Le métier et la vocation du savant

February 26, 2018 | Author: Anonymous | Category: Arts et Lettres, Philosophie, Éthique
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FICHE DE LECTURE Max Weber Le savant et le Politique

Biographie de l’auteur Max Weber est né en 1864 dans une famille d'industriels de Westphalie. Dès son plus jeune âge, il côtoie des intellectuels et des politiciens sous l'influence de son père qui poursuit une carrière politique. Universitaire de grande envergure, il enseigne d'abord le droit et l'économie. Il crée en 1904 la revue d'archives de sciences sociales et de sciences politiques et enseignera la sociologie. Ces ouvrages les plus connus sont, outre Le savant et le politique : L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme (1905), et Economie et Société (1922). Le savant et le politique correspond au texte de deux conférences données par Max Weber en 1919 alors qu'il participe à l'élaboration de la constitution de Weimar et que l'Allemagne se croit proche de la révolution. Les numéros de pages correspondent au texte française, collection 10/18.

présentés ici de l’édition

Le métier et la vocation du savant La carrière du savant Weber distingue le système académique allemand, dans lequel les Privatdozent (professeurs apprentis) ne sont pas rémunérés mais ont toute liberté de choisir leurs cours, et le système américain, dans lequel les étudiants devenus assistants sont rémunérés mais ont une forte charge de travail et ne maîtrisent pas le contenu de leur cours (p. 71-75). Le système de promotion universitaire laisse grande place au hasard et a tendance à favoriser les 'médiocres' (p. 76). Weber y voit une loi générale de toute décision collective, mais explique aussi que la carrière universitaire a deux visages : celui

du professeur et celui du savant (p. 78). La valeur du savant est intangible, tandis que celle du professeur se mesure par l’assiduité des étudiants à son cours (p. 79-80). Spécialisation et péremption de la science La science est spécialisée, et le savant qui veut durer doit respecter cette spécialisation (p. 81). Passion, inspiration et travail acharné (p. 82-83) sont les conditions de la découverte. A la différence de l’art, la sciences est soumise au progrès : les œuvres scientifiques postérieures remplacent les œuvres antérieures (p. 87). Une œuvre scientifique achevée est celle qui fait naître d’autres questions. Le destin d’un savant est d’être dépassé (p. 88). La science et le monde Le progrès scientifique fait partie d’un processus d’intellectualisation du monde. Les hommes ne connaissent pas mieux leurs propres conditions d’existence (p. 90), mais ils peuvent expliquer le monde sans faire appel à des forces ou puissances mystérieuses (p. 91). Ce processus de désenchantement du monde enlève son sens à la vie et à la mort. La vocation de la science a radicalement changé. Les grecs pensaient atteindre la vérité () qui permet de savoir comment se comporter en société (p. 94). A la renaissance, avec l’avènement de l’expérimentation scientifique, on voyait dans la science un chemin vers la nature (p. 95) et vers Dieu (p. 96). Ces espoirs se sont écroulés à tel point que Tolstoï a pu affirmer que la science n’a pas de sens, car elle ne donne aucune réponse à la question essentielle : « que devons-nous faire ? Comment devons-nous vivre ? ».

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Max Weber – Le savant et le politique Le scientifique et le politique La science présuppose que le résultat du travail scientifique vaut la peine d’être connu (p. 98). La cosmologie suppose ainsi que l’univers vaut la peine d’être étudié, la médicine que le corps humain doit être conservé en vie (p. 99). L’esthétique ne s’intéresse pas aux implications théologiques des œuvres d’art (p. 100). Selon Weber, la politique n’a pas sa place dans les universités et les sciences humaines doivent se limiter à étudier les structures de l’action collective et non pas à juger les valeurs qui les guident (p. 103) : d’abord parce que cela les empêcherait d’avoir une connaissance intégrale des faits (p. 104), ensuite parce qu’il est important que le professeur apprenne à ses élèves qu’il existe des faits désagréables (p. 105), et enfin parce que divers ordres de valeurs s’affrontent sans que la science ne puisse trancher. L'éthique du scientifique correspond donc précisément à se limiter au champ de la science et à s'abstenir de s'aventurer dans celui de la politique. L'intérêt de la science est de produire des connaissances, de produire des méthodes et de faire œuvre de clarté (p. 111 – 112) : elle peut déterminer les conséquences d'une prise de position (p. 113) et faire que les individus se rendent compte du sens de leurs actes. Le métier et la vocation du politique Qu’est ce que la politique ? Utilisé pour qualifier toute « activité directive autonome » (p. 123) au sens large, le terme ‘politique’ est compris par Weber comme « la direction du groupement politique que l’on nomme Etat » (p. 124). L’Etat se définit non pas par le contenu de son action mais par son moyen. « Tout Etat est fondé sur une force », comme disait Trotski, et plus précisément : « l’Etat contemporain est une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé, revendique avec succès pour son

propre compte le monopole de la violence physique légitime ». Ainsi, la politique est l’effort fait pour participer au pouvoir ou influer sur sa répartition (p. 125). L’Etat consiste donc en un rapport de domination qui s’appuie sur trois formes de légitimités :  la tradition (coutume sanctifiée par sa validité immémoriale),  le charisme (grâce personnelle et extraordinaire d’un individu),  la raison (ou la loi : compétence positive fondée sur des règles établies rationnellement). Selon Weber, les politiques charismatiques ont partout été dans l'histoire des chefs de guerre et des prophètes. En occident on trouve aussi les démagogues, chefs de partis parlementaires qui sont des hommes politiques par vocation. Etat-major administratif et moyens matériels de domination L’entreprise de domination de l’Etat nécessite des hommes dévoués (l’Etatmajor administratif) et des moyens matériels de gestion (p. 129). L’obéissance de l’Etat-major peut être fondée sur la rétribution matérielle ou sur l’honneur social (p. 130). La possession des moyens matériels de domination permet de distinguer les groupements organisés « selon le principe des ordres », dans lesquels les moyens matériels sont en totalité ou partie propriété personnelle de l’Etat-major administratif, des autres formes de pouvoir (patriarcal, patrimonial, et Etats à structure bureaucratique) dans lesquelles l’Etat-major ne possède pas ces moyens (p. 132). L’Etat moderne est ainsi selon Weber un groupement qui, dans le but de revendiquer le monopole de la violence physique légitime, a « réuni dans les mains des dirigeants les moyens matériels de gestion » (p. 133). 2

Max Weber – Le savant et le politique C’est dans l’Etat moderne que sont apparus les hommes politiques professionnels, c'est-à-dire qui exercent une activité politique à temps plein (p. 134 135). Les conditions de recrutement des hommes politiques L’homme politique peut vivre pour la politique ou de la politique. Dans le premier cas il y trouve une jouissance ou exprime sa valeur en se mettant au service d’une cause, dans le second il y trouve une source permanence de revenus (p. 137). Ainsi, l'ouverture de la politique aux personnes sans fortune nécessite sa rémunération (p. 140). Le recrutement des hommes politiques ne pourrait sinon être que ploutocratique (seuls ceux qui disposent d’une source de revenu leur permettant d’être ‘disponibles’ peuvent faire de la politique, p. 139). Dans le cas où l'activité politique est rémunérée, les luttes de pouvoir ont également pour enjeu la distribution des emplois (p. 141). Cette lutte étant un fondement du jeu politique jusque dans les pays occidentaux (p. 142). Le développement de la technique militaire, la complexification des procédures juridiques et des techniques financières a rendu nécessaire la création de corps de fonctionnaires intellectuellement spécialisés et hautement qualifiés (p. 145). Ceux-ci ont d'abord lutté contre le pouvoir discrétionnaire du prince (p. 146). L’apparition des Parlements a modifié cette situation, soit par la collusion des fonctionnaires avec le monarque contre le parlement (p. 147), soit par le transfert des véritables appareils de gouvernement au Parti majoritaire (p. 148). Dans le même temps s’est imposée la distinction entre « fonctionnaires de carrière » et « fonctionnaires politiques », ces derniers pouvant être mis en disponibilité ou déplacés à chaque changement de majorité (p. 149). Le

fonctionnaire politique est avant tout le représentant de la constellation politique au pouvoir, il juge en fonction de son programme les propositions faites par les fonctionnaires spécialisés, à l’image du conseil d’administration d’une entreprise privée (p. 150). L’avènement des hommes politiques professionnels Plusieurs types d’hommes politiques professionnels ont tenu le pouvoir selon les siècles et les pays : les clercs d’abord, car ils savaient lire et n’étaient pas tentés de prendre le pouvoir des seigneurs (p. 152), puis les lettrés ayant reçu une formation humaine. La noblesse de cour, ensuite, une fois dépossédée du pouvoir politique (p. 153), le patriarcat (petite noblesse anglaise) et enfin les juristes formés dans les universités (p. 154), qui eurent un rôle fondamental en Europe où ils consolidèrent à la fois l’absolutisme royal et la démocratie portée par la Révolution (p. 155). Les journalistes peuvent être considérés comme une catégorie d’hommes politiques professionnels au sens où ils vivent de la politique (p. 158). Pourtant le journalisme n’est par une voie d’accès au pouvoir politique, et cela tient aux exigences en terme de temps de leur métier (p. 160). L’avènement des partis politiques L’organisation du politique à grande échelle a conduit à la distinction entre citoyens politiquement actifs et citoyens passifs. « L’existence de chefs et de partisans qui cherchent à recruter librement des militants et l’existence d’un corps électoral passif constituent des conditions indispensables à la vie de tout parti politique. » Weber distingue les partis constitués de notables qui s’organisèrent d’abord localement (p. 167), et les partis modernes, organisés sous la domination des individus qui font de l’activité politique leur profession principale (p. 170). Dans ces partis le pouvoir est entre les mains des permanents. 3

Max Weber – Le savant et le politique L’influence démagogique de la personne du chef devient prépondérante : c’est l’entrée en jeu de la démocratie plébiscitaire (p. 172). Weber analyse alors l'émergence du système plébiscitaire en Angleterre (système du caucus, p. 174) et aux EtatsUnis (spoil system, p. 180). Il s'interroge ensuite sur la structure des partis politiques à adopter pour l'Allemagne (p. 187). L’éthique de l’homme politique A la fin de son exposé, Weber expose les trois qualités qui font pour lui l'homme politique (p. 195) : la passion, le sentiment de la responsabilité et le coup d'œil. La vanité qui peut toucher l'homme politique est celle d'un désir de puissance qui n'est pas au service d'une cause (p. 197). Cela lui permet de distinguer les deux éthiques du politique :  l'éthique de la conviction qui pousse l'homme moral à agir de manière parfois irrationnelle,  l'éthique de la responsabilité qui est celle de l'homme qui prend en compte les conséquences prévisibles de ses actes. Il montre que l'éthique de la conviction seule ne suffit pas à l'action politique car elle ne prend pas en compte les conséquences de cette action (p. 205 – 206), et surtout parce qu'elle justifie les moyens employés par la fin recherchée (p. 207). Le paradoxe éthique de l'homme politique est donc que, guidé par la conviction, il s'expose à la responsabilité (p. 215 - 216).

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