Programme et résumés des conférences ci-joint

January 8, 2018 | Author: Anonymous | Category: Science, Biologie, Évolution
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Séminaire du centre Cavaillès 2016-2017 29 rue d’Ulm, 3ème étage, les séances commencent à 13H30

Biologie : l’ombre d’un doute ?

12 octobre Olivier Gandrillon (Laboratoire de biologie et de modélisation de la cellule, ENS Lyon) Expression stochastique des gènes et différenciation cellulaire

Nous nous plaçons résolument dans la perspective d'une physico-chimie variationnelle du vivant (1). Dans ce cadre, tous les phénomènes biologiques, étant avant tout des phénomènes physico-chimiques, deviennent de facto des phénomènes probabilistes (i.e. aléatoires contraints). Cet aléatoire affecte donc également l'expression génique, le processus par lequel les séquences d'ADN des génomes sont traduites en protéines, conduisant à une expression stochastique des gènes (ESG). Cette ESG, d'abord postulée sur des bases théoriques (2) est dorénavant parfaitement établie d'un point de vue expérimental (3 et 4 pour des revues récentes). Deux visions continuent cependant de s'opposer quand au rôle biologique que l'ESG serait amenée à remplir : la première, sous forte influence du dogme central de la biologie moléculaire, assimile l'ESG à un « bruit » certes inévitable mais que la cellule cherche avant tout à minimiser pour réaliser son « programme génétique »; la seconde, sous influence darwinienne, postule que la variation est au fondement du vivant et que les processus de hasard-sélection ne sauraient se restreindre à la sphère des organismes (5). Nous sommes engagés depuis plusieurs années dans la mise en oeuvre d'approches expérimentales permettant de tester des prédictions faites par la seconde approche, afin d'en éprouver la validité. Une des prédictions majeures concerne l'importance de la SEG dans les processus de différenciation cellulaire, et notamment la prédiction que la variabilité de l'expression génique doit augmenter au début du processus avant de diminuer sur la fin du processus. Dans ce cadre nous avons mis en œuvre des approches de transcriptomique à

l'échelle de la cellule unique dans un modèle de différenciation érythrocytaire aviaire. Ces approches nouvelles permettent d'interroger le niveau d'expression génique à l'échelle pertinente pour tester la prédiction, puisque la mesure de la valeur moyenne ne saurait qu'écraser les variations qui nous intéressent. Nos résultats expérimentaux démontrent une augmentation significative de l'entropie (une mesure de la variabilité de l'expression génique entre les cellules) dans les 8 à 24 heures après induction de la différentiation qui redescend ensuite à 72 heures à une valeur significativement inférieure à la valeur initiale. Nous montrons également que cette variation au niveau moléculaire précède (et annonce?) une variation à l'échelle supérieure (augmentation de la variabilité dans la taille des cellules) et à une échelle fonctionnelle (engagement irréversible dans le processus de différenciation). Ces données expérimentales favorisent donc clairement une vision intrinsèquement probabiliste et dynamique des processus de différentiation et ouvrent des perspectives nouvelles quand aux mécanismes de régulation à l'échelle cellulaire sélectionnés par l'évolution.

1.

Le hasard au coeur de la cellule- Probabilités, déterminisme, génétique (2009). Sous la direction de Jean-Jacques Kupiec, Olivier Gandrillon, Michel Morange et Marc Silberstein. Editions Matériologiques.

2.

Berg, O.G. (1978). A model for the statistical fluctuations of protein numbers in a microbial population. J Theor Biol 71, 587-603.

3.

Chalancon, G., Ravarani, C.N., Balaji, S., Martinez-Arias, A., Aravind, L., Jothi, R., and Babu, M.M. (2012). Interplay between gene expression noise and regulatory network architecture. Trends Genet 28, 221-232.

4.

Eldar, A., and Elowitz, M.B. (2010). Functional roles for noise in genetic circuits. Nature 467, 167-173.

5.

Kupiec JJ. A Darwinian theory for the origin of cellular differentiation. Mol Gen Genet. 1997;255(2):201{8.

9 novembre

Eric Bapteste (Institut de Biologie Paris Seine) Complexité organisationnelle en biologie : état de l’art et conséquences pour la biologie de l’évolution ?

Dans les dernières décennies, les connaissances au sujet de la complexité biologique au niveau moléculaire, cellulaire et plus récemment au niveau des holobiontes (organismes eucaryotes et leurs communautés microbiennes associées) ont significativement progressé. Réseaux d’interactions moléculaires, transferts latéraux de gènes, symbioses et endosymbioses affectent l’évolution biologique depuis des milliards d’années, conduisant à l’apparition d’organisations multi-agents, multilignées, multi-niveaux, interconnectées et imbriquées. Autrement dit, à tous les niveaux d’organisation biologique, l’ubiquité des collectifs, systèmes composés de multiples agents dépendants, représentables de manière abstraite par des réseaux, est notable. De ce fait, la biologie évolutive apparait fondamentalement comme une science des réseaux dynamiques. Cette proposition offre un cadre original pour unifier, recomposer et étendre la théorie de l’évolution, en mettant en avant plusieurs concepts périphériques ou absents des explications classiques de l’histoire du vivant sur terre.

14 décembre Frédérique Théry (Agrégée de science, Enseignante en lycée) Quand les ARN non codants bousculent la biologie moléculaire

Au début des années 2000, la conception des génomes comme des machines à produire des protéines a été rendue caduque par la découverte inattendue dans les cellules de très nombreux ARN non traduits en protéines : les ARN non codants. Les recherches sur ces ARN, qui assurent des fonctions régulatrices majeures au sein des cellules, ont profondément modifié la représentation que les biologistes se font de l’ADN et des processus cellulaires. Nous nous efforcerons de montrer en quoi ces recherches et les résultats qu’elles apportent reflètent, accompagnent et catalysent des transformations méthodologiques, conceptuelles et théoriques majeures de la biologie moléculaire contemporaine. Nous aborderons plus précisément ce

problème à travers l’étude de deux questions conceptuelles : comment définir le concept de gène au niveau moléculaire, et quelle place lui accorder dans les théories biologiques à l’ère post-génomique ? Est-il pertinent de recourir au concept d’information afin d'expliquer les fonctions des acides nucléiques ?

11 janvier 2017 Robert Nardonne (doctorant en Histoire des TechnoSciences et Société. Laboratoire Cnam/HT2S) Les Composantes Scientifiques et Techniques de la Culture à 25 images/s ; Entre pédagogie et propagande

Les notions de gène et d’ADN se sont très largement imposées dans l’opinion. Tant et si bien qu’elles se retrouvent dans le vocabulaire journalistique, politique et publicitaire à propos de tout et de n’importe quoi. « L'image de Resnais est comme réimplantée dans le code génétique du public de cinéma français » Jacques Mandelbaum, Le Monde du 02/03/2014. « L’hôpital public, fait parti de notre patrimoine génétique », Marisol Touraine, Ministre de la santé, 04/03/13, Canal+. « Le train c’est l’ADN de notre entreprise », Guillaume Pépi, PDG SNCF, BFMtv 02/07/15. « Bultex Nano, L'ADN du confort », Publicité pour des matelas, 06/2014. Jusqu'à la gamme de produits de beauté « Généfique » de l’Oréal. Mon propos n’est pas, ici, d’analyser les raisons de cette appropriation massive, mais plutôt d’observer comment, par quelle voie, ces notions se sont imposées comme d’indiscutables vérités. L’eussent-elles été aussi massivement sans la technique cinématographique, des films des salles obscures aux reportages télévisuels ? L’essentiel de ma recherche au sein du laboratoire HT2S du Cnam, porte sur l’étude historique du dispositif cinématographique, comme vecteurs de transmission et de légitimation des savoirs scientifiques et techniques.

L’effet de réel produit par la technique cinématographique, en fait sans aucun doute l’outil de persuasion le plus puissant qui soit. Le camarade Lénine qui s’y connaissait, déclarait que «le cinéma est pour nous, de tous les arts, le plus important ». Toute information vectorisée par ce double dispositif technique (matériel et narratif) se trouve immédiatement investie d’un crédit de vérité : « Je le vois, il est là, il me parle » (Eliseo Veron, à propos du Journal Télévisé). Une aubaine pour le faire croire, un handicap pour le faire penser, un passionnant champ d’étude pour les sciences humaines. La commercialisation massive du matériel de prise de vue cinématographique, présent jusque dans les téléphones, la prolifération des écrans de diffusion dans l’espace public et privé, la normalisation d’une authenticité ontologique accordée à cette technique, rend urgent sa rationalisation. Remettre la technique à sa place d’outil de production d’artefacts, de machine à fabriquer des fables.

1er février Jean-pascal Capp (INSA, Toulouse) Nouveau regard sur les cellules souches

La notion de cellule souche est en plein bouleversement. La vision issue des premières études moléculaires des années 60/70, est battue en brèche par de nouveaux éléments expérimentaux. Ces résultats, rendus possibles par certaines avancées technologiques, sont venus questionner la définition de la cellule souche en termes moléculaires précis. Les cellules souches sont en réalité intrinsèquement instables et variables, ce qui a des conséquences fortes en termes de différenciation cellulaire, de développement des organismes et de développement cancéreux. Ces conséquences seront évoquées en introduisant les alternatives aux modèles de développement classiques basés sur le déterminisme génétique, en particulier l’ontophylogenèse, qui paraît le mieux pouvoir synthétiser les résultats évoqués. Enfin la "reprogrammation cellulaire" et la médecine régénérative seront brièvement discutées sous cet angle novateur.

8 mars

Marc-André Sélosse (Institut de Systématique, Bioévolution, Diversité)

La difficile émergence du concept de coopération entre espèces vivantes face à l’idée de compétition

Au XIXe siècle, quand émerge la notion de coopération entre espèces, elle s’inspire d'un champ philosophique sociétale engagé. Elle ne paraît, à première vue, guère compatible avec les théories de l'évolution qui reposent sur la compétition et les relations de prédation ou de parasitisme, et qui laissent peu de place aux phénomènes coopératifs. Aussi la pensée sur la coopération se développe-t-elle indépendamment de l’évolution, voire souvent en rupture avec le darwinisme. Cette tendance va progressivement se résoudre, à la fin du XXème siècle, en une cohérence combinant compétition et coopération spécifiques sein de la théorie néodarwinienne.

19 avril Maureen O’Malley (UMR 5164, Université de Bordeaux) From endosymbiosis to holobionts: implications for evolutionary theory

Contemporary discoveries of large-organism dependence on microorganisms are often accompanied by a tendency to see these findings as problematizing standard evolutionary theory. Although such thoughts have much older historical antecedents, a common inspiration comes from Lynn Margulis’s ideas in the 1970s about endosymbiosis (one cell living inside another cell) and symbiosis (intimate interactions between organisms). As part of her broader project on the evolutionary implications of symbiosis, Margulis coined the term ‘holobiont’ to refer to a unified entity of symbiont and host. This concept is now applied in controversial ways in microbiome research, which is the molecular study of large organisms (particularly animals) and the microbial communities that inhabit them. When these collectives are called holobionts, the term implies not just a physiological unit but also various senses of an evolving unit. After outlining the issues and problems of such

conceptualizations, I will discuss Margulis’s legacy for the study of microbial-host systems and evolutionary research.

10 mai Gilbert Lechermeier (ingénieur chimiste, thèse IHPST) Le vivant entre rupture et continuité ; comment saisir l’originalité du vivant ?

Comment caractériser le vivant dans le cadre scientifique tel qu’il se pratique et partant, identifier les contraintes et limites épistémiques qui rendent si délicate la théorisation d’un système matériel doté des propriétés que nous qualifions de vitales ? Ce questionnement emprunte un fil conducteur : une continuité qui procède sur le fond de la communauté matérielle entre la matière constitutive du vivant et la matière commune universelle. Dans cet ordre d’idées s’énonce un deuxième constat, c’est celui d’une distinction, d’une différence, d’une spécificité qui fait que tout système vivant diffère des autres systèmes matériels avec lesquels il partage cette communauté matérielle. Les rapports entre une classe d’organisations matérielles – le vivant- et l’ensemble des propriétés dont la présence simultanée et conjointe participe de cette singularité que l’on subsume sous le terme de « vie » sont au cœur de nos interrogations. Les propriétés « vitales » sont couramment qualifiées d’émergentes car, du moins en première analyse, elles ne sont pas réductible aux seuls composants matériels élémentaires des systèmes qui les portent. Ce sont par ailleurs les rapports entre ce substrat matériel et les propriétés phénoménologiques qui constituent l’objet même des sciences de la vie. Ce que nous tenterons alors, c’est d’en présenter quelques éléments significatifs à travers l’analyse de propositions qui tiennent lieu de définitions de la vie. Celles-ci résument verbalement ou parfois même, théorisent ces liens au sein de modèles globaux. En somme, ces définitions exposent sous une forme résumée l’état de notre compréhension des liens entre ces systèmes matériels, leur organisation et les propriétés vitales qu’ils expriment. Leur analyse critique permet de cerner ce qui constitue la spécificité et la singularité des systèmes vivant dans le fond commun de la matière universelle.

14 juin Mathias Girel (ENS, Paris) Peut-on définir un doute raisonnable en sciences ?

Le doute méthodique entre ordinairement dans les descriptions de l’enquête scientifique et on l’oppose tout aussi classiquement à un doute hyperbolique ou déraisonnable, qui serait la marque du scepticisme, qu’à un doute « produit » qui serait motivé par d’autres finalités que celles de l’enquête. Le présent exposé, se fondant sur les apports philosophiques de Charles Sanders Peirce et sur les exemples fournis par des controverses environnementales et sanitaires récentes, reviendra (1) sur la pertinence qu’il y a à parler de doute pour qualifier la dimension critique de la recherche scientifique, (2) sur les formes du doute mobilisées dans l’enquête ainsi que (3) sur l’arrière-plan normatif qui permet de parler de « doute raisonnable ».

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