservant la lecture des fonctions initiales de la ferme. Afin d’assurer l’accès des personnes handicapées à tous les niveaux, la liaison aux différents locaux a été aménagée et équipée (rampe, monolift…) tandis que l’aménagement contemporain de la cour, alternant des parties empierrées et gazonnées, permet la circulation aisée des voiturettes tout en ménageant des aires de détente. Une ferme d’animation accessible à tous
«Pëtzenhaus» à Bourglinster (L) © R.E.D. Rue de Gonderange 2 / L-6161 Bourglinster Maître d’ouvrage : Administration des bâtiments publics Maître d’œuvre : Frank Thoma & associés
Accueillant en toute saison, des groupes d’enfants, jeunes ou adultes, valides ou non dans le cadre d’accueil à la journée ou de séjours, la ferme du Monceau vise à intégrer des personnes handicapées et à favoriser l’apprentissage de la différence par l’accueil simultané d’enfants valides et handicapés dans un lieu spécialement aménagé. En mettant la nature et le patrimoine rural à portée de tous, l’équipe éducative de la ferme du Monceau développe une pédagogie active et participative qui aide les enfants à tisser des liens avec leur milieu, à acquérir le respect de l’autre et le sens des responsabilités (soins aux animaux, travaux saisonniers, hippothérapie…). «Pëtzenhaus» à Bourglinster (L) Cette grande ferme traditionnelle du 18e siècle, située à une vingtaine de kilomètres de la ville de Luxembourg, a été restaurée en profondeur afin d’y installer l’auberge de jeunesse. L’aménagement de l’auberge est le fruit d’un compromis entre l’intégration d’éléments architecturaux contemporains et le respect de la richesse patrimoniale du site selon les directives du Service des Sites et Monuments nationaux du Grand-Duché de Luxembourg. Située au pied du château de Bourglinster, où sont régulièrement organisées des manifestations culturelles, l’auberge est devenue un vecteur de développement local et s’est pleinement engagée dans une approche moderne de l’accueil touristique.
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L’ancienne abbaye des Bénédictins de Hornbach (D)
L’ancienne abbaye des Bénédictins de Hornbach (D) © R.E.D. Klosterbezirk / D-66500 Hornbach Maître d’ouvrage : Ville d’Hornbach Maître d’œuvre : Meckler und Partner
L’église Saint-Rémy de Saint-Pierrevillers (F) © R.E.D. F-55230 Saint-Pierrevillers Maître d’ouvrage : Communauté de communes du Pays de Spincourt Maître d’œuvre : Michel Goutal, architecte en chef des monuments historiques
Presque entièrement délabrée dans les années 1970, l’ancienne abbaye des Bénédictins de Hornbach, située au sud du Land de RhénaniePalatinat, a fait l’objet d’un projet de réhabilitation destiné à lui redonner une seconde vie. Ce projet a réservé une attention particulière au respect des bâtiments existants, tout en intégrant des formes architecturales modernes. Le monastère comprend actuellement un hôtel d’environ soixante-dix lits, des salles pouvant accueillir des conférences, des manifestations sociales et culturelles, ainsi qu’un musée installé dans le nouveau bâtiment. La maison principale – ancien réfectoire – et son cloître nord, une construction imposante à deux étages d’environ quinze mètres de large sur plus de quarante de long, abritent aujourd’hui le restaurant et la cuisine tandis que le rezde-chaussée offre des salles modulables et polyvalentes. L’étage mansardé a été reconverti en chambres d’hôtes. L’ancienne école, un ancien bâtiment en long à trois étages et comble construit au 19e siècle sur les restes d’une basilique romane, sert aujourd’hui en partie à l’hébergement des hôtes. Les nouveaux bâtiments du musée, construits entre le bâtiment principal et l’ancienne école, ferment le périmètre du monastère. L’histoire et la culture du monastère et de la ville de Hornbach y sont présentées en s’appuyant sur les produits de découvertes originales. Une histoire perpétuée grâce à une reconversion touristique et culturelle Le développement de l’hôtel, inscrit dans le périmètre du monastère et du musée, perpétue l’histoire de cet ensemble architectural important situé au cœur de l’Europe, en lui donnant une dimension scientifique et touristique. Réhabilité grâce au soutien financier de l’État fédéral d’Allemagne et du Land de RhénaniePalatinat, le site du monastère est devenu un pôle d’attraction pour tous ceux qui s’intéressent à l’histoire architecturale et à la culture vivante des civilisations. L’église Saint-Rémy de Saint-Pierrevillers (F) Datant du 12e siècle, les combles de l’église fortifiée de Saint-Pierrevillers, qui servaient autrefois de refuge à la population en période de troubles ont été reconvertis en 1998 en un musée des églises fortifiées du département de la Meuse. Le projet de revalorisation de ce joyau d’architecture médiévale aura permis de revitaliser le tourisme culturel local tout en préservant le caractère sacré du lieu où se déroulent encore aujourd’hui les offices religieux.
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Le Presbytère de Manternach (L) Situé en Moselle luxembourgeoise, le presbytère de Manternach est une construction imposante du 18e siècle, située au flanc d’une colline à la hauteur de l’église. Elle domine un village aisé, riche de terres fertiles, agrémenté de quelques moulins et desservi par une ligne de chemin de fer. À l’origine propriété de l’Abbaye SaintMaximin de Trèves, il a été racheté récemment à la fabrique d’église. Flanqué à l’arrière d’un jardin au carré, il jouxte le cimetière au-dessus sur toute la longueur de la propriété. Son accès est marqué par deux colonnes carrées en pierre. Quelques retouches et consolidations ont été apportées à cette haute bâtisse en pierre : l’imposant pignon a été restauré et l’annexe accolée, qui était un ancien lieu de péage de la dîme, enlevée. L’escalier menant à la porte d’entrée principale, qui offre une vue sur l’entrée de l’église, a été entièrement refait en pierre ; avec sa rampe en fer forgé, il a gardé sa forme antérieure. La structure interne des pièces a été maintenue, ainsi que l’escalier en bois avec le superbe entresol en faïence menant au premier étage. L’escalier en pierre menant au second étage est aussi d’origine, tout comme les taques et les encadrements en pierre sculptés des cheminées, des portes et des fenêtres. Le sous-sol voûté a été abaissé d’un
mètre pris sur une petite cave ; cela a permis de garder l’entrée de service, en lien avec une salle de réception mise aux normes actuelles. Une restauration toute en simplicité Bien que peu de changements aient été apportés à la structure des pièces et des ouvertures, les pièces apparaissent lumineuses dans une clarté intérieure due aux bois, aux sols et murs pastel. Le travail de restauration apparaît sans lourdeur, ni fioritures. Les salles de réunion du collège échevinal, de mariage, de réception ainsi que plusieurs bureaux administratifs sont ouverts au public et aux villageois. La Maison Godenir à Hotton (B) La restauration de cette demeure classée datant du 18e siècle et sa réaffectation en centre touristique ont été harmonieusement réalisées grâce à une restauration sobre, avec accès public et à un aménagement intérieur basé sur une circulation rayonnante des visiteurs. Centre d’exposition et vitrine des produits locaux, la Maison Godenir constitue aujourd’hui une véritable fenêtre ouverte sur l’ensemble des activités culturelles et touristiques de la commune d’Hotton et contribue ainsi à la dynamique touristique locale.
Le Presbytère de Manternach (L) © R.E.D.
La Maison Godenir à Hotton (B) © R.E.D.
Kirchewee 3 / L-6850 Manternach Maître d’ouvrage : Administration communale de Manternach Maître d’œuvre : Marcel Niederweis, architecte
Rue Haute 4 / B-6990 Hotton-sur-Ourthe Maître d’ouvrage : Royal Syndicat d’initiative à Hotton Maître d’œuvre : Bureau Zian
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De haut en bas : La Maison de la Dîme à Rettel (F) © R.E.D. Rue Principale 31 / F-57480 Rettel Maître d’ouvrage : Mairie de Rettel Maître d’œuvre : Michel Goutal, architecte en chef des monuments historiques (Paris) L’ancienne école élémentaire de Morbach-Weiperath (D) © R.E.D. Haus 79 / D-54497 Morbach Maître d’ouvrage : MorbachWeiperath Maître d’œuvre : Peter Schmit
La Maison de la Dîme à Rettel (F) Bâtie entre 1400 et 1450 à une vingtaine de kilomètres au sud de la ville de Luxembourg, la Maison de la Dîme servit durant les 17e et 18e siècles à entreposer le produit en nature de la dîme à payer au clergé. Désireuse de valoriser ce patrimoine, la commune de Rettel, après avoir acquis l’ensemble du bâtiment, initia un projet de restauration commencé en 1986 avec des aides de l’état et du Conseil général de la Moselle. La première tranche du chantier portait sur la restauration des façades, avec restitution de diverses ouvertures gothiques et de leurs huisseries, le rétablissement de la configuration intérieure avec restauration des poutraisons et planchers, la mise en place d’une copie du manteau de cheminée gothique et la préservation des décors intérieurs (fresques murales et stucs entre poutres). La richesse des éléments de modénature extérieurs (tympans gothiques) et de décor intérieur en font le plus important témoin de l’architecture civile médiévale en Lorraine. Une réaffectation synonyme de renouveau culturel Utilisée comme remise durant près de trois cents ans, la «Maison de la Dîme» s’est vue octroyer un nouveau rôle ; ni habitat comme à l’origine, ni dépôt, on lui demande d’être témoin de son temps. Par ailleurs inscrite à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 1984, elle est désormais un lieu : — de pédagogie et d’accueil du public scolaire au sein duquel, outre la visite du bâtiment, sont organisés des ateliers portant sur la vie et le travail au Moyen-Âge ; — de culture dédié aux artistes locaux ; — de rencontres et d’expositions destiné aux associations locales. Par son rayonnement et son attrait touristique, elle contribue au développement de la région : restauration, base de loisirs, randonnées pédestres et cyclistes, produits du terroir. L’ancienne école élémentaire de Morbach-Weiperath (D) Erigée dans le style néo-classique en 1844/45 à une trentaine de kilomètres à l’est de Trèves (D), l’ancienne école élémentaire de MorbachWeiperath servit dans les années 1960 d’habitation et d’entrepôt. En 1989, l’école et la propriété paysanne contiguë datant du 18e siècle, furent acquises par la Commune dans le but de transformer l’ensemble en un musée du bois. La réaffectation de ce complexe de bâtiments, d’une grande importance historique par sa construction et sa situation au cœur du village, a entraîné une revalorisation nécessaire du centre du village de Weiperath.
Ouvrages Brochure «Patrimoine d’avenir» disponible au prix de 5 € + frais de port Exposition «Patrimoine d’avenir» disponible gratuitement Contact Ruralité-EnvironnementDéveloppement, rue des Potiers, 304, B-6717 Attert tél : 063.230490 www.ruraleurope.org email :
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